Retour sur le 76e Congrès national des experts-comptables à Bordeaux

«Cette crise a démontré toute notre utilité»

Organisation efficace, qualité des intervenants, ferveur de se retrouver… Le congrès national des experts-comptables, qui s’est tenu du 6 au 8 octobre à Bordeaux, a été un véritable succès. L’occasion de réaffirmer, plus que jamais – et après un an et demi de crise – que les professionnels du chiffre sont des acteurs majeurs et vitaux pour l’économie française.

Plus de 4 500 professionnels avaient fait le déplacement à Bordeaux.
Plus de 4 500 professionnels avaient fait le déplacement à Bordeaux.

«Vous pouvez être fiers de ce que vous avez fait pendant la crise», leur a lancé le ministre de l’Économie Bruno Le Maire dans une vidéo très appréciée des professionnels. Même s’ils ne sont pas dupes des discours élogieux des politiques à leur égard, les experts-comptables ont réaffirmé leur rôle majeur pour l’économie française durant leur congrès national qui se tenait à Bordeaux du 6 au 8 octobre.
Placé sous le thème «essentiel» de la relance, le 76e congrès de la profession comptable, a été incontestablement une réussite tant au niveau de l’organisation que de la qualité des intervenants. Des personnalités aussi emblématiques que Michel-Édouard Leclerc, l’ancien ministre de l’Économie Michel Sapin ou encore Nicolas Sarkozy se sont succédés pour décliner leur vision de l’économie, les perspectives incertaines de ce monde et pour rappeler l’accompagnement indispensable des experts-comptables dans leurs missions.

Plus de 4 500 professionnels avaient fait le déplacement à Bordeaux quand 1 000 ont suivi le congrès en distanciel. «C’est le plus grand congrès que nous ayons organisé en province et celui qui a généré le plus gros chiffre d’affaires», a précisé le président du Conseil supérieur national de l’Ordre des Experts-Comptables (CSOEC) Lionel Canesi.

Préparer positivement le monde d’après

Prévention des difficultés des entreprises, défi numérique, développement durable et sociétal... Durant trois jours, les professionnels du chiffre, mais également des représentants du monde économique, ont pris part à des conférences d’actualité, des témoignages inattendus et des rendez-vous disruptifs pour amplifier la relance post-Covid et préparer positivement le monde d’après. Décliné sous un format hybride et interactif, l’événement fut un grand moment de réflexion, d’échanges et de partage organisé ainsi autour de plénières, d’ateliers solutions et d’animations innovantes.

Faire remonter les dysfonctionnements au gouvernement

Pour Lionel Canesi, l’objectif de ce congrès a été largement atteint : les professionnels ont parlé haut et fort à leur environnement, au monde économique et ont réaffirmé leur rôle majeur dans l’économie française plus que jamais. «On nous croyait bientôt détruits par l’ubérisation, cette crise a au contraire démontré toute notre utilité, a déclaré le président du CSOEC. Nous avons agi dans l’urgence pour sauver des entreprises, nous avons rassuré nombre d’hommes et de femmes». Le président a aussi rappelé le rôle qu’ont joué les experts-comptables pour faire remonter les dysfonctionnements au gouvernement de certaines mesures telles que le casse-tête des premiers fonds de solidarité.

«Ce qu’il faut retenir aussi, c’est que c’est le premier congrès où l’on n’a pas simplement parlé de nous mais l’on a parlé aussi et surtout de nos clients, les entreprises», souligne le président Canesi pour mieux affirmer le rôle aussi sociétal que psychologique des experts-comptables. Le congrès a ainsi été marqué par un échange plutôt fructueux, cordial et franc entre le président du CSOEC et son homologue président de la Compagnie nationale des Commissaires aux Comptes (CAC) Yannick Ollivier.

Dialogue avec les CAC

«Avec les CAC, on ne se marche pas dessus. Notre objectif reste d’augmenter le chiffre d’affaires global des professions», explique Lionel Canesi, lui-même également commissaire aux comptes. Tandis que Yannick Ollivier complète : «La loi PACTE a été un venin, le relèvement des seuils n’avait aucun sens et nous avons bien sûr perdu des mandats mais 2 ans après l’adoption de la loi PACTE, je peux dire que les chiffres d’affaires sont en légère croissance».

