Conférence

Club des acteurs de l'Est de la Somme : Luc Ferry tire des leçons de la pandémie

Le Club des acteurs de l’Est de la Somme a accueilli Luc Ferry, devant un public de 350 personnes. Philosophe et ancien ministre, sa conférence a porté sur les leçons d’une pandémie, ses conséquences métaphysiques, écologiques et politiques.

Luc Ferry a décrypté la pandémie au regard de l'évolution de la société.
Luc Ferry a décrypté la pandémie au regard de l'évolution de la société.

Julien Burlat, président du Club des acteurs de l’Est de la Somme, a rappelé l’objectif du club, comptant 32 entreprises, qui est de fédérer et rassembler des chefs d’entreprise de tous secteurs d’activité, dans un rayon de 100 kilomètres autour de Nesle. 

La plupart d‘entre eux étaient présents avec leurs propres invités ainsi que de nombreux élus locaux. « Nous avons l’intention de programmer deux conférences par an, portant sur un thème d’actualité, concernant les entreprises. Aujourd’hui, nous avons choisi ensemble d’inviter Luc Ferry qui a accepté bien volontiers et nous l’en remercions. »

Pendant près de deux heures, le philosophe a mis en exergue des sujets de grande actualité. « Il faut se rappeler la grippe de Hong Kong en 1968 qui avait causé la mort de 34 000 personnes. Pourquoi la pandémie de 2020 est complètement différente ? La première raison, en 1968, nous sommes encore très près des guerres d’Algérie, d’Indochine et même celle de 1939, qui ont causé des dizaines de millions de morts, a expliqué Luc Ferry. Donc, mourir d’une grippe n’était rien. »

La seconde raison invoquée par le philosophe : l’effondrement du communisme et du catholicisme, qui avaient des discours sur l’importance de la vie. Le communisme représentait à l’époque 30% de l’électorat français contre 2% aujourd’hui. « On recensait 95% de baptisés en France, aujourd’hui ils sont 30%. Il y avait 45 000 prêtres, en 2021, ils sont 5 000 et il y a 45% de chrétiens, a-t-il relevé. L’économie est la chose la plus importante qui compte aujourd’hui. La troisième raison est l’effondrement du communisme qui s’explique par la déconstruction des autorités traditionnelles, le souci de soi, la prolifération du bien-être de chacun. Il y a aussi la déconstruction de la peinture, de la littérature, les règles du théâtre, du cinéma avec la nouvelle vague et la disparition du monde paysan, ils étaient deux millions, ils ne sont plus que 390 000 aujourd’hui. »

Pourquoi cette déconstruction ?

Selon Luc Ferry, c’est le capitalisme qu’il fat incriminer : « L’innovation permanente a engendré une rupture avec la tradition. Il fallait pour nous et nos enfants entrer dans l’ère de l’hyperconsommation, avec en ligne de mire le souci du bien-être et de la santé. C’est pourquoi, la fabrication d’un vaccin en un an, c’est génial car il apporte une défense contre le virus que l’ARN combat. Ce vaccin est un succès de la mondialisation. Pour celles et ceux qui ne le savent pas, c’est Donald Trump, qui pourtant n’est pas un de mes amis, qui a débloqué onze milliards pour la recherche et le développement du vaccin Pfizer. »

L’ancien ministre a également évoqué « la vague verte » avec l’écologie, qui participe à la décroissance, notamment en Allemagne, en voulant corriger les effets pervers de l’industrie. « En France, il y a un mouvement, l’éco-modernisme, que je soutiens, car il est hostile à la décroissance. 3% de la planète sont occupés par quatre milliards d’humains. Si on pouvait découpler sur plus de territoires, on réduirait les nuisances. L’économie circulaire permet de gagner de l’argent. Cette façon de fonctionner n’engendre aucune pollution, car en recyclant intelligemment les voitures, l’acier, le béton, etc. c’est positif pour tout le monde », a-t-il plaidé. Luc Ferry en est certain : cette pandémie va booster la recherche, « il faut se réjouir des progrès scientifiques, on sait d’ores et déjà que le vaccin ARN Messager va être utilisé pour soigner le cancer. Il nous faut une politique européenne commune pour la recherche et la défense ».