«Devenir un catalyseur d’innovation à vocation mondiale»
Le pôle i-Trans ambitionne de porter des projets innovants à vocation mondiale dans la conception, l’exploitation et la maintenance de systèmes de transports durables. Entretien avec Paul Terrien, DG d’i-Trans, qui revient sur la feuille de route stratégique 3.0 concernant l’activité ferroviaire.
La Gazette. Quelle est la mission initiale du pôle i-Trans ?
Paul Terrien. Ce pôle, créé en 2005, porté par l’association Transports terrestres promotion et son directeur Jean-Marie Delbecq, a pour mission initiale de rassembler des industriels, des laboratoires de recherche et des organismes d’enseignement supérieur afin de soutenir un projet d’innovation et de recherches collaboratives. L’objectif du pôle, ancré dans le Nord-Pas-de-Calais et en Picardie, est de devenir un catalyseur d’innovation à vocation mondiale. En effet, le rapprochement des industries et des laboratoires de recherche n’était pas spontané, en France, avant sa création. En outre, une dizaine de pôles liés aux transports existent dans l’Hexagone, mais i-Trans est reconnu comme étant le principal au niveau national. Cependant, je tiens à souligner que les pôles ne sont pas tous regroupés par secteur et qu’un pôle informatique peut tout aussi bien intéresser l’activité ferroviaire. Les compétences et les innovations sont donc dispersées.
Quelles sont les grandes lignes de la feuille de route 3.0 ?
Cette troisième feuille de route sera finalisée en juin. Nous avons étudié le contexte global du monde ferroviaire et constaté que les priorités ont changé par rapport aux deux feuilles de route précédentes. Nous avons conservé les trois axes de progrès de la feuille de route 2.0, avec des évolutions à la marge. Il s’agit d’appuyer l’intégration environnementale (optimiser le bruit, réduire l’empreinte carbone, réfléchir à l’aspect écodesign et à la destruction), d’optimiser la qualité et la sécurité des transports mais surtout son attractivité, et enfin de soutenir la compétitivité des laboratoires et des organismes supérieurs, en plus de celle des industries. Mais l’efficacité énergétique en général est le point essentiel. Il faut réfléchir sur les transports de demain pour les voyageurs et les marchandises, sur les différentes solutions co-modales, les nouveaux matériaux composites, les nouveaux services. Pour cela, nous avons comme objectif particulier de nous appuyer sur les sciences humaines et sociales et d’introduire des professionnels, autres que des scientifiques, dans les projets. Ils pourront apporter une analyse sur les comportements des usagers, la résistance aux changements, voire même l’économie des transports… Il faut aujourd’hui être créatif et trouver des solutions organisationnelles. Pour synthétiser, les enjeux identifiés du ferroviaire sont des transports plus économes en énergie, plus respectueux de l’environnement, plus séduisants pour les usagers, moins coûteux, plus sécuritaires, plus disponibles et plus efficients. Il faut renforcer les capacités de R&D sur le territoire et animer l’écosystème par le biais d’un véritable accompagnement. Enfin, nous désirons collaborer avec d’autres clusters.
A ce propos, lors du salon SIFER, avez-vous concrétisé une nouvelle collaboration ?
Oui, nous avons signé le 27 mars dernier une intention de collaboration avec l’association MECATEAMCLUSTER, représentée par Didier Staimesse, son président. Ce cluster est positionné sur la conception, la fabrication et l’exploitation d’engins intervenant dans la réalisation et la maintenance d’infrastructures ferroviaires. Nous avons décidé de mobiliser nos compétences respectives et nos spécialités au vu d’un constat simple, celui d’un secteur qui est de plus en plus confronté à des enjeux économiques et financiers, à de grandes évolutions et à une forte concurrence.
Quelle place tient la formation au cœur d’i-Trans?
i-Trans est l’un des pôles qui a le plus travaillé sur la formation supérieure. Depuis 2005, le pôle a labellisé 19 programmes de formation. A la base, un comité de formation identifie les besoins en termes de métiers de demain et de programmes de formations à établir. A chaque organisme ensuite de se saisir de l’expression de ces besoins pour proposer des programmes adaptés et faire labelliser ses projets par i-Trans. Le pôle est collaborateur, pas financeur. i-Trans encourage les projets de formation au niveau national et aide à obtenir les financements. Par ailleurs, un Institut des hautes études ferroviaires doit être monté dans le cadre de Railenium.
Quels sont les programmes qui permettent au pôle d’avoir aujourd’hui une portée régionale et européenne ?
Avant toute chose, il faut savoir que le pôle confirme son statut dans la catégorie des «vingt pôles très performants» et salue sa montée en puissance. Le pôle peut stimuler l’émergence de projets mais ne participe pas à leur élaboration en tant que partenaire. C’est principalement l’association Transports terrestres promotion qui prend en main trois grands programmes qui contribuent au succès d’i-Trans. C’est par exemple le cas du programme Norm@Fret qui comporte deux missions : celle de représenter la France dans les instances de normalisation des échanges de données informatiques en matière de transport de fret et celle de diffuser les nouvelles normes auprès des PME. C’est un programme national mais plus de dix partenaires locaux le suivent et contribuent à son financement. En décembre 2010, la plate-forme d’innovation i-Fret a été créée à Dunkerque en vue de compléter l’action d’i-Trans. Elle doit accompagner certains projets collaboratifs en termes de fret multimodal, apparaître dans des plans européens et appuyer la représentation des compétences des territoires Nord-Pas-de-Calais et Picardie. Aussi, elle constitue actuellement un observatoire de transports massifiés, très demandé par les différents acteurs du domaine ferroviaire. Enfin, un pôle d’excellence ferroviaire a vu le jour en décembre dernier, impulsé par l’Etat et la Région. Ce programme coordonne tous les acteurs (industriels, exploitants, collectivités, partenaires sociaux….) afin de les tirer vers le haut et vise aussi à étendre une communication sur le secteur du ferroviaire vers un public plus large. Enfin, il pour but d’animer le comité stratégique régional de la filière qui se réunit une fois par an.
Et les programmes nationaux ?
Il y a deux grands projets annoncés au niveau européen et national, dont l’un est de rassembler des constructeurs, des industriels et des exploitants pour être des interlocuteurs de la Commission européenne et obtenir des cofinancements pour le développement de nouvelles technologies. Nous le suivons car nous devons être complémentaires pour aller chercher des PME innovantes qui seraient intéressées pour y participer à leur niveau.
i-Trans en chiffres
− 400 entreprises et industriels
− 165 projets labellisés, dont 94 projets d’innovation et 57 projets de recherche, pour un montant global de de 367 millions d’euros
− 13 projets structurants pour un budget global de plus de 630 millions d’euros
− 1 800 chercheurs issus de 33 laboratoires
− 15 organismes de formation