Ascoval bientôt fixé sur son sort

À ce jour, le groupe Altifort est le seul candidat à la reprise du site industriel. Son co-PDG, Bart Gruyaert, retravaille actuellement le projet. Deux volets décisifs pour qu’il soit validé : sécuriser le montage financier et trouver les clients industriels.

L'aciérie de Saint-Saulve a connu des investissements ces dix dernières années.
L'aciérie de Saint-Saulve a connu des investissements ces dix dernières années.

Le 7 novembre, le tribunal de grande instance (TGI) de Strasbourg a différé sa décision sur l’offre de reprise de l’aciérie Ascoval de Saint-Saulve (281 salariés), en redressement judiciaire. Ce jour-là, il a aussi fixé la date du 12 décembre, laissant au repreneur le temps de revoir son offre. Pour l’instant, on ne connaît qu’un seul candidat à la reprise de l’ex-aciérie intégrée de Vallourec : Altifort, un jeune groupe en développement présenté comme «franco-belge-urkrainien» et basé à Ham, dans la Somme. L’offre de reprise initiale comportait des conditions suspensives impliquant Vallourec (une garantie de 18 mois sur les volumes et prix, une remise à neuf du bâtiment, la reprise du passif…), mais ce dernier n’a pas voulu s’engager et il n’est plus partie prenante. À la différence de Vallourec, Altifort a une histoire récente. Sa création remonte à 2014 et sa stratégie consiste reprendre des sociétés industrielles en difficulté mais jugées à fort potentiel, afin de proposer à terme des produits et services à haute valeur ajoutée. Aujourd’hui, Altifort représente environ 1 500 personnes. Bart Gruyaert, ingénieur d’origine belge, a créé le groupe avec Stanislas Vigier, français et également ingénieur. Il dit bien connaître Vallourec et la candidature à la reprise d’Ascoval remonte au printemps 2018.

Montage financier en cours

Dans ce dossier, les médias ont parlé d’un besoin de 150 à 200 millions d’euros. Bart Gruyaert précise que l’important réside dans un investissement à réaliser, celui qui apportera la valeur ajoutée attendue. À l’écouter, les montants cités portent donc sur cet investissement qui devrait créer les quelque 130 emplois annoncés. Bart Gruyaert parle du recrutement de 15 personnes en premier lieu, puis d’une quarantaine dans les neuf mois. Le complément devrait venir avec la montée en puissance du nouveau processus. Mi-novembre, le montage financier se présentait ainsi : 35 millions d’euros apportés par Altifort et des emprunts accordés par trois collectivités publiques (voir encadré). Quant au complément, il pourrait venir des clients industriels et/ou des banques. Bart Gruyaert explique : «Je n’ai pas voulu d’actionnaires financiers, les recherches se sont portées sur des actionnaires industriels susceptibles d’être aussi des clients de l’aciérie.» Les marchés à décrocher pour lui sont les pièces techniques de l’automobile (40%), mécanique et machines (40%) et énergie et transport (20%). Bart Gruyaert explique que le jeune groupe s’est donné une «obligation de résultat». Le futur nom pourrait être Actifort Steel.

Une ancienne vue de l’intérieur de l’aciérie (site presse de Vallourec).

Vallourec : l’histoire d’un retrait

L’histoire de l’aciérie de Saint-Saulve remonte à 1975. Le groupe l’avait fait construire afin d’y produire les aciers spéciaux pour la fabrication de tubes sans soudure. Le nom d’Ascoval est apparu en janvier 2017, lorsque Vallourec et Asco industries se sont entendus sur la création d’une SAS détenue à 60% par Asco industries et à 40% par Vallourec. Cette SAS a repris tous les actifs de l’aciérie et les quelque 320 salariés d’alors. Asco industries, en restructuration, s’est retrouvée en redressement en novembre 2017, puis en liquidation début 2018. Le tribunal de grande instance de Strasbourg a alors validé sa reprise, fin janvier dernier, par le groupe suisse Schmolz et Bickenbach, exception faite de l’aciérie qui est restée entre les mains de Vallourec, seul actionnaire et client. Le groupe avait engagé des restructurations dans les années 2016 et 2017. Celles-ci n’ont cependant pas eu les effets escomptés sur le chiffre d’affaires. La SAS Ascoval s’est retrouvée en redressement et dans l’attente d’un repreneur. L’histoire de l’aciérie avec Vallourec devrait s’achever avec l’accord «take or pay» qui court jusqu’au 31 janvier 2019.

Les participations annoncées par les collectivités

Des collectivités locales et l’Etat se sont engagés sur le plan financier. À ce jour, le Conseil régional aurait l’intention de débloquer 12 millions d’euros. Valenciennes Métropole a évoqué 10 millions. Quant à l’Etat, selon les déclarations de Bruno Le Maire, ministre de l’Economie et des Finances, il aurait opté pour le calcul suivant : un euro de sa part pour chaque euro privé engagé. Il ne s’agira pas de subventions mais de prêts qui seraient consentis au repreneur.

Le «train à fils» qui manque

Cédric Orban, le président de la SAS Ascoval qui attend son repreneur.

L’aciérie de Saint-Saulve s’étend sur 245 000 m2, dont 61 000 m2 couverts. Ces dix dernières années, elle a connu 100 à 150 millions d’euros d’investissements. Cédric Orban, président de la SAS Ascoval, constate que ce site industriel est performant. Ce qui lui manque, dit-il, c’est une étape technique de finition dans le processus de fabrication, qui consiste à réduire le diamètre. Si un laminoir existait auparavant, il avait été jugé trop vieux par le groupe Vallourec qui a décidé de faire faire l’opération en Allemagne. Or, c’est ce «train à fils», l’étape manquante, qui doit rendre l’aciérie attractive et lui ouvrir des débouchés.