Annonces d'Attal contre la violence des mineurs: inquiétude des syndicats de magistrats

Les deux principaux syndicats de magistrats se sont inquiétés vendredi des annonces du Premier ministre pour lutter contre la violence des mineurs: l'USM a estimé que des moyens supplémentaires seraient préférables plutôt qu'une réforme, et...

Un code pénal sur le bureau d'un juge au tribunal pour enfants de Mulhouse le 26 juin 2013 © SEBASTIEN BOZON
Un code pénal sur le bureau d'un juge au tribunal pour enfants de Mulhouse le 26 juin 2013 © SEBASTIEN BOZON

Les deux principaux syndicats de magistrats se sont inquiétés vendredi des annonces du Premier ministre pour lutter contre la violence des mineurs: l'USM a estimé que des moyens supplémentaires seraient préférables plutôt qu'une réforme, et le SM a évoqué des mesures "hautement préoccupantes".

"Certains oublient que l'enfant, même adolescent, n'est pas un +adulte en réduction+", a commenté sur son profil LinkedIn le président de l'Union syndicale des magistrats (USM, majoritaire), Ludovic Friat.

Juger les mineurs dès 16 ans en comparution immédiate, "au milieu des majeurs", ferait "fi de multiples principes constitutionnels, conventionnels et juridiques fermement établis", a-t-il estimé.

"Donnons donc les moyens aux éducateurs, juges des enfants et greffiers, parquetiers, policiers et associations d'appliquer totalement et complétement le CJPM", le Code de justice pénale des mineurs entré en vigueur en 2021, "au lieu de tenter une énième réforme", a plaidé M. Friat.

De son côté le Syndicat de la magistrature (SM, classé à gauche) s'est inquiété de mesures qui esquissent selon lui une "justice toujours plus expéditive et stigmatisante". 

"Augmenter encore les peines encourues par les mineurs ou les soumettre à partir de 16 ans à la procédure de comparution immédiate" se ferait "au mépris des principes à valeur constitutionnelle d'atténuation de (leur) responsabilité" et "d'adaptation des mesures et des procédures à leurs âges", a dénoncé le SM dans un communiqué.

En déplacement jeudi dans l'Essonne, le Premier ministre, Gabriel Attal, a sonné la "mobilisation générale" face à "l'addiction à la violence" d'une partie des adolescents. 

Il s'est dit notamment prêt à ouvrir le débat sur des "atténuations à l'excuse de minorité" dans les condamnations pénales, ou à punir les parents pour les infractions commises par leurs enfants.

Un non-sens pour le SM, pour qui la justice des mineurs n'est pas "laxiste et dépassée par des hordes d'enfants incontrôlables", mais s'est au contraire "particulièrement durcie ces dernières années". 

Dans un tiers des dossiers, les mineurs sont condamnés à de la prison, et la durée moyenne des peines fermes est passée de cinq mois et demi en 2010 à neuf mois en 2020, observe le syndicat, citant des données statistiques du ministère de la Justice publiées en 2022.

Les mesures annoncées par M. Attal ont également été vivement dénoncées par le principal syndicat des éducateurs de la Protection judiciaire de la jeunesse, le SNPESS-PJJ, pour qui elles risquent de "stigmatiser les jeunes en difficulté et leurs familles".

Remettre en cause le principe d'une peine atténuée pour les mineurs, c'est "bafouer l'un des principes fondamentaux de la Convention internationale des droits de l'enfant dont la France est signataire", a souligné ce syndicat.

"Un mineur délinquant est avant tout un mineur à protéger", mais les annonces du Premier ministre tendent à remettre en cause "la primauté de l'éducatif" et de la prévention, a déploré auprès de l'AFP Marielle Hauchecorne, sa cosecrétaire nationale. 

"On est face à une dérive autoritaire, qui relève de la communication dans un contexte électoral", a-t-elle encore commenté. Pour elle, le gouvernement mène "une course à l'échalote avec l'extrême droite".

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