Automobile: Le Maire tente de rassurer le secteur face à sa "révolution" électrique

"L'Etat ne va pas vous laisser tout seuls!": le ministre de l'Économie Bruno Le Maire a tenté mardi de répondre aux inquiétudes de la filière automobile réunie à Paris, face...

Le ministre de l'Economie Bruno Le Maire, le 16 octobre 2023 à Paris © Miguel MEDINA
Le ministre de l'Economie Bruno Le Maire, le 16 octobre 2023 à Paris © Miguel MEDINA

"L'Etat ne va pas vous laisser tout seuls!": le ministre de l'Économie Bruno Le Maire a tenté mardi de répondre aux inquiétudes de la filière automobile réunie à Paris, face à la "révolution" du tout électrique.  

Devant un parterre de dirigeants, constructeurs et équipementiers réunis pour la troisième édition de la Journée de la Filière auto au Carrousel du Louvre à Paris, le ministre a promis "d'accompagner la filière" face à la nécessité de "passer en quelques années du siècle thermique au siècle électrique". 

"Le rôle de l’État est d'être à vos côtés", a-t-il martelé, avant de rappeler son investissement financier: 1,5 milliard d'euros par an à partir de 2024 (contre 1,3 milliard l'année précédente) consacrés à l'électrification du parc, qui financeront bonus électriques, primes à la conversion, leasing social, etc.   

Il a insisté sur les dispositifs étatiques qui permettront selon lui de conjuguer passage à l'électrique, réindustrialisation française et souveraineté économique: "Au 1er janvier 2024, toute la production de batteries électriques en France pourra bénéficier d'un crédit d'impôt", a-t-il promis, pour contrer une fabrication actuellement dominée par des groupes asiatiques.  

Ces crédits d'impôts, promulgués mardi au Journal officiel dans le cadre de la nouvelle Loi Industrie verte, constituent aussi une contre-attaque face aux mesures prises par les États-Unis dans leur grand plan climat (IRA), qui accorde des subventions aux seuls véhicules électriques fabriqués en Amérique du Nord.  

"Nous sommes les premiers (en Europe), à l'image de ce qui a été fait aux États-Unis avec l'IRA, à mettre en place un dispositif fiscal aussi avantageux pour la production industrielle de technologies nouvelles sur notre territoire", a vanté M. Le Maire.

La Chine "pas irrattrapable

 

Ce discours intervient alors que l'industrie automobile française, qui délocalise depuis des années, a grandement souffert de la crise du Covid: la production de véhicules en France a diminué de près de 40% entre 2019 et 2020, et n'a pas retrouvé ses niveaux d'avant-pandémie (1,4 million en 2022, contre 2,2 millions en 2019). 

Pour relancer la filière, constructeurs et gouvernement parient sur l'électrique, alors que les ventes de voitures thermiques seront interdites en Europe en 2035. Le gouvernement s'est fixé comme objectif une production annuelle de 2 millions de véhicules électrifiés en France d'ici 2030.

Mais en la matière, la France fait face à une double concurrence rude: celle des Etats-Unis et celle de la Chine, qui "a pris cinq ans d'avance" sur l'électrique, selon Bruno Le Maire, quand le secteur évoque plutôt "dix ans". 

"Ce n'est pas irrattrapable, mais cela suppose de mettre les bouchées doubles", a tenté de rassurer le ministre. Concernant les batteries électriques par exemple, "non seulement nous sommes en train de rattraper notre retard", mais "d'ici quinze ans", la France produira "les meilleures batteries", affirme-t-il. 

Pour ce faire, le ministre entend sécuriser l'approvisionnement en métaux rares nécessaires à leur construction, via la création d'un fonds "opérationnel au plus tard en 2024".

"Je souhaite qu'il représente au total 1,5 milliard d'euros pour sécuriser notre approvisionnement national en métaux, comme le nickel, le lithium, le cobalt, le graphite ou encore le titane", a-t-il précisé, ajoutant qu'un demi-milliard proviendra de l'Etat.

Pas magiques

Reste à voir si ces propos parviendront à rassurer un secteur inquiet depuis que "l'électrique n'est plus une option, mais notre horizon", selon les mots du président de la Plateforme automobile, Luc Chatel. 

Juste avant l'intervention du ministre, ce dernier l'avait averti: "C'est donnant-donnant ! Vous nous demandez de changer de modèle, d'arrêter les moteurs thermiques où nous sommes leaders, (...) mais nous avons besoin d'un accompagnement pérenne". 

Pour Vincent Charlet, économiste à la Fabrique de l'Industrie, un think tank pro-industrie, les aides annoncées sont "bienvenues" et même "astucieuses dans leur conception", mais ne seront "pas magiques". 

Il se déclare "très sceptique" sur le fait que les crédits d’impôts accordés aux industriels des batteries puissent aider le secteur automobile lui-même.

"Le crédit d’impôt colmate tout juste la dernière brèche en date" dans un secteur en difficulté depuis plusieurs années, dit-il à l'AFP. A savoir l'afflux massif d'une "concurrence chinoise inattendue et non anticipée" depuis l'annonce de l'interdiction des ventes de véhicules thermiques en Europe en 2035.

Le gouvernement et le secteur doivent d'ici quelques jours signer un nouveau contrat de filière, qui prendra effet en 2027.

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