Arques, capitale de la tomate
Cultiver la tomate dans les Hauts-de-France ? Vu les conditions climatiques, cela ne saurait se faire à l’air libre… Deux investisseurs belges, les frères Vandevelde, relèvent le défi. Au terme d’un parcours démarré en 2014, ils ont bâti une serre géante de 9,3 hectares sur le territoire d’Arques, agrémentée d’une installation de production d’électricité par cogénération. La première cueillette vient d’avoir lieu.
Ce sont deux jeunes gens, décidés et la tête bien faite : Kévin et Jonas Vandevelde. Kévin a fait des études de management et Jonas est versé dans l’agro et la biotechnologie. Ils sont belges, fils et petit-fils de producteurs de tomates. Successivement, en 2009 et 2011, ils ont rejoint l’entreprise familiale et sont les porteurs d’un projet depuis 2014 : pallier le manque de foncier et de personnel disponible en Belgique et assurer le développement des affaires familiales en France. Ainsi vont naître Les Serres des Hauts-de-France. «Nous avions choisi ce nom avant que la région ne décide de le porter», précise Jacques Ribaille, gérant d’une société de conseil qui accompagnera le projet de bout en bout. «Mais nous ne réclamerons pas de droit d’auteur», précise M. Ribaille avec humour.
Deux projets juxtaposés
C’est au cœur de l’été 2014 que l’agence SOFIE (Saint-Omer Flandre interface d’entreprises) candidate auprès de Nord France Invest, en concertation avec la Direction régionale de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (DRAAF), pour mettre sur pied le double projet porté par MM. Vandevelde. À savoir une unité de cogénération, implantée sur l’îlot Nord de la Porte-Multimodale-de-l’Aa et, sur une parcelle de terres agricoles contiguë, la construction de 93 000 m² de serres. La CAPSO (communauté d’agglomération de Saint-Omer) est partie prenante du projet puisqu’elle a vendu les terrains nécessaires à l’accomplissement du projet et a pris en charge les fouilles archéologiques préalables. Les frères Vandevelde sont accompagnés par la coopérative belge REO Veiling. Elle regroupe plus de mille producteurs belges et commercialise 250 000 tonnes de fruits et légumes par an. Cette coopérative se propose de développer un pôle de production légumière dans la région Hauts-de-France et l’Audomarois est l’une de ses cibles. REO Veiling a marqué son intérêt pour le projet des frères Vandevelde en prenant la majorité dans la SCI Les Jardins des Hauts-de-France, qui possède les terrains et les constructions d’exploitation.
«L’investissement de 16 millions d’euros permet de faire pousser 126 000 pieds de tomates»
La cogénération
Logée dans la SARL Kejoto, dirigée par Jonas Vandevelde, la cogénération au gaz naturel a été installée par Optimal Solutions, filiale de Dalkia au sein du groupe EDF. Avec une production de 22,5 MWh par an, revendue à EDF par contrat, cette installation assure une partie non négligeable de la chaleur nécessaire à la croissance et au développement des tomates. Leur production est placée sous la houlette de Kévin Vandevelde au sein de la SARL Les Serres des Hauts-de-France. Ce sont exclusivement des tomates rondes en grappe. Elles sont qualifiées de «gustatives» par M. Vandevelde qui ajoute : «Le choix de la variété, des cahiers des charges respectés avec maîtrise des températures et un produit manipulé avec amour par le personnel sont des facteurs clés de la qualité de nos produits.» L’investissement de 16 millions d’euros dans les serres permet de faire pousser simultanément 126 000 pieds de tomates qui se récoltent d’avril à novembre. La production annuelle est de 6 000 tonnes. Elle sera distribuée sous deux marques : Les Nouveaux Producteurs et Eureka France. Cette activité donne du travail à une petite cinquantaine de personnes recrutées en CDI. À noter que 37 de ces CDI ont bénéficié des dispositions de la convention de revitalisation d’Arc.
L’environnement
Les Serres des Hauts-de-France sont nées sous le signe du développement durable et du respect de l’environnement. Citons à nouveau la récupération de la chaleur et du CO2 pour la production d’électricité. En matière d’eau, la récupération des eaux de pluie permet de ne pas faire appel au réseau public pour l’arrosage et le chauffage. Enfin, la proximité de la clientèle (jusque-là les producteurs significatifs les plus proches se trouvaient en Bretagne) aura un effet sur la réduction d’émission de CO2. «Cette première collaboration en amènera, nous l’espérons, de nombreuses autres dans les prochaines années, avec la coopérative REO Veiling et avec les entrepreneurs flamands», a déclaré lors de l’inauguration François Decoster, président de la CAPSO. Bien vu : on prête à REO Veiling de grandes ambitions sur les Hauts-de-France et Rita Demaré, sa présidente, n’en fait pas mystère. Dans les milieux bien informés, il se dit qu’un projet concernant les fraises serait bien avancé…