Gazettescope
Bienvenue en «tracances»...
Traiter quelques courriels, faire une visio… de sa terrasse, de son lieu de villégiature, cela n’a plus rien d’extraordinaire. Dans notre époque ultra connectée en tout lieu et en toute circonstance, le travail à distance a de beaux jours devant lui. Quelles sont ses limites ? Comment conserver une frontière, de plus en plus poreuse, entre sphère professionnelle et privée… et sa santé ? La Gazettescope s’est penchée sur ce sujet «des temps nouveaux».
Depuis la Covid-19, un nombre croissant de salariés français pratiquent les «tracances» (la contraction des mots «travail» et «vacances»). Selon une récente étude de l’entreprise de coworking IWG, 31 % des collaborateurs d’entreprise sondés prévoyaient d’anticiper ou de prolonger leur séjour sur leur lieu de vacances avec du travail hybride durant cet été. Une proportion qui atteignait 54 % chez les 18-24 ans et 45 % chez les 25-34 ans. Quant à la stratégie managériale des entreprises sur ce phénomène qui prend de l’ampleur, elle varie d’une structure à une autre. Si certaines autorisent à présent «les tractances», certaines tiennent à les limiter, quand d’autres jouent à fond cette nouvelle carte de la flexibilité, en offrant la possibilité de «tractances» XXL, soit un travail à distance, devenu quasiment une norme dans leur organisation.
La logique même du travail à distance
Reste à trouver la bonne adéquation entre les besoins de l’employeur et les aspirations des salariés. Un faisceau d’enquêtes internationales et hexagonales tente d’analyser ce changement de paradigme du «monde d’après» dans l’organisation du travail. Car, c’est bien ce dernier qui est au centre des interrogations, sur le fond et dans la forme. Un récent libre blanc émanant de chercheurs américains indiquait que, progrès technologique aidant, le travail à domicile avait augmenté régulièrement depuis les années 1960 et qu’il allait aller crescendo durant les années à venir. La crise sanitaire n’aurait été finalement qu’un accélérateur. Le désir de travailler davantage à distance est particulièrement prononcée dans les pays anglophones. Des employés de ces pays, comme d’ailleurs en Argentine, en Turquie, au Canada, aux États-Unis souhaitent passer plus de la moitié de leur semaine de travail à domicile. En France, des enquêtes révèlent que les souhaits des salariés les portent vers deux jours de télétravail en moyenne par semaine. Tout cela aurait des vertus écologiques. CQFD.
Quelle vie ?
Derrière le sujet du travail à domicile viennent immédiatement des questions : quid de la productivité ? De la préservation de l’équilibre entre vie professionnelle et personnelle ? Également, entre le collaborateur qui va prendre son temps de télétravail comme «une grande plage de repos» et celui «qui alourdit sa charge de travail et multiplient les heures devant son écran», il y a là un océan d'approche, d'investissement, de motivation. Car une autre réalité est à prendre en compte. Selon une étude sur la diffusion des équipements numériques et l’évolution des usages parue l’an passé, les Français regardent en moyenne un écran durant 32 heures par semaine, soit près d’un cinquième du temps hebdomadaire et un peu moins d’un tiers du temps éveillé. Pour naviguer sur internet, pour envoyer des messages, 87 % de la population en France déclare posséder un smartphone (95 % un téléviseur). Dans ce contexte, quelle place pour la nécessaire déconnexion, essentielle ? Il y a là à faire beaucoup de pédagogie, pas seulement chez les jeunes générations. C’est là une réelle question de santé publique. Assurément, l’éducation à la connexion a encore beaucoup de chemin à faire… «Ralentir», «prendre le temps», «se poser», «s'attarder». On a l'impression et ce sentiment que ces termes semblent appartenir à une autre époque... Etrange époque... que la nôtre, de plus en plus en mode virtuel...