Attentat de Strasbourg: un proche du jihadiste condamné à 30 ans de réclusion

Il savait qu'un "projet criminel" était "en cours d'élaboration": Audrey Mondjehi, 42 ans, a été condamné jeudi soir à Paris à 30 ans de réclusion pour avoir aidé le jihadiste Chérif Chekatt à se procurer l'arme avec laquelle il a tué cinq personnes en décembre...

Croquis d'audience du 29 février 2024 d'Audrey Mondjehi (2e d), lors du procès de l'attentat du marché de Noël de Strasbourg en 2018, au palais de justice de Paris © Benoit PEYRUCQ
Croquis d'audience du 29 février 2024 d'Audrey Mondjehi (2e d), lors du procès de l'attentat du marché de Noël de Strasbourg en 2018, au palais de justice de Paris © Benoit PEYRUCQ

Il savait qu'un "projet criminel" était "en cours d'élaboration": Audrey Mondjehi, 42 ans, a été condamné jeudi soir à Paris à 30 ans de réclusion pour avoir aidé le jihadiste Chérif Chekatt à se procurer l'arme avec laquelle il a tué cinq personnes en décembre 2018 dans les rues du marché de Noël de Strasbourg.

Cette peine, quasiment conforme aux réquisitions du parquet national antiterroriste (Pnat), est assortie d'une période de sûreté des deux tiers, et d'une interdiction définitive du territoire français - Mondjehi étant de nationalité ivoirienne. 

Après cinq semaines d'audience, la cour d'assises de Paris a estimé que le délinquant multirécidiviste, malgré ses dénégations, "avait connaissance de la radicalisation violente" du tueur, dont il était proche, et l'a en conséquence jugé coupable d'"association de malfaiteurs terroristes", a déclaré la présidente Corinne Goetzmann, en présence de dizaines de parties civiles attentives - sur 208 au total.

Le soir du 11 décembre 2018, après avoir prêté allégeance au groupe Etat islamique (EI), Chérif Chekatt avait tué cinq personnes et en avait blessé 11 autres dans les rues bondées de la capitale alsacienne. Il avait ensuite été abattu par les forces de l'ordre après deux jours de traque.

Dans les trois mois ayant précédé la tuerie, Audrey Mondjehi "savait que le projet criminel de Chérif Chekatt était en cours d'élaboration", a estimé la cour, spécialement composée de magistrats professionnels. Cependant, il en "ignorait les modalités précises", ont tranché les juges, qui ont donc reconnu le quadragénaire non-coupable du chef de "complicité" d'assassinats et de tentative d'assassinats terroristes. 

A l'énoncé du verdict, le condamné n'a laissé apparaître aucune réaction. Il s'est entretenu avec ses avocats avant d'être emmené par les forces de l'ordre.

Le quatrième accusé acquitté

La cour a par ailleurs condamné à des peines plus légères deux autres accusés, reconnus coupables d'"association de malfaiteurs" de droit commun, pour avoir également joué un rôle d'intermédiaire, mais de moindre importance. 

L'un, Christian H., 34 ans, a été condamné à cinq ans de prison, dont six mois avec sursis, pour avoir vendu à Mondjehi et Chekatt deux armes, dont une défectueuse, qui n'ont pas servi le jour de l'attentat. 

L'autre, Frédéric B., 37 ans, a été condamné à quatre ans de prison, dont un an avec sursis, pour avoir communiqué à Mondjehi, six jours avant la tuerie, le numéro de téléphone du vendeur de l'arme. 

Les deux hommes, qui comparaissaient libres, ne retourneront pas en prison, la partie ferme de leur peine étant, pour l'un, couverte par le temps passé en détention provisoire, et pour l'autre, aménagée sous bracelet électronique.

Un quatrième homme, Stéphane B., 39 ans, frère de Frédéric, a été acquitté. La cour a considéré qu'on ne pouvait lui imputer "aucune participation active" aux faits, puisqu'il était absent le jour où Chekatt et Mondjehi ont été mis en relation avec le vendeur de l'arme. Cet homme ayant passé 14 mois en détention provisoire, il pourra prétendre à une indemnisation, a souligné la présidente de la cour.

Un cinquième mis en cause aurait dû initialement être jugé: Albert B., 83 ans, qui a vendu à Audrey Mondjehi et Chérif Chekatt l'arme ayant servi à la tuerie, quelques heures avant l'attentat. Son cas a été disjoint en raison de son état de santé qui ne lui permettait pas de comparaître. Il pourrait donc être jugé seul, ultérieurement.

Après la décision rendue jeudi, "les victimes sont soulagées", a commenté Mostafa Salhane, chauffeur de taxi pris en otage lors de l'attentat, qui a assisté à la quasi intégralité des débats pendant cinq semaines. 

Pour les parties civiles, ce verdict marque "la prise en compte de la gravité" des faits, "de toutes leurs plaies, de toutes leurs souffrances", a abondé l'une de leurs avocats, Me Catherine Szwarc. La décision est "extrêmement fondée" et "totalement justifiée" sur le plan juridique, a salué son confrère Me Arnaud Friedrich. 

"La justice a été rendue", a commenté pour sa part la maire de Strasbourg, Jeanne Barseghian, dans un communiqué. "Je forme le voeu que ce verdict puisse contribuer (au) travail de deuil" des victimes, "même si leur souffrance sera à jamais immense", a ajouté l'édile.

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