Axyntis en passe de réussir son pari
C'est une histoire industrielle locale qui ne finit pas trop mal. Après un conflit social né de la dégradation des affaires de Calaire chimie ces trois dernières années, le site, qui jouxte le canal de Calais, a été repris par le groupe Axyntis, déjà présent sur un autre site industriel de Calais, zone des Dunes. Rencontre avec son PDG, David Simmonet.
C’est le premier groupe de chimie fine indépendant de France. «Je crois que l’industrie a un réel avenir en France, sur des secteurs stratégiques comme le médicament dont nous fabriquons les matières actives», explique le dirigeant du groupe. Le 1er novembre 2013, Calaire chimie (Groupe Tessenderlo) était repris par Axyntis au terme de plusieurs mois agités : grèves, occupation d’usine, manifestations à l’aube des élections municipales… L’ambiance locale tournait autour du piquet de grève permanent des 191 salariés du site. «On a remis en état, procédé à des vérifications de sécurité sur les équipements ; l’incinérateur a redémarré en décembre 2013. On a repris des savoir-faire et sauvé le site − dont on garde le nom − d’une fermeture aux conséquences en cascades. Un pays peut-il laisser ses capacités industrielles stratégiques fermer ?», interroge David Simmonet. Son plan d’affaires prévoit le transfert de six produits devant générer de l’activité sur le site. Pour l’instant, seul un nouveau marché (une molécule pour un groupe américain) est venu renforcer le site. «Calais perdait 1 million d’euros par mois. Aujourd’hui, le site est à l’équilibre sans toucher aux primes : on a augmenté nos prix et revu tous les coûts d’exploitation.» Mais pour cela il a fallu se séparer de 111 personnes. «Notre plan prévoit des réembauches d’ici 2016. L’objectif est de revenir au 5×8. Aujourd’hui on est en 3×8. On doit trouver 15 millions d’euros d’activité supplémentaire», répond David Simmonet. Si Calaire était surdimensionné, le site industriel détient de vrais spécificités avec son incinérateur Usineco qui réduit fortement le coût de la gestion des déchets, et qui en accueille d’autres déchets venant d’autres groupes, devenant ainsi une source de revenus. Outre cet aspect, Axyntis a trouvé à Calais 12 ateliers, dont l’un bénéficie de l’autorisation de fabriquer des amphétamines.
Des disponibilités productrices et diversifiées. «Il y a cinq sites au monde qui sont habilités à fabriquer des amphétamines. C’est rare», indique David Simmonet. Les clients du groupe sont tous passés par la visite du site depuis un an. Le carnet d’adresses d’Axyntis − qui exporte pour moitié ses productions − doit bénéficier au site : Fuji Film souhaite investir ses nouvelles capacités productives. Les clients allemands, japonais et américains sont venus jeter un œil. Pour sauver Calaire, Axyntis a repris ses actifs, 80 salariés, et apporté «entre 4 et 5 millions de besoin en fonds de roulement», rappelle David Simmonet. La reprise aura également été financée par l’apport d’un million d’euros (via la bpi) pour un crédit impôt recherche en 2013 et 2014. Chez les anciens salariés défendus par Virginie Quenez, conseillère municipale PCF, un recours sur les licenciements est prévu en janvier prochain. «Dans cette histoire, on a appris qu’on ne faisait pas une reprise avec un élu. Mais pas contre non plus. Pour nous, il y a trois échelons : Mairie, Région et Etat. On ne conditionne pas notre intérêt par des subventions et je tiens à saluer la présence tout au long du dossier de la sénatrice-maire Natacha Bouchart (UMP)» souligne-t-elle. Le million d’euros promis par la Ville n’est pourtant pas arrivé. Mais la réussite du projet n’en aura pas dépendu.