Boom des besoins de main-d’œuvre annoncés par les entreprises
Les entreprises annoncent des besoins en main-d’œuvre en forte croissance, d’après l’enquête annuelle de Pôle emploi. Les PME sont particulièrement concernées, mais elles se heurtent à des difficultés de recrutement.
En 2017, les entreprises annoncent des intentions d’embauche en forte augmentation par rapport à l’an dernier. Ce 19 avril à Paris, Pôle emploi présentait son enquête BMO 2017 sur les besoins en main-d’œuvre des entreprises. L’étude, réalisée avec le Crédoc (Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie) depuis 2012 auprès de 2,3 millions d’établissements, décrit les besoins de main-d’œuvre déclarés par les entreprises et leurs difficultés de recrutement, détaillés par métier, secteur d’activité, type d’entreprise et bassin d’emploi.
“Cette année, nous avons une hausse des projets de recrutement très importante”, démarre Stéphane Ducatez, directeur des statistiques, des études et de l’évaluation chez Pôle emploi. Au total, les entreprises ont déclaré près de 149 000 projets de recrutement de plus que l’an dernier, soit une progression de 8,2%. Avec près de deux millions d’intentions d’embauche, il s’agit d’un “niveau record”, commente Stéphane Ducatez. Un record qui repose sur l’augmentation du nombre d’entreprises qui veulent embaucher : sur le plus long terme, 17,7% des entreprises envisageaient de recruter en 2002, contre 22,4% cette année. Et les motivations également ont évolué : dans près de la moitié des cas, il s’agit de faire face à un surcroît d’activité et dans 15,6%, de développer une nouvelle activité. Ces motivations sont croissantes, alors que celles liées à un remplacement définitif d’un salarié (22,5% des cas) ou temporaire (12,4%) sont en diminution. Par ailleurs, près de 58% des projets d’embauche annoncés par les entreprises concernent des emplois durables, contrats à durée déterminée ou contrats de plus de six mois, une proportion en légère hausse par rapport à l’an dernier. Prudence toutefois : statistiquement, les années précédentes, les intentions d’embauche des entreprises ne se sont pas traduites par des augmentations nettes de l’emploi dans les mois qui ont suivi, précise Pôle emploi.
Des projets plus nombreux chez les PME. Spécificité, cette année, “ces intentions émanent principalement de petites entreprises. Les demandeurs d’emploi n’ont pas forcé- ment le réflexe de prospecter ces entreprises”, poursuit Stéphane Ducatez. Du fait de leur poids dans l’économie, les établissements de moins de dix salariés représentent 46% des embauches potentielles de 2017. En particulier, les sociétés qui comptent entre un et quatre salariés sont celles qui voient leurs intentions d’embauche progresser le plus (13,9%), pour atteindre 387 300 projets. Pour autant, plus les entreprises sont grandes, plus elles déclarent vouloir embaucher : près des trois quarts des entreprises de plus de 200 salariés annoncent ce type de projets, alors que pour les sociétés sous le seuil des cinquante salariés, cette proportion chute à moins de la moitié. Les entreprises entre cinq et dix salariés sont moins du quart à vouloir embaucher, une proportion qui descend encore chez celles employant de un à quatre salariés (14,8%), pour remonter ensuite à 27,4% pour les entreprises qui ne comptent aucun salarié.
Autre tendance, “on a une hausse des intentions d’embauche dans tous les secteurs d’activité”, annonce Stéphane Ducatez. Les besoins de main-d’œuvre annoncés dans les services, qui représentent 64% du total, ont progressé de 7%, portés par une croissance particulièrement vive dans les services aux entreprises. Mais les pics d’intentions d’embauche se concentrent dans la construction (22,5%), le commerce (10,2%) et l’industrie manufacturière (9,6%). Certains sous-secteurs spécifiques connaissent une augmentation encore plus importante de leurs projets de recrutement, à l’image de l’hôtellerie-restauration (34,9%), du secteur sanitaire et social (27,3%), des activités informatiques (25,8%), de la fabrication de matériel de transport (40,9%) ou encore de la filière chimie-pharmacie (34,6%).
La métropolisation de l’emploi se confirme. En revanche, si l’ensemble des secteurs, bien que de manière inégale, bénéficie d’intentions d’embauche, ces dernières ne sont pas également réparties sur le territoire : “les intentions d’embauche se situent d’abord dans les grandes métropoles et dans les zones touristiques”, synthétise Stéphane Ducatez. A elle seule, l’Ile-de-France concentre 17,5% des projets, suivie d’Auvergne-Rhône-Alpe s (12,9%), Provence-Alpes-Côte d’Azur (10,9%) et Hauts-de-France (6,8%). Parmi les zones qui concentrent le moins de projets d’embauche figurent le Centre-Val de Loire et la Normandie (3,7%). Pour autant, en métropole, cette dernière région est en tête des zones les plus dynamiques en ce qui concerne l’augmentation du nombre de projets depuis l’an dernier, avec un taux de 28,1%. Elle est suivie de Provence-Alpes-Côte d’Azur (12,5%) et Bourgogne-Franche-Comté (11,5%).
En corrélation avec ce boom des intentions d’embauche, l’étude de Pôle emploi pointe également une très nette augmentation des difficultés de recrutement : 37,5% de ces projets sont jugés difficiles à mettre en œuvre par les entreprises, contre 32,5% l’an dernier, soit une hausse de 5%. En particulier, ces difficultés “sont plus nombreuses chez les petites entreprises qui ne disposent pas de service RH [ressources humaines] et dont les chefs d’entreprise n’ont pas forcément d’expérience dans ce domaine”, souligne Stéphane Ducatez. Quand, dans les entreprises de plus de deux cents salariés, 28,5% des projets sont jugés difficiles, ce taux grimpe à 40% dans les entreprises employant entre un et cinquante salariés qui déclarent rencontrer des difficultés, et à 44,6% dans celles de cinq à dix salariés. Les soucis peuvent être de nature diverse : “les employeurs mettent en avant les candidatures”, explique Stéphane Ducatez. Cela peut aller de l’inadéquation des profils – manque d’expérience, de diplôme ou de motivation (dans 81,3% des cas) – à la pénurie de candidats. Mais nombre d’entreprises évoquent également des difficultés liées au manque d’attractivité du poste, à sa pénibilité ou à la rémunération proposée, ainsi qu’à l’image du secteur.