CONFÉRENCE RÉGIONALE DE L’EMPLOI TERRITORIAL
Le 22 septembre, les cinq Centres de gestion de la fonction publique des Hauts-de-France organisaient leur Conférence régionale de l’emploi territorial (Cret) au théâtre du Jeu-dePaume à Albert. Une première à l’échelle de la grande région à laquelle ont participé quelque 150 personnes, toutes réunies autour du thème “Intelligence collective, management et coopération”, ou pourquoi et comment adapter les méthodes de management de la fonction publique dans un monde en constante évolution.
Parce que les questions liées au management sont autant essentielles dans le secteur privé que dans l’organisation et le fonctionnement des collectivités, le Cdg80 (présidé par Claude Cliquet, également maire d’Albert) et le Cdg59 (présidé lui par Marc Godefroy), co-organisateurs de la Cret 2017, ont souhaité associer à leur réflexion les trois autres Centres de gestion de la fonction public des Hauts-de-France. « Nous vivons une époque de profondes mutations, a souligné Claude Cliquet en préambule de la conférence. Il ne s’agit plus seulement aujourd’hui pour les collectivités de prendre les bonnes décisions pour des résultats performants, mais il faut également développer un management de qualité pour accroître la motivation des agents. Le facteur temps est trop souvent négligé, alors qu’il faut le prendre en compte pour réfléchir à une conduite de changement efficiente. Nous devons aussi mobiliser les Ressources humaines pour mettre sur pied des équipes fortes et soudées, pour un service territorial innovant. » Le ton de matinée, animée par le journaliste de presse territoriale Stéphane Menu, était donné : comment rendre le management de la fonction publique plus efficace, en lorgnant notamment du côté du secteur privé ? « Au-delà de ce parallèle, cette conduite du changement et l’évolution du secteur public est nécessaire pour s’adapter un monde qui bouge économiquement et socialement », a renchéri le député Stéphane Demilly, qui milite à l’Assemblée nationale pour une simplification des normes et regrette que « la loi NOTRe complexifie davantage le système, sans suppression d’échelon territorial. Comme le disait si bien Winston Churchill : l’optimiste voit une opportunité dans chaque difficulté, je crois sincèrement que cette citation prend tout son sens pour les collectivités, elles doivent tirer le meilleur des obstacles auxquels elles se heurtent aujourd’hui. Notre grande région est une force, pour que nous construisions ensemble de grands projets ».
MUTUALISATION
Une opportunité que les Centres de gestion de la région ont su saisir, en travaillant main dans la main, pour, comme l’a indiqué le président du Cgd du Nord Marc Godefroy, « dépasser la coopération de base » (une charte commune aux Centres de gestion devrait notamment être prochainement créée). La mutualisation est donc déjà de mise pour la fonction publique territoriale des Hauts-de-France, avec entre autres le transfert de compétences du Centre national de la fonction publique (CNFPT) aux Cdg, la mutualisation des sujets de concours ou de la documentation, des échanges de données – comme la Bourse de l’emploi -, d’expérimentations (comme celle menée sur les moyens d’améliorer la gestion des fonctionnaires momentanément privés d’emploi), etc.
« Les Centres de gestion se posent en tiers de confiance auprès des collectivités et communes, afin d’accroître leur efficacité, et les aider à maîtriser l’évolution des coûts et dépenses », a assuré Marc Godefroy, insistant sur l’importance de la proximité et du développement du service public. Des objectifs que doivent atteindre les collectivités tout en composant avec une donne pas forcément des plus favorables : gel de la hausse de salaires, suppression partielle de la taxe d’habitation, points d’indice différents entre les trois fonctions publiques…
« Les signes ne sont certes pas excellents, et les préoccupations existent, a concédé Marc Godefroy, il faut rester vigilants, attentifs et constructifs et faire preuve d’intelligence collective pour innover et dépasser ces difficultés. Les collectivités aspirent à une nouvelle organisation, mais elle doit être anticipée et concertée et ne surtout pas se faire dans la précipitation ni dans la gestion comptable. »
INDISPENSABLE MODERNISATION
« Il est vrai que depuis les années 2000, nous avons connu des bouleversements successifs, a poursuivi Bernard Cailliau, président du Cdg62. Avec comme fil rouge le poids financier et l’image de “fonctionnaires machines”, alors même que sept Français sur dix se disent attachés à la fonction publique locale. La modernisation de la fonction publique est indispensable, nous devons adapter et réformer le statut des fonctionnaires. »
D’où l’importance de la thématique retenue pour cette conférence régionale, qui avait vocation à interroger le fonctionnement et l’organisation des services publics, qui cherchent à évoluer.
« Le public et le privé ont un premier point commun de taille : l’humain, couplé à la reconnaissance du savoir-faire, et une organisation pyramidale. La différence de taille c’est la capacité d’adaptation, et l’évolution, le service public est à ce niveau plus lent, parce qu’il n’a pas cette urgence vitale que peut avoir un organisme privé, qui s’il ne s’adapte pas rapidement, meurt », a expliqué Bernard Cailliau. Une opinion partagée par le médiateur et consultant Hervé Chavas : « Le secteur privé a sans doute plus d’avance et d’agilité que le public, parce qu’il se heurte effectivement à un impératif de survie. »
Pour le président du Centre de gestion du Pas-de-Calais, il faut mettre les agents au cœur du changement, « pour plus d’efficacité », et échanger en toute transparence pour « un meilleur service public ».
Et pour Hervé Chavas, il faut surtout « faire en sorte que le tissu social des organisations ne se déchire pas ».
Et à la question “Est-il vraiment justifié d’opposer les pratiques du privé et du public ?”, la réponse du consultant est plutôt modérée : « Le secteur public a lui aussi des leçons à donner au privé, il n’y a pas à mon avis de décalage intellectuel entre les deux sphères qui ont des questionnements communs et des préoccupations partagées comme celles du nomadisme, de la digitalisation, des RH…, avec en filigrane la nécessité de s’adapter en permanence. » Le point essentiel de ce virage à opérer pour le consultant, c’est le droit à l’erreur : « Il faut fabriquer des erreurs intelligentes, et savoir qu’en faire par la suite. Ce retour d’expérience est primordial pour les corriger dans le but de progresser. Il ne faut pas oublier que la seule ressource inépuisable, c’est la ressource humaine… », a rappelé Hervé Chavas.