Construire une filière pour sauver le canard de Duclair
Les défenseurs de celui qu’on surnomme l’avocat ont renouvelé leur partenariat par la signature d’une convention de 3 ans, le 16 octobre à Notre-Dame-de-Bliquetuit.
Le long travail de sauvegarde du canard de Duclair, c’est un peu l’histoire de l’œuf… et de la cane. Il faut une filière pour conserver des éleveurs… mais il faut des canards – et donc des éleveurs – pour construire une filière… C’est ce travail fastidieux que mènent conjointement le Collectif de sauvegarde des races avicoles de Normandie (CSRAN), l’Association de promotion du canard de Duclair et le Parc naturel régional des Boucles de la Seine Normande. Un partenariat que le Parc et le CSRAN ont reconduit officiellement le 16 octobre à Notre-Dame-de-Bliquetuit, par la signature d’une convention de 3 ans.
A travers elle, le parc naturel poursuit notamment son investissement dans la production de canetons destinés à l’élevage. Le PNR a en effet investi en 2015 dans un couvoir et un éclosoir afin d’apporter des canetons pure race aux engraisseurs. Un travail laborieux, tant la maîtrise de la reproduction de cette race peu stabilisée génétiquement s’est avérée complexe. Il aura ainsi fallu 5 ans aux éleveurs du Parc pour arriver à des protocoles satisfaisants. « Mais cette fois ça y est, assure Jean-Pierre Girod, le président du PNR. Nous sommes arrivés à des résultats d’éclosion très satisfaisants. »
Des qualités gustatives à faire valoir
Les deux élevages professionnels de cette race devraient donc pouvoir compter sur des approvisionnements réguliers en canetons. Reste à bien vendre les canards engraissés, pour préserver les éleveurs existants et encourager les installations. Si la question de l’abattage est résolue notamment grâce à La Volaillère des Clos à Ouainville, il n’en demeure pas moins que les canards de Duclair ne peuvent pas être commercialisés par les mêmes voies que leurs cousins, plus compétitifs par leur poids et leurs facilités d’élevage. « Pour sauver ces races, il n’y a pas de secret, il faut les mettre dans nos assiettes », insiste Jocelyn Marguerie président du CSRAN, qui s’occupe aussi d’autres races domestiques à très faibles effectifs comme les poules de Gournay et de Pavilly, ou l’oie normande. C’est d’autant plus vrai, que le canard de Duclair dispose a contrario d’avantages singuliers : une chair très fine et très goûtue qui sait séduire les gourmets ; mais aussi une image patrimoniale forte, puisque la race serait à l’origine de la fameuse recette du canard au sang ou canard à la rouennaise. Parc naturel et Collectif de sauvegarde n’en démordent donc pas : c’est bien d’une filière de qualité dont le canard de Duclair a aujourd’hui besoin. Cela passe évidemment par la restauration, mais aussi par les boucheries haut de gamme. Mais il reste à convaincre au-delà du cercle des passionnés…
Benoit Delabre