Apprentissage : le point sur les aides
Muriel Pénicaud a annoncé une série de premières mesures exceptionnelles pour éviter une baisse du nombre d’apprentis. Aide à l’embauche pour les entreprises, aide à la recherche d’emploi pour les jeunes… Tour d’horizon.
Un plan massif pour sauver l’apprentissage. C’est ce qu’a annoncé la ministre du Travail, Muriel Pénicaud, le 4 juin à l’Élysée à l’issue d’une réunion avec les partenaires sociaux, en présence notamment du Président de la République et du ministre de économie, Bruno Le Maire. « Une de nos priorités sera la relance de l’apprentissage car les jeunes font partie des catégories qui pourraient être les plus touchées. Ils ne doivent pas être les variables d’ajustement de la crise. On ne peut pas avoir une génération sacrifiée, a martelé la ministre du Travail. Depuis 15 jours de concertation avec les partenaires sociaux, nous avons convergé sur un certain nombre de décisions. »
Prime à l’embauche
Première mesure prévue : une prime à l’embauche exceptionnelle de 5 000 à 8 000 euros pour que les entreprises continuent de former les apprentis. Ainsi, celles qui recruteront des apprentis en CAP ou en Licence professionnelle entre le 1er juillet 2020 et le 28 février 2021 recevront 5 000 euros par an pour un jeune de moins de 18 ans et 8 000 euros pour un apprenti majeur. Cette aide devrait soulager les entreprises, afin que l’embauche d’apprentis représente un « coût quasi nul pour la première année », estime Muriel Pénicaud, soit « zéro euro pour les moins de 21 ans et jusqu’à 175 euros par mois pour les plus de 21 ans », selon les estimations du ministère du Travail. « Cela se fera sans conditions pour les PME de moins de 250 salariés ». Tandis que les plus grandes devront justifier d’un taux de 5% d’alternants dans leurs effectifs, d’ici 2021, pour profiter de ce coup de pouce. Si tel n’est pas le cas, elles devront rembourser les sommes perçues. Concrètement, le versement de cette prime sera effectué dès que le contrat d’apprentissage sera signé.
Le coût supplémentaire pour les finances publiques n’est pas neutre : il s’élèverait à plus d’un milliard d’euros. L’objectif de cette mesure ? Maintenir la bonne dynamique de l’apprentissage qui avait battu des records historiques, suite à la réforme du secteur avec 485 000 apprentis enregistrés fin 2019, soit une progression de 16% sur un an.
Pour l’heure, les acteurs de l’apprentissage estiment que la baisse serait de l’ordre de 20% de nouveaux apprentis à la rentrée prochaine. Si les institutions se félicitent de cette mesure, CMA France (Chambre des métiers et de l’artisanat) regrette qu’elle ne prenne pas en compte les spécificités de l’artisanat et ne vienne pas « renforcer suffisamment les aides existantes dont bénéficient les entreprises artisanales les plus touchées par le risque de faillite » – l’aide était jusqu’à alors fixée à 4 125 euros et réservée aux entreprises de moins de 250 salariés pour des diplômes au niveau inférieur ou égal au bac. De manière générale, pour l’institution, les mesures prises « constituent un pas en avant important, mais ne sont pas à la hauteur de l’enjeu. »
Délai allongé
Deuxième mesure prévue par le Gouvernement : permettre aux jeunes qui n’ont pas encore trouvé leur contrat d’apprentissage de commencer leur formation en CFA pendant six mois. Ils auront ainsi davantage de temps pour trouver une entreprise au regard du contexte économique. Cette décision de prolongation du délai, de trois à six mois, pour rechercher un contrat fait suite à « une demande forte des partenaires sociaux », précise la ministre. Concrètement, un jeune qui s’inscrit en septembre prochain pourra ainsi rester en CFA sans contrat jusqu’au 28 février 2021. Ces deux premières mesures ont été présentées dans le cadre du troisième projet de loi de Finances rectificative, examiné le 10 juin en Conseil des ministres.
Troisième mesure, « la mobilisation territoriale » pour pouvoir offrir à « chaque jeune qui a fait un vœu pour une formation en apprentissage sur les plates-formes d’orientation scolaire affelnet et parcoursup au moins une offre d’apprentissage ». Ainsi, tous les acteurs locaux – les Direccte, les Régions et Départements, et Pôle Emploi – seront mobilisés.
« Il faut leur permettre d’accéder à un premier emploi sinon ils risquent d’être toujours les derniers embauchés »
Enfin, dernière initiative, cette fois pour favoriser l’équipement numérique des apprentis. Ainsi, l’aide au premier équipement professionnel de 500 euros mise en place par la réforme de septembre 2018 pourra servir à l’achat d’ordinateurs portables ou de tablettes numériques à destination des apprentis.
Ce plan apprentissage est la première pierre d’un plan pour l’emploi des jeunes qui doit être présenté la première quinzaine de juillet. Quelque 700 000 à 800 000 jeunes devraient sortir du système scolaire ou universitaire cet été. « Il faut leur permettre d’accéder à un premier emploi, explique Muriel Pénicaud. Sinon, ils risquent d’être toujours les derniers embauchés dans ce contexte de crise. Nous avons beaucoup de propositions sur la table dont nous allons discuter pour voir comment nous pouvons leur apporter une réponse qui leur permette de se projeter dans l’avenir. On a aidé les entreprises, on leur demande d’aider la nation, en aidant les jeunes », conclut la ministre qui s’est adressé directement aux chefs d’entreprise : « Vous ne pouvez pas aujourd’hui arrêter l’apprentissage et dire demain on ne trouve pas les compétences. »