Claude Gewerc : « Je ne suis pas pour l’enterrement du canal Seine-Nord »
Le projet qualifié « d’enjeu structurant majeur pour la Picardie » par Nicolas Sarkozy en 2012 et qui confirmait également que « 95% du financement était bouclé », prend l’eau de toutes parts.
Le canal Seine-Nord devait relier en 2016 le grand bassin parisien et le Nord-Pas-de- Calais, et au-delà, le Benelux et les 20 000 km du réseau fluvial Européen de grand gabarit. Déclaré d’utilité publique en 2008, le canal, long de 106 km dont 75 km sur le département de la Somme, doit finalement être reconfiguré. L’appel d’offres a été suspendu l’an dernier par le gouvernement socialiste en attendant les conclusions d’un audit financier sur la faisabilité du canal. Le rapport de l’Inspection générale des finances, commandé en septembre 2012 par le ministère des transports au Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD), préconise de reporter le projet à une période plus favorable. « Ce rapport porte un jugement très sévère sur le pilotage d’un projet qui paraît aujourd’hui en échec, en particulier en raison d’une dérive des coûts qui n’a jamais été mise en lumière », a déclaré Frédéric Cuvillier, ministre délégué aux Transports. D’après le projet initial, le coût de construction du canal Seine-Nord Europe était évalué à 4 milliards d’euros environ, dont 6,6% devaient être apportés par l’Europe. Le projet est désormais estimé à plus de 7 milliards d’euros, pratiquement le double de ce qui était prévu. « Cela fait plus d’un an que je dis que le budget prévu initialement est insuffisant. Il faut préparer un nouveau projet, je le défenderai. Je ne suis pas pour l’enterrement du projet de canal », affirme Claude Gewerc, président du conseil régional de Picardie qui en décembre 2010, au lendemain de l’annonce du bouclage du financement pour la partie contributions publiques par le Préfet de Région, avait acté une participation à hauteur de 80 millions d’euros.
Dix ans de travail: pour quoi ?
Aujourd’hui comment relancer le projet ? Peut-être en revoyant le tracé. Pour Stéphane Demilly, député maire d’Albert (Nouveau centre), le gouvernement veut tout simplement tuer le projet. « Tous les gouvernements successifs qui depuis plus de vingt ans font avancer ce projet, étape après étape, ont confirmé sa pertinence, y compris le gouvernement Jospin qui avait fait le choix du tracé en 1997. Cela veut-il dire que tous sont incompétents. N’oublions pas que c’est tout l’avenir de notre territoire qui est en question dans l’est de la Somme », fulmine le député de la Somme qui appelle à la mobilisation générale. « Selon moi si le gouvernement décide un nouveau projet il faudra qu’il soit entièrement public. Car le coeur du problème réside dans la procédure de partenariat publicprivé », reprend le président du conseil régional, conscient de l’enjeu environnemental et du puissant levier de développement économique que représente le transport fluvial en Picardie. Le ministre a d’ailleurs annoncé l’arrêt de l’actuelle procédure de participation public-privé et a confié au député socialiste du Nord Rémi Pauvros la tâche de remettre à plat les aspects techniques du dossier. Cette mission de reconfiguration devra rapidement rendre ses conclusions. Objectif: pouvoir présenter le nouveau projet dès le premier semestre 2014 à Bruxelles afin de bénéficier de financements européens pouvant atteindre 30%.