Bangladesh: heurts entre la police et des ouvriers du textile réclamant des hausses de salaire

De nouveaux heurts ont éclaté mardi au Bangladesh entre la police et des milliers d'ouvriers réclamant des hausses de salaires dans l'industrie textile qui fournit de grandes marques occidentales, au lendemain de manifestations...

Des dégâts à Gazipur, au Bangladesh, en marge de manifestations de travailleurs du secteur du textile pour demander des hausses de salaires, le 31 octobre 2023 © Munir uz zaman
Des dégâts à Gazipur, au Bangladesh, en marge de manifestations de travailleurs du secteur du textile pour demander des hausses de salaires, le 31 octobre 2023 © Munir uz zaman

De nouveaux heurts ont éclaté mardi au Bangladesh entre la police et des milliers d'ouvriers réclamant des hausses de salaires dans l'industrie textile qui fournit de grandes marques occidentales, au lendemain de manifestations ayant fait au moins deux morts. 

"Les ouvriers sont descendus dans la rue car leurs salaires ne peuvent plus couvrir la hausse des dépenses alimentaires", a déclaré à l'AFP Al Kamran, un haut responsable syndical du secteur textile à Ashulia (centre). 

Selon la police, des dizaines de milliers d'ouvriers travaillant dans des dizaines d'usines ont lancé des grèves sauvages à Ashulia et Gazipur, la principale ville industrielle du pays. 

"Quelque 15.000 ouvriers ont participé à des manifestations en faveur d'une augmentation des salaires à différents endroits d'Ashulia", a déclaré à l'AFP Mahmud Naser, chef adjoint de la police de la zone industrielle de cette ville.

Un chiffre contesté par le dirigeant syndical Al Kamran selon lequel quelque 50.000 ouvriers ont cessé le travail dans la seule zone d'Ashulia. 

Selon le responsable policier, les manifestants ont incendié mardi des pneus, vandalisé des usines en brisant des fenêtres et bloqué une autoroute importante reliant la zone industrielle à la capitale Dacca, incitant les forces de l'ordre à faire usage "de gaz lacrymogènes et à tirer des balles en caoutchouc". Aucun blessé n'a été signalé, selon lui.

Toujours selon la police, des milliers d'ouvriers ont aussi abandonné leur poste et vandalisé plusieurs usines à Mouchak et Bhograr More à Gazipur, où se trouvent plus d'un millier d'usines qui fabriquent des vêtements pour des marques telles que Adidas, H&M et Gap. 

Le Bangladesh est l'un des plus grands exportateurs de vêtements au monde, l'industrie représentant 85% des 55 milliards de dollars d'exportations annuelles de ce pays d'Asie du Sud. 

70 euros par mois

Selon les syndicats, les conditions de salaires et de travail sont désastreuses pour une grande part des quatre millions de travailleurs du secteur.

La flambée des prix des denrées alimentaires est l'une des principales raisons à ce mouvement, certains produits alimentaires de base ayant vu leur prix doubler par rapport à l'année dernière.

"Aujourd'hui, le kilo de pommes de terre se vend 70 takas (0,59 euro, ndlr) et un kilo d'oignons vaut 130 takas", contre respectivement 30 et 50 à 60 takas l'an dernier, a précisé Al Kamran. 

"Les loyers ont également augmenté. La seule chose qui n'a pas augmenté, c'est le salaire", a-t-il ajouté.

De grandes marques, dont Adidas, Hugo Boss, Levi Strauss et Puma, ont écrit au début du mois à la Première ministre Sheikh Hasina, ayant "remarqué" que les salaires nets mensuels moyens n'avaient "pas été ajustés depuis 2019 alors que l'inflation a considérablement augmenté au cours de cette période". 

Les marques ont ajouté qu'elles continuaient "de recommander que le gouvernement du Bangladesh adopte un mécanisme de révision annuelle du salaire minimum pour suivre l'évolution des facteurs macroéconomiques".

Selon Taslima Akter, présidente du syndicat Garment Sramik Samhati, la rémunération actuelle est "inférieure à celle qu'un ouvrier percevait en 2017", une fois prise en compte l'inflation et la dépréciation monétaire.

Aujourd'hui, le salaire mensuel minimum des ouvriers n'excède pas les 8.300 takas (70 euros).

Selon les syndicats, la colère des ouvriers a explosé quand la puissante association des fabricants a proposé une augmentation de 25%, ignorant leur demande d'un salaire mensuel minimum à 23.000 takas (190 euros), soit près de trois fois plus.

Les manifestations ont commencé au début de la semaine dernière, mais la contestation a tourné à la violence lundi avec le débrayage de dizaines de milliers d'ouvriers à Gazipur où une usine de six étages a été incendiée, entraînant la mort d'un ouvrier. 

Au moins un deuxième ouvrier a été tué, mortellement blessé dans des heurts entre la police et les manifestants et décédé alors qu'il était transporté à l'hôpital.

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