Altereos, l’alliance de l’économie et de la solidarité

L’entreprise adaptée Altereos a une grande importance dans le tissu local de Tourcoing et de la Métropole lilloise, depuis sa création en 1991. Elle accentue sa présence dans le domaine de l’économie sociale et solidaire en se diversifiant toujours plus et en redonnant une chance à ceux qui en ont manqué.

Béatrice Régnier, la présidente du directoire d'Altereos basée à Tourcoing. ©Léna Heleta
Béatrice Régnier, la présidente du directoire d'Altereos basée à Tourcoing. ©Léna Heleta

Si les entreprises adaptées des Hauts-de-France étaient une flotte, Altereos en serait le vaisseau amiral. Implantée à Tourcoing depuis 1991, «elle a été créée sous les anciens formats d’ateliers protégés, sur deux marchés locaux principaux : le centre de tri de reconditionnement et centre d’appel, qui sont nos activités historiques», rappelle la présidente du directoire Béatrice Régnier. Altereos s’est ensuite développé sur la numérisation de documents, ce qui a ensuite permis d’étoffer les propositions, avec une entreprise d’insertion, un ESAT, de l'intérim et un centre de formation. Au total, Altereos travaille avec 80 clients, aussi bien privés que publics, à l’instar du département, de la MDPH, d’EDF, ou encore de la SNCF depuis peu, pour la gestion des réclamations et accompagnement des personnes à mobilité réduite.

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Cela fait que 34 ans plus tard, 340 personnes travaillent au sein de la société dont 82% en CDI. 75 % d’entre elles sont en situation de handicap. De plus, «nous offrons des parcours d’accompagnement et d’inclusion, et la moitié des salariés ont de plus de 50 ans», sourie Béatrice Régnier. C’est d’autant plus important pour la présidente du directoire qu’il est parfois plus compliqué de trouver un emploi au-delà de 50 ans, notamment à cause de problèmes de santé ou d’un handicap, comme le souligne l’Insee en 2023. En outre, en ce qui concerne les personnes en situation de handicap, il est parfois compliqué de postuler et de s’intégrer dans une entreprise plus classique. «Nous sommes parfois face à des personnes qui ont du mal à exprimer leurs talents donc le management adaptatif et individualisé qui doit être mis ne place et ce doit être une volonté qui doit venir de la direction de l’entreprise. À la fin, les résultats sont les mêmes, c’est juste que l’accompagnement doit être plus individualisé et il faut se donner le temps.»

Former et accompagner, sans oublier de travailler

Car là est la difficulté. En plus d’un handicap physique, ce dernier peut devenir un handicap social avec un sentiment d’isolement, que le travail vient combler car ce dernier fait partie de la vie sociale. «Quand j’ai un travail, je fais partie de la société, je suis rémunéré, je suis autonome», fait remarquer Béatrice Régnier, et cette autonomie débute dès la formation, dans le propre centre d’Altereos. L’entreprise préfère avoir son propre centre de formation afin de gérer elle-même le grand nombre de formations différentes, en lien avec le développement constant de ses activités en tant que prestataire de service pour diverses sociétés. Surtout, les modèles de formation sont adaptés en fonction des besoins professionnels, mais également personnels, avec l’aide de trois formateurs, qui «intègrent comment se remettre à l’emploi ou quels sont les codes de l’emploi. On doit garder l’exigence et elle fait partie du travail, mais on doit aussi y mettre la bienveillance».

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Altereos reste une entreprise, avec un chiffre d’affaires compris entre 6 et 6,5 millions d’euros sur les dernières années, et se doit d’être aussi «qualitatif et efficient» qu’une entreprise classique et «à la fin, les comptes doivent être dans le positif». Et c’est dans cette partie économique que réside la difficulté puisque les aides reçues sont là pour compenser les impacts du handicap, et non pas pour faire vivre l’entreprise. Le modèle économique doit donc être similaire à celui d’une entreprise classique, ce qui «n’est pas simple culturellement puisque nous sommes sur des profils développant une bienveillance à outrance, et il faut réussir à trouver le juste équilibre avec l’exigence», ajoute la présidente du directoire. L’exigence d’Altereos se retrouve au niveau de la RSE en général, où une vraie démarche a été lancée, au-delà du sociétal où l’entreprise «n’a plus grand-chose à prouver», sur les économies d’énergie et les mobilités douces «pour avoir le 360 degrés» sur ce sujet. En outre, Altereos est contacté par de nombreuses autres sociétés pour les accompagner autour de ces démarches, et en particulier sur les fameux 6% de salariés en situation de handicap, qui ne sont pas forcément simple à atteindre pour certaines entités.

«J'ai repris confiance en moi progressivement» 

Que ce soit dans les formations ou dans l’activité en général, les entreprises adaptées doivent travailler et baser leur gestion sur la personne qu’elles ont en face d’elles, et Altereos ne fait pas exception. L’exemple le plus parlant est celui de Delphine, arrivée en 2022 après des moments difficiles, dont du harcèlement moral au sein de son ancien emploi, qui lui «avait fait perdre toute confiance». Une perte de confiance en elle qui l’a gardée isolée pendant «un an et demi, où je ne sortais plus de chez moi». Après un passage au sein de la filiale insertion d’Altereos pour reprendre progressivement un travail en tant que couturière, qui était sa formation initiale, Delphine a «repris confiance en elle progressivement» jusqu’à devenir superviseuse sur le marché EOS, alors qu’à la suite du harcèlement moral subi, elle n’était «plus capable d’utiliser un simple ordinateur». Pour y parvenir, l’entreprise a identifié «ses freins et a travaillé dessus», mais a aussi laissé Delphