«Les industries sont les poumons économiques des villes moyennes»

«Croire en l'industrie du futur et au futur de l'industrie !», c’est ce thème qu’Olivier Lluansi, invité à l'Université d’automne de l’agence de développement économique SOFIE, a développé fin novembre. Cet associé chez EY, également membre de l’équipe missionnée par le Premier ministre pour détecter les territoires d’industrie, s’est exprimé à la Cité scolaire des Flandres devant les ambassadeurs du territoire.

(De gauche à droite) Olivier Lluansi, accompagné par trois ambassadeurs du territoire : Christophe Cathelain (groupe Canopee à Bavinchove), Jean-Pierre Carlu (Industeam à Leulinghem) et Jean-François Toubeaux (Delecroix Constructions à Blaringhem).
(De gauche à droite) Olivier Lluansi, accompagné par trois ambassadeurs du territoire : Christophe Cathelain (groupe Canopee à Bavinchove), Jean-Pierre Carlu (Industeam à Leulinghem) et Jean-François Toubeaux (Delecroix Constructions à Blaringhem).

La Gazette : Quel regard portez-vous sur l’industrie en région aujourd’hui ?

Olivier Lluansi : Le sujet du futur de l’industrie et de l’industrie du futur est au cœur de mon métier de tous les jours. Si vous voulez, on s’est rendu compte que les grandes entreprises pouvaient être accompagnées par des experts ou des cabinets de conseil. C’est plus difficile pour les petites et moyennes industries qui font quand même le gros de l’emploi industriel de notre pays. À partir de là, on s’est demandé comment accompagner cette transformation, et on s’est rendu compte qu’il y avait une dimension de proximité qui était clé.

C’est-à-dire ?

Les chefs d’entreprise se sentent à l’aise dans un tissu de proximité, sur un territoire dans lequel ils sont inséré. Ils connaissent leurs élus, etc. Une réflexion a été menée, reprise ensuite par le Premier ministre, sur ce qu’est un territoire d’industrie, c’est-à-dire un territoire qui se donne pour ambition de développer l’industrie comme moteur de son économie. Derrière, il s’agit de voir comment on peut accompagner ces territoires dans leurs projets. Dans le cadre du développement de l’industrie ou de son redéploiement, alors que la France a subi une phase de désindustrialisation dès 1975, on se rend bien compte, là, qu’il y a une transformation qui est en train de se dérouler. L’industrie profite de la vague du digital si on veut résumer le phénomène de manière assez simpliste, mais très éclairante. La question, c’est comment certains territoires concernés, et celui-ci notamment, peuvent se structurer pour permettre à leur tissu industriel de prendre cette vague et d’en profiter.

«Si on veut vivre sans fracture territoriale, il faut continuer à développer l’industrie»

Les Hauts-de-France ont d’ailleurs un passé industriel, une histoire…

Oui ! Le Nord – Pas-de-Calais, dorénavant les Hauts-de-France, a été un grand territoire industriel, et la désindustrialisation l’a touché de plein fouet, c’est la première chose. Maintenant, le président de la Région, Xavier Bertrand, est très investi sur ce sujet. En France, on a vécu ces dernières années dans le rêve d’une économie de l’intelligence, des services. On a été très loin dans cette logique. Il y a un autre pays en Europe qui a été aussi loin : le Royaume-Uni, qui a misé beaucoup sur les services financiers par exemple, avec la City.

Du coup, que préconisez-vous ?

En ce moment, l’industrie en France représente 10 % de la population active. Si on veut vivre sans fracture territoriale, il faut continuer à développer ou relancer l’industrie. Et comme les usines ne peuvent plus s’implanter autour des grandes villes pour plein de raisons, comme le coût du foncier ou celui de la logistique, où peuvent-elles exister ? Dans les villes moyennes ! Les industries sont les poumons économiques des villes moyennes. Si on veut vivre dans un territoire en harmonie, il est indispensable d’avoir une industrie puissante. Ce n’est pas la seule raison. Cette industrie puissante permettra aussi une balance commerciale positive et une souveraineté technologique. Ça fait au moins trois bonnes raisons. Et si on s’arrête juste sur la première, cela aidera à lutter contre la désespérance économique. C’est essentiel. Ce n’est pas simplement économique, c’est aussi social.