Canal: Rubio met en garde le Panama, Mulino ne voit pas de "menace réelle"

Le secrétaire d'Etat américain Marco Rubio a menacé dimanche le Panama de "mesures" en l'absence de "changements immédiats" sur le canal de Panama, mais le président Jose Raul Mulino a lui proposé des discussions "techniques" aux Etats-Unis et...

Schéma représentant les 15 pays qui utilisent le plus le canal de Panama, en fonction de la quantité de marchandises convoyées en 2024, d'après l'Autorité du canal de Panama © Jean-Michel CORNU
Schéma représentant les 15 pays qui utilisent le plus le canal de Panama, en fonction de la quantité de marchandises convoyées en 2024, d'après l'Autorité du canal de Panama © Jean-Michel CORNU

Le secrétaire d'Etat américain Marco Rubio a menacé dimanche le Panama de "mesures" en l'absence de "changements immédiats" sur le canal de Panama, mais le président Jose Raul Mulino a lui proposé des discussions "techniques" aux Etats-Unis et dit ne pas croire à une intervention militaire.

Pour sa première visite à l'étranger en tant que chef de la diplomatie américaine, M. Rubio a transmis au président du Panama la position du président américain Donald Trump sur la "violation du traité" régissant le canal du Panama, carrefour maritime stratégique pour le commerce mondial.

Dès le jour de son investiture, le 20 janvier, Donald Trump a dit vouloir en "reprendre" le contrôle pour contrer l'influence de la Chine.

Lors de son entretien avec le président Mulino, M. Rubio a déclaré que "la position actuelle d'influence et de contrôle du Parti communiste chinois sur la zone du canal de Panama constitue une menace pour le canal et représente une violation du traité concernant la neutralité permanente et le fonctionnement du canal de Panama", selon la porte-parole du département d'Etat, Tammy Bruce.

Aussi, M. Rubio "a clairement indiqué que ce statu quo était inacceptable et qu'en l'absence de changements immédiats, les Etats-Unis devraient prendre les mesures nécessaires pour protéger leurs droits en vertu du traité", a-t-elle ajouté.

Construit par les Etats-Unis et inauguré en 1914, le canal de Panama est passé sous contrôle panaméen fin 1999, en vertu de traités signés en 1977 par les présidents de l'époque, l'Américain Jimmy Carter et le Panaméen Omar Torrijos.

Pas de menace réelle

Au terme de la rencontre, le président panaméen a lui proposé des discussions au niveau "technique" avec les Etats-Unis pour répondre aux préoccupations de Donald Trump.

"Nous avons présenté la possibilité que nos équipes techniques" clarifient "tout ce qui doit l'être", a déclaré M. Mulino lors d'une conférence de presse.

Aucune date n'a encore été fixée pour de telles discussions, a-t-il précisé, affichant sa confiance quant à la suite des relations avec les Etats-Unis.

"Je crois que nous avons mené cette conversation de très bonne foi", a-t-il déclaré, soulignant que les bases pour une "meilleure relation" entre Panama et Washington avaient été jetées.

"Je n'ai pas l'impression qu'il y ait une menace réelle en ce moment contre le traité, la validité et encore moins l'utilisation de la force militaire pour prendre le contrôle du canal, je n'ai pas cette impression", a-t-il encore dit.

Le secrétaire d'Etat a ensuite visité le canal de Panama, voie maritime reliant les océans Atlantique et Pacifique, par laquelle transitent 40% du trafic de conteneurs américain.

Il s'est rendu au centre de contrôle des écluses de Miraflores, côté océan Pacifique, dans la ville de Panama, où il a été reçu par l'administrateur de la voie d'eau interocéanique, Ricaurte Vásquez.

Selon Washington, l'influence croissante de la Chine autour du canal menace les intérêts américains et pourrait permettre à Pékin de bloquer cette voie maritime stratégique en cas de conflit.

Colère dans la rue

Des manifestations, limitées mais intenses, ont éclaté avant la visite de M. Rubio. La police a fait usage de gaz lacrymogène.

Des manifestants ont brûlé une effigie de Marco Rubio, vêtu d'un costume aux couleurs américaines, et ont brandi des photos du secrétaire d'Etat et du président Trump devant un drapeau américain et un autre marqué d'une croix gammée.

"Rubio, pars du Panama!", scandaient quelque 200 manifestants. "Au messager de l'empire", a crié le syndicaliste Saul Medez en référence à Marco Rubio, "nous répétons que Trump n'a absolument rien à trouver ici. Le Panama est une nation libre et souveraine".

Premier secrétaire d'État hispanique et catholique pratiquant, M. Rubio avait commencé sa journée par une messe dans une église coloniale de la vieille ville.

Il poursuivra sa tournée par le Salvador, le Costa Rica, le Guatemala et la République dominicaine, où il doit promouvoir la politique migratoire de Donald Trump axée sur les expulsions.

Sur ce dernier point, le président panaméen a dit lui avoir proposé que les Etats-Unis se servent du Panama comme d'un pont pour expulser les migrants irréguliers vers d'autres pays d'Amérique latine.

"Je lui ai offert la zone de la piste d'atterrissage de Nicanor à Meteti, (province de) Darien, d'où serait effectué le rapatriement de personnes d'autres pays comme le Venezuela, la Colombie, l'Équateur, entre autres nationalités", a déclaré M. Mulino.

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