Au bout du monde, une demi-respiration pour Macron après une année éprouvante

Même au bout du monde, les polémiques françaises et les crises internationales ne sont jamais loin. Emmanuel Macron a bouclé une tournée inédite dans cet "Indopacifique" érigé en priorité diplomatique, qui ne lui aura offert qu'une...

Le président français Emmanuel Macron (C) s'adresse à son homologue srilankais Ranil Wickremesinghe (D) avant des discussions à Colombo, le 28 juillet 2023 © Ludovic MARIN
Le président français Emmanuel Macron (C) s'adresse à son homologue srilankais Ranil Wickremesinghe (D) avant des discussions à Colombo, le 28 juillet 2023 © Ludovic MARIN

Même au bout du monde, les polémiques françaises et les crises internationales ne sont jamais loin. Emmanuel Macron a bouclé une tournée inédite dans cet "Indopacifique" érigé en priorité diplomatique, qui ne lui aura offert qu'une demi-respiration après une année en quête de souffle.

Dès son retour, samedi, le chef de l'Etat devait présider un conseil de défense consacré au Niger, pays-clé pour la France au Sahel où un coup d'Etat militaire a renversé le président Mohamed Bazoum, proche allié de Paris.

A 16.000 km de l'Elysée, il est resté en contact direct avec son homologue nigérien séquestré par les putschistes, suivant la situation "heure par heure".

"La nuit a été courte", lâche-t-il jeudi dans le vol entre Nouméa et le Vanuatu.

Vendredi, c'est en pleine marche dans le parc national de Varirata, en Papouasie-Nouvelle-Guinée, que la cheffe de la diplomatie française Catherine Colonna prend le temps de parler aux journalistes pour condamner "avec la plus grande fermeté" ce qu'elle espère encore être une "tentative" de putsch.

Avant la pause estivale, l'Elysée misait sur ce déplacement "historique" en Nouvelle-Calédonie mais aussi, une première pour un président français, dans des pays indépendants du Pacifique, où il a clamé le "réengagement" de la France en Océanie.

Ainsi qu'au Sri-Lanka, étape rajoutée sur le chemin du retour pendant le ravitaillement en carburant, pour rencontrer à l'aéroport le président Ranil Wickremesinghe.

En duplex

Une semaine de voyage après un début de second quinquennat éprouvant, scandé par la contestation de la retraite à 64 ans, la vaine recherche d'une majorité absolue à l'Assemblée nationale, l'entente imparfaite avec sa Première ministre Elisabeth Borne qui s'est soldée par un remaniement mi-figue mi-raisin.

Et pour finir, les émeutes d'une violence sans précédent qui ont ébranlé le pays fin juin après la mort du jeune Nahel, tué par un policier lors d'un contrôle.

Nouméa, Touho, Port-Vila, Varirata, Port-Moresby, Colombo. A chaque escale, Emmanuel Macron est accueilli selon la coutume locale, au son des percussions ou des chants.

Danses tribales, colliers de fleurs ou de coquillages, les images sont dépaysantes après ces "cent jours" voulus par le chef de l'Etat au sortir de la crise des retraites et qui s'étaient ouverts sur un bain de foule chahuté en Alsace.

Là, il se mêle longuement aux danseurs et aux spectateurs du festival des arts mélanésiens au Vanuatu, enchaîne les interactions avec la population. La politique hexagonale paraît loin.

Enfin, pas toujours. A Nouméa, un homme lui suggère qu'en 2027, "peut-être" qu'Edouard Philippe le "remplacera". Pas forcément l'option rêvée du président, qui malgré des relations notoirement distantes avec son ex-Premier ministre assure tout de même que cet "ami" fait bien partie de ceux qui peuvent "prendre le relais".

En réalité, les controverses rattrapent le chef de l'Etat dès le vol aller. Il découvre que le patron de la police, Frédéric Veaux, vient d'affirmer qu'un policier n'a "pas sa place en prison" avant son éventuel procès.

A Paris, les critiques fusent.

Cela tombe bien: après son silence du 14-Juillet, les stratèges élyséens ont imaginé, pour clore les "cent jours", une drôle d'interview télévisée le 24 juillet, enregistrée en duplex à sa descente d'avion depuis Nouméa.

Emmanuel Macron dit comprendre "l'émotion" des policiers, mais rappelle que "nul" n'est "au-dessus de la loi".

Cette position d'équilibriste lui permet de tenir la polémique à distance.

Les regards se tournent vers le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin, qui l'accompagne en Nouvelle-Calédonie mais reste mutique trois jours durant.

Marée bleu-blanc-rouge

A Nouméa toujours, c'est dans le chaudron de la politique calédonienne que le président doit s'immerger. Son intention: secouer indépendantistes comme loyalistes pour qu'ils se tournent ensemble vers "l'avenir" après trois "non" consécutifs à l'indépendance.

"La Nouvelle-Calédonie est française parce qu'elle a choisi de rester française", martèle-t-il dans un discours devant 10.000 personnes ultra-majoritairement non-indépendantistes et une marée de drapeaux bleu-blanc-rouge.

Las, malgré les dénégations de ses conseillers qui défendent une position équilibrée, ses paroles sont interprétées sur place comme très rudes à l'égard des indépendantistes, dont plusieurs figures ont boudé une rencontre avec lui. L'heure n'est pas au "rassemblement" escompté.

Au Vanuatu et en Papouasie-Nouvelle-Guinée, l'accueil est fastueux. Emmanuel Macron peut déployer sa stratégie qui consiste, plaide-t-il, non pas à "rivaliser avec la Chine ou avec les Etats-Unis", mais à proposer des partenariats "équitables".

Critiqué en France pour son bilan environnemental par la gauche et de nombreuses organisations, attendu à la rentrée sur sa planification écologique, le président endosse comme souvent à l'étranger le costume de "champion des nations forestières", selon les termes du Premier ministre papouasien James Marape.

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