André Flajolet : "Notre rôle, c'est d'être la mouche du coche."

André Flajolet a repris il y a quelques mois la présidence de l’Association des maires du Pas-de-Calais. Succédant à Jean-François Rapin qui a démissionné pour prendre un siège au Sénat, il a été élu pour trois ans, jusqu’à la fin du mandat de son prédécesseur. Petit tour d’horizon des dossiers qui vont occuper la fin du mandat.

La Gazette. Comment s’est déroulée votre accession à la tête de l’association ?

André Flajolet. Je suis maire de Saint-Venant depuis 1989 et, depuis lors, membre de l’AMF 62. J’occupe également des responsabilités au sein de la direction nationale de l’Association, à Paris, où je suis président de la commission développement durable. Après les dernières élections municipales, la majorité parmi les maires du secteur a changé, il y a donc eu une alternance au sein de la gouvernance de l’Association pour en tenir compte. Nous nous partageons toujours les responsabilités équitablement. Le PS a donc repris le secrétariat général et Les Républicains, la trésorerie et la présidence. L’association est gérée par 18 maires plutôt marqués à gauche, et 19 plutôt ancrés à droite. Après la démission de Jean-François Rapin, j’ai été sollicité pour reprendre son mandat. Je dois dire que je n’étais pas forcément candidat, ayant déjà un certain nombre de responsabilités au niveau national, qui entraînent beaucoup de déplacements.  Il y a également eu quelques résistances à mon élection, notamment parce que les gens me connaissent et savent que je ne vais pas être un président de façade. Je prends toujours à cœur les dossiers, même ceux qui peuvent être embêtants pour les élus. Mais aujourd’hui la priorité c’est d’aller de l’avant, dans le respect mutuel.

Et quels sont les gros dossiers qui vous attendent en cette rentrée ?

Ma première mission, c’est bien sûr l’organisation de notre congrès annuel. Il va s’articuler cette année autour de quatre points fondamentaux, à commencer par la révision des statuts de l’Association, qui comptent trop de points approximatifs, il va falloir préciser les textes. Un grand débat est également prévu sur la question du devenir des communes, entre les difficultés financières et la baisse des dotations de l’Etat. Toujours dans l’actualité, nous aurons un point très précis sur les compteurs Linky. Certaines communes ont pris des arrêtés illégaux, nous aurons donc une mise au point technique et scientifique sur ces compteurs intelligents, ainsi que sur les libertés individuelles. La question de la couverture numérique du Pas-de-Calais sera également un sujet important. Beaucoup de communes souffrent d’un handicap considérable et sont prêtes à payer pour accélérer le mouvement. Il faut réfléchir aux solutions qui s’offrent à elles.

De nombreuses communes du Pas-de-Calais ont été touchées par de graves inondations au printemps. C’est un sujet qui sera également au cœur du débat ?

En marge du congrès, il y aura en effet deux temps forts avec la préfecture sur le sujet des inondations. Tout d’abord une réunion de travail entre tous les maires qui ont été concernés par les dernières inondations. Elle sera suivie d’une réflexion, en présence de tous les acteurs, la Dréal, l’Agence de l’eau, la Région et l’Etat, sur la prévention des risques et les droits et devoirs de chacun. Il est légitime de se demander si, dans les territoires concernés, les lois de la République ont été bien appliquées. Il reste notamment beaucoup à faire pour que soient pleinement appliquées les lois de 1992 et 2006 sur la gestion de l’eau et de l’érosion des sols. Cet échange sera aussi l’occasion de sensibiliser encore davantage à la réalité du changement climatique et aux risques encourus à court, moyen et long termes. Et de rappeler que la gestion de l’eau s’envisage aussi sous l’angle de la sécurité : il s’agit aussi de garantir la sécurité sanitaire de l’eau potable, d’assurer la défense incendie et garantir la bonne interconnexion des réseaux.

A titre personnel, ces questions liées à l’eau vous passionnent tout particulièrement ?

J’ai toujours eu une sensibilité sur ces questions, renforcée par les dramatiques inondations survenues il y a quinze ans, au cours desquelles les deux tiers  de Saint-Venant avaient dû être évacués. En tant que député, j’ai été concerné aussi, à de multiples reprises, par mes différentes missions (voir encadré ci-dessous, ndlr). Le moins que l’on puisse dire, c’est que ce ne sont pas des questions neuves, et nous y sommes confrontés régulièrement. Il faut faire preuve d’humilité dans nos démarches : la plupart des textes qui pourraient permettre une évolution de la situation existent déjà. Mais, d’une part il manque souvent des décrets pour permettre une application effective de la loi et, de l’autre côté, la volonté politique des élus n’est pas toujours au rendez-vous.

Et c’est alors que vous aurez un rôle à jouer ?

Notre rôle, c’est bien sûr de représenter tous les maires et tous les présidents d’intercommunalités, quelle que soit leur taille. Mais nous ne sommes pas là pour être simplement une caisse de résonance à leurs doléances et leurs attentes. Notre mission, c’est aussi de leur rappeler qu’il existe des textes, qu’il faut appliquer. En ce moment, par exemple, les sujets qui m’intéressent, c’est le respect de la réglementation sur les aires d’accueil des gens du voyage dans les communes, les questions de couverture numérique du territoire et la mise en place de la sécurité dans les écoles pour la rentrée. Des sujets de crispation chez beaucoup d’élus. Mais l’Association a bien sûr un rôle d’interface, de facilitateur, mais elle est aussi là pour rappeler les obligations de chacun face à la loi. Nous sommes un peu la mouche du coche, du côté des élus comme du côté de l’Etat. C’est un rôle nécessaire, mais plutôt ingrat. Il y a beaucoup de coups à prendre.

ENCADRE

André Flajolet en quelques dates

Depuis 1989 : maire de Saint-Venant

De 1985 à 2001 : conseiller général du canton de Lillers

De 1982 à 2015 : conseiller régional Nord − Pas-de-Calais, président de la commission agriculture et pêche

De 2002 à 2012 : député de la9e circonscription du Pas-de-Calais

En tant que député, André Flajolet fut :

Membre de la commission des affaires économiques puis de la commission du développement durable

Rapporteur de la DCE (Directive-cadre de l’eau), traduction en droit français 2004

Rapporteur de la loi sur l’eau et les milieux aquatiques en 2006

Il a également été :

Président du Conseil national de l’eau (ministère de l’Ecologie)

Président Ecophyto, commission rattachée au ministère de l’Agriculture

Coprésident de la commission mixte inondation (ministère de l’Ecologie et du Développement durable)

Représentant du Gouvernement pour le Forum mondial de l’eau à Marseille en 2012