Pour mémoire, la profession de commissaire aux comptes a été mise à mal par le relèvement de ses seuils d’intervention, dont les effets sur l’activité commencent tout de même à se faire sentir. Yannick Ollivier souhaite que les missions des CAC évoluent pour répondre de façon plus pertinente aux besoins des entreprises et en particulier de celles pour qui le commissariat aux comptes est devenu facultatif. Ces évolutions s’articulent autour de propositions de la Compagnie nationale pour «renforcer le positionnement particulier de l’auditeur à la frontière du droit et de l’économie, qui garantit la confiance dans les informations communiquées par les entreprises et alerte sur les risques.»

En somme, cette loi PACTE a contraint les professionnels à clarifier leurs missions dans les TPE-PME. «Les CAC ne sont pas là pour faire du conseil», a lancé le président de la CNCC quand le président du CSOEC a rétorqué : «Le conseil c’est nous». Voilà qui éclaire sur les rôles distincts des experts-comptables et des CAC. Bref ces professionnels connaissent chacun des mutations irréversibles, opportunités pour se projeter dans l’économie de demain. Et l’économie d’aujourd’hui et de demain, c’est déjà le plan de relance pour lequel les experts-comptables prennent toute leur part.

«C’est le premier congrès où l’on n’a pas simplement parlé de nous mais l’on a parlé aussi et surtout de nos clients, les entreprises», souligne le président Canesi.

Pour une exonération des heures supplémentaires

Le congrès a été clôturé en présence d’Alain Griset, secrétaire d’État chargé des TPE-PME venu dérouler son plan pour les indépendants que le président Macron avait annoncé il y a quelques semaines. «Ce plan est un signe de reconnaissance que la Nation veut adresser aux entrepreneurs», a affirmé le ministre. A cet égard, Lionel Canesi a rappelé que plusieurs mesures de ce texte de loi ont été portées par le CSOEC, comme l'amortissement fiscal du fonds de commerce ou le statut unique de l'entrepreneur.

Les professionnels du chiffre ont d’ailleurs enfoncé le clou en remettant au ministre un livret blanc de nouvelles propositions pour relancer l’économie française, des pistes déclinées en 7 chapitres parmi lesquels : le financement des entreprises, la relance de la consommation, l’investissement, la liberté de choix du statut social et aussi l’exonération des heures supplémentaires… «Les mesures qui marchent sont simples et l’exonération des heures supplémentaires avait fonctionné», souligne Lionel Canesi.

Cette proposition sur les heures supplémentaires est aussi un moyen de pallier les difficultés structurelles de recrutement qui se posent plus que jamais dans divers secteurs de l’économie y compris chez les experts-comptables eux-mêmes. «Quand on travaille avec les économistes de Bercy, nous les économistes du quotidien, nous pouvons faire de grandes choses», s’est enthousiasmé le président du CSOEC considérant haut et fort les experts-comptables comme les «essentiels de l’économie». A noter enfin que le prochain congrès aura lieu à Paris en 2022.

Vincent Rousset, Echos Judiciaires Girondins, pour RésoHebdoEco - www.reso-hebdo-eco.com

Facture électronique : les experts en pointe

Le 15 septembre dernier, le ministre de l’Économie dévoilait un nouveau calendrier concernant l’obligation d’acceptation de la facture électronique : celle-ci a ainsi été décalée de 18 mois. Toutes les entreprises devront accepter la facture électronique au 1er juillet 2024 (au lieu du 1er janvier 2023). L'obligation d’émission de factures électroniques s'appliquent à compter du :

  • 1er juillet 2024 pour les grandes entreprises
  • 1er janvier 2025 pour les ETI
  • 1er janvier 2026 pour les petites et moyennes entreprises et les microentreprises.

Le non-respect de l'obligation d'émission d'une facture sous une forme électronique donnera lieu à l'application d'une amende de 15€ par facture. Le total des amendes est plafonné à 15 000€ par an. Pour le président national, le décalage de calendrier ne doit pas ralentir le mouvement de la profession. Comme il l’avait indiqué au congrès de l’ECF à Marseille, Lionel Canesi a ainsi exhorté les experts-comptables à s’approprier jefacture.com pour que la majorité des entreprises disposent de comptes sur cette plateforme dédiée à la facture électronique. C’est un enjeu stratégique de simplification de la vie des entreprises. «La facture électronique et notre utilité dans le dispositif participe du virage numérique que l’on doit prendre», a déclaré le président Canesi qui a d’ailleurs annoncé la création prochaine d’un Département DATA au sein du CSOE.