Attentat de Magnanville: Mohamed Lamine Aberouz juge l'islam "pas compatible" avec la France

Mohamed Lamine Aberouz, jugé devant la cour d'assises spéciale de Paris pour complicité présumée dans l'assassinat de deux policiers à Magnanville (Yvelines) le 13 juin 2016, au nom de l'organisation Etat islamique, a estimé mardi...

Croquis d'audience de Mohamed Lamine Aberouz (d) au premier jour de son procès pour l'attentat de Magnanville, le 25 septembre 2023 à Paris © Benoit PEYRUCQ
Croquis d'audience de Mohamed Lamine Aberouz (d) au premier jour de son procès pour l'attentat de Magnanville, le 25 septembre 2023 à Paris © Benoit PEYRUCQ

Mohamed Lamine Aberouz, jugé devant la cour d'assises spéciale de Paris pour complicité présumée dans l'assassinat de deux policiers à Magnanville (Yvelines) le 13 juin 2016, au nom de l'organisation Etat islamique, a estimé mardi que l'islam n'était "pas compatible" avec la France.

Devant la cour d'assises spéciale de Paris, l, s'est dit "convaincu dans (sa) religion", à l'occasion de l'examen de sa personnalité, tout en niant toute velléité de violence.

Sur son front, on distingue une marque sombre appelée "tabaâ", le signe de l'observance assidue des cinq prières quotidiennes de l'islam.

Français d'origine marocaine âgé de 30 ans, l'ami de Larossi Abballa, l'assassin de Jessica Schneider, 36 ans, agente administrative au commissariat de Mantes-la-Jolie, et de son compagnon Jean-Baptiste Salvaing, 42 ans, commandant au commissariat des Mureaux, sous les yeux de leur fils de 3 ans, ne se reconnait pas dans "les valeurs de la République" comme "la démocratie" ou "la laïcité".

Il comparaît depuis lundi pour complicité d'assassinat sur personne dépositaire de l'autorité publique, association de malfaiteurs terroriste criminelle et complicité de séquestration en relation avec une entreprise terroriste.

"Les valeurs de l'islam ne sont pas compatibles avec les valeurs de la France", soutient-il.

"Mais pourtant vous êtes Français", s'étonne le président de la cour Christophe Petiteau.

"Tout dépend de ce que vous entendez par Français", répond l'accusé. "Pour moi, Français c'est ethnique", assène-t-il. "Moi, je me considère comme Arabe".

"Mon identité propre c'est d'être un musulman d'origine arabe", poursuit-il calmement.

A propos des "valeurs de la République", Mohamed Lamine Aberouz entend distinguer "la théorie et la pratique". "J'ai l'impression que les valeurs fonctionnent uniquement si vous rentrez dans le cadre", estime-t-il en critiquant au passage l'interdiction du port de l'abaya à l'école.

"Je considère que l'islam est la vérité, le Coran est la vérité", assène-t-il encore d'une voix posée.

Son vocabulaire est riche, ses phrases bien construites.

Quatrième enfant d'une fratrie de cinq au sein d'une famille d'origine marocaine des Mureaux (Yvelines), Mohamed Lamine Aberouz a fait des études chaotiques (renvoyé du collège, abandon de ses études au lycée...). "L'école c'était difficile. Je n'étais pas le seul à faire des conneries", reconnait-il avant d'ajouter: "Je n'étais pas le pire".

A l'entendre, c'est la religion qui a été sa planche de salut. En 2010, à 17 ans, il part étudier en Mauritanie où résident des parents de sa mère et c'est une révélation. Aberouz parle d'un "éveil spirituel".

Ma seule période heureuse

"La seule période où j'ai été heureux dans ma vie, c'est quand j'étais en Mauritanie", dit-il.

Contraint de revenir en France en 2011 après l'arrestation de son frère aîné, Charaf-Din Aberouz, interpellé au Pakistan alors qu'il comptait rejoindre un camp d'entraînement d'Al-Qaïda, Mohamed Lamine Aberouz ne rêve aujourd'hui que de repartir en Mauritanie.

"Ce projet ne m'a jamais quitté. Mon idéal est de vivre dans un pays islamique où je pourrais m'épanouir", souligne-t-il.

Pour autant, Mohamed Lamine Aberouz a insisté sur ses intentions pacifiques. Lundi, au premier jour de son procès il avait dénoncé "l'acte monstrueux" commis par Larossi Abballa au nom de l'organisation Etat islamique (EI). Depuis son arrestation, il n'a eu de cesse de proclamer son innocence.

Une ex-"fiancée", Sarah Hervouët, qui purge une peine de 20 ans de réclusion criminelle pour avoir poignardé un policier en civil en septembre 2016 après une tentative d'attentat aux bonbonnes de gaz près de Notre-Dame de Paris, a affirmé lundi, lors d'une audition en visio depuis sa prison, que Mohamed Lamine Aberouz avait vainement tenté de la dissuader de passer à l'acte.

"Il ne savait pas ce que j’allais faire, il n’a pas compris", a raconté à la cour Mme Hervouët.

"Si vous aviez suivi ses conseils, pensez-vous que vous seriez en détention aujourd’hui?", demande les avocats de M. Aberouz.

— "Non", répond la jeune femme.

Dans ce dossier, M. Aberouz a été définitivement condamné en juin 2021 à cinq ans d'emprisonnement pour non-dénonciation de crime terroriste.

A l'isolement en prison, il raconte que sa vie est uniquement rythmée par ses "pratiques religieuses" et les règles de la détention. "Je lis, je sors rarement", dit-il. Il se défend de tout prosélytisme en prison.

Son interrogatoire sur le fond est prévu les 5 et 6 octobre.

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