Au coeur de l'usine Thales de Gémenos, la carte bancaire continue de se réinventer

Plaques de PVC, bobines de fil d'or et milliers de puces éparpillées sur un disque le soir, autant de cartes bancaires personnalisées prêtes à partir le lendemain matin: c'est le tour de force réalisé chaque nuit...

Une sélection de cartes bancaires à l'usine Thales de Gémenos, dans les Bouches-du-Rhône, le 18 septembre 2024 © MIGUEL MEDINA
Une sélection de cartes bancaires à l'usine Thales de Gémenos, dans les Bouches-du-Rhône, le 18 septembre 2024 © MIGUEL MEDINA

Plaques de PVC, bobines de fil d'or et milliers de puces éparpillées sur un disque le soir, autant de cartes bancaires personnalisées prêtes à partir le lendemain matin: c'est le tour de force réalisé chaque nuit dans l'usine Thales de Gémenos, dans les Bouches-du-Rhône.

Au fil des années, les cartes de paiement, toujours plus nombreuses, se sont sécurisées et sophistiquées, explique Amélie Tournant, chargée de la stratégie pour les solutions bancaires et de paiement au sein de Thalès, tandis qu'elle fait visiter à l'AFP le site de fabrication.

"L'innovation dans l'industrie du paiement est très importante, elle l'a toujours été et elle le reste", insiste-t-elle. 

Après un bref rappel de la figure de Roland Moreno, inventeur français fantasque et "père" de la carte à puce dans les années 70, la responsable évoque les avancées technologiques des quinze derniers années, haussant la voix pour couvrir le bruit des machines.

Paiement sans contact, cryptogramme (les trois chiffres souvent au dos de la carte bancaire) changeant automatiquement à intervalles réguliers, intégration d'un lecteur d’empreinte digitale, numérisation des cartes dans les smartphones... la liste est longue.

Autour d'elle, des opérateurs en blouse blanche surveillent par dizaines la marche industrielle de l'usine.

Ici on assemble des modules, ces petits rectangles dorés semblables à des cartes SIM renfermant la fameuse puce, cousue de fil d'or ultra-fin et figée dans une résine. Là on les fixe sur des cartes, marquées du nom et du numéro unique de chaque client. Là-bas on les glisse dans des enveloppes ou des coffrets en carton, avant l'envoi.

 - Carte pour les malvoyants -

C'est aussi à Gémenos, situé à une vingtaine de kilomètres de Marseille, que des ingénieurs cherchent dans leur laboratoire à s'affranchir du plastique ou à miniaturiser de nouveaux composants.

Ils sont par exemple à l'origine d'une carte, commercialisée aujourd'hui par plusieurs caisses régionales du Crédit Agricole, permettant aux malvoyants "d'entendre" une transaction chez leur commerçant, pour leur faciliter la vie et éviter qu'ils soient victimes de fraude.

Cette carte contient un composant bluetooth miniaturisé qui envoie l’ensemble des informations (montant saisi par le commerçant sur le terminal de paiement, réussite ou échec de la saisie du code PIN et de la transaction) à leur téléphone. Il leur suffit d'y brancher des écouteurs pour les connaître en temps réel.

Un autre département attenant à l'usine est chargé des tests mécaniques et fait subir les pires tortures — pressions, flexions dans tous les sens — aux nouveaux produits, afin d'éprouver leur solidité dans le temps.

"Le marché des cartes bancaires se porte bien", assure Mme Tournant, grâce aux "nouveaux acteurs dans le paiement, les banques digitales, qui ont fait le choix d’émettre ce support physique (...) en plus des services numériques".

Les pays encore peu bancarisés et les marchés matures où le nombre de cartes par habitant continue d'augmenter fait aussi reculer le jour du pic du nombre de cartes fabriquées, inéluctable face au développement du paiement mobile.

Perpétuelle évolution

La branche de Thales "Identité et services numériques", moins connue que celle du groupe dédiée à la défense, livre à quelque 3.500 institutions financières un milliard de cartes bancaires chaque année dans le monde. De quoi faire de cette entité, issue du rachat de Gemalto et qui produit aussi des cartes SIM pour la téléphonie mobile et des documents d'identité, le numéro un mondial sur ce marché.

La société compte bien défendre ses parts de marché dans le monde numérique, face à des concurrents ambitieux comme Apple ou Google.

Une des puces de nos smartphones "est dédiée à protéger des applications de type carte de crédit", rappelle Rémy Belloir, directeur commercial France de Thalès Identité et services numériques, "c'est à l'intérieur de cette petite puce hyper protégée, à l'intérieur du téléphone, qu'on vient loger la carte bancaire" dématérialisée.

La société développe également des services numériques pour ses grands clients, comme un formulaire permettant aux particuliers de commander une nouvelle carte directement via leur application bancaire, avec en prime l'édition d'une carte virtuelle utilisable immédiatement et jusqu'à bonne réception de la carte physique.

bp/jbo/LyS

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