«Une reprise paisible mais qui nécessite des nerfs…»
Si la cession de SDN NV, dédiée au chauffage, sanitaire et décapage, s’est déroulée sans heurts, Olivier Cousin a dû batailler ferme avec l’administration. Une leçon à méditer : identifier les freins, anticiper les retards, prendre son mal en patience, mais revenir inlassablement à la charge.
La Gazette. Quels étaient votre formation et votre parcours avant cette reprise ?
Olivier Cousin. Je suis sorti d’une école de commerce de Lille pour entrer dans la carrière en 1991 et là j’ai démarré une longue période de nomadisme qui m’a amené à 47 ans à reprendre cette société croisienne. J’ai eu le bonheur de progresser à chaque nouveau changement de société et de passer en revue pratiquement tous les métiers qui font un chef d’entreprise. Je suis resté essentiellement dans le second œuvre dans le bâtiment et dans l’aspect commercial. Les bétons, les chassis, les fermetures, le carrelage… J’ai connu une dizaine de sociétés de tailles très diverses, ça allait d’un CA de 5 M€ à 32. J’ai été directeur commercial, des ventes, prescripteur en BE, au comité de direction, j’ai dirigé des réseaux de 30 commerciaux, etc. Et j’ai même effectué un passage en mairie d’Hazebrouck au service des marchés publics, une expérience très enrichissante. Donc, ce fut éclectique mais je me sentais armé pour reprendre une entreprise.
Quel a été le facteur déclenchant votre volonté de reprendre une entreprise ?
Surtout l’envie de voler de mes propres ailes, d’être vraiment indépendant et de réaliser quelque chose de constructif juste par moi-même. La création ne m’attirait pas. A 47 ans, on ne va pas bâtir à partir de rien, c’est trop lourd et incertain : autant s’appuyer sur de l’existant. J’ai commencé par une expérience malheureuse qui a duré un an à La Chapelle-d’Armentières. Au dernier moment, la signature ne s’est pas faite. Mais, finalement, le réseau que j’avais activé pour m’aider à reprendre s’est révélé efficace et mon expert-comptable, qui m’avait déjà assisté dans ce dossier avorté, m’a rappelé pour m’indiquer cette société croisienne, SDN NV. Donc, l’important est d’abord de bien s’entourer et ensuite d’avoir un petit coup de pouce du destin pour tomber sur le bon numéro…
Quels ont été les facteurs prépondérants dans le choix de cette entreprise ?
Elle correspondait exactement à ce que je cherchais. A savoir une PME d’une dizaine de collaborateurs − 9 ici −, sur un marché Grand-Nord et Paris, dans le second œuvre du bâtiment, de bonne réputation, avec un cédant qui partait pour une raison claire et de préférence la retraite (c’était le cas), avec une activité de production et de service ainsi qu’un fort volant commercial. Enfin, une société qui avait des arguments pour assurer un développement multiple. Le cédant, Régis Lepoutre, m’accompagnant un an, tout était en place pour une signature rapide puisque la transparence la plus totale a présidé aux échanges préliminaires. Cette entreprise connaissait un léger tassement de son CA dû à la crise − 1,1 M − et surtout à une baisse de la commande, mais rien de grave. On sentait que la clientèle était fidélisée et que la qualité des produits et de la pose compensaient une certaine morosité du marché en volume.
Combien de temps a duré la transmission ?
Cinq mois. J’ai eu le premier contact avec Régis en octobre 2013 et on a signé en février 2014. Le premier entretien a duré 2 heures et a été déterminant. Nous étions exactement sur la même longueur d’onde, je suis parti avec une plaquette et on s’est revus tous les 15 jours. Je n’ai pas encore rencontré le personnel qui n’est pas au complet. A l’époque il ignorait la cession mais cela n’a pas posé de problème puisque le départ de Régis n’était causé que par la retraite.
Quels ont été vos partenaires durant cette transmission ?
Les CCI d’Armentières et de Lille, Nord Entreprendre dont j’étais lauréat, un prêt Initiatives Métropole, mon expert-comptable, un avocat et un notaire, deux associations de développement, le Crédit du Nord, un conseiller DPH finance, M. Dingreville, le groupe Total et ma famille.
Sur quels critères avez-vous estimé la valorisation de l’entreprise ?
Le stock, le carnet de commandes, la qualité des salariés et l’esprit d’équipe et la notoriété.
Au final, comment avez-vous trouvé l’entreprise reprise ? Avez-vous été surpris par certains points ?
Tout est allé tellement vite. Je n’avais jamais entendu parler de SDN NV avant, donc aucune surprise n’est advenue sauf l’absence imprévue d’un salarié… L’activité de cette société était intelligemment répartie entre trois secteurs : la pose de chauffage pour le marché public et le commerce, la vente de matériel de chauffage roulant également pour le public, et le décapage bois pour le particulier, l’antiquaire, l’architecte, etc. On est donc clairement dans le B to B. Sur un marché bien équilibré entre Paris et les neuf départements du nord de la France. Créée en 1980, SDN NV s’est fait une excellente réputation fondée sur la qualité tous azimuts et une très bonne connaissance du milieu industriel avec une valeur ajoutée, le conseil au client. Son activité principale était en fait la fourniture et la pose de chauffage et sanitaires, mais le reste permettait de diversifier, utile en temps de crise… Les dernières années étaient un peu dures et sans doute la société avait-elle besoin d’un turn-over de dirigeants. La clientèle comportait de grosses entreprises, des enseignes importantes mais sans gros chantiers, il y avait de la concession auto, des réseaux incendie et de l’air comprimé, le CA pouvait être amélioré mais il restait sain.
Y a-t-il eu des moments difficiles et heureux dans la transmission ?
Heureux : la signature. Difficiles : oui. Surtout en raison du silence des banques et des tracasseries administratives. Il faut les relancer en permanence, on est seul, on ne sait rien, c’est extrêmement stressant, il faut absolument modifier cela…
Quels sont les projets pour SDN NV ?
Porter le CA à 1,4 M€ en un an et assurer la pérennité d’ici les vingt prochaines années. Etablir un tableau de bord financier quotidien d’absolument tout, revoir à fond l’informatique avec un nouveau programme de facturation et le suivi des règlements clients, le suivi des chantiers et la recherche de la rentabilité, notamment dans les transports. Densifier et étoffer le commercial vers les architectes et les BE. Et faire connaître le décapage via Internet. Il existe une clientèle sommeillante à réveiller, par exemple les écoles et le bâtiment public. J’ai un carnet de commandes à trois mois et des commandes à terminer, ma stratégie est géographiquement celle de l’escargot. Mais le gros chantier sera de promouvoir la climatisation développement durable et le négoce de produits étrangers dans la fermeture.
Trois conseils à donner ?
Bien définir sa cible, bien s’entourer, être patient, perspicace, avoir le moral et être efficace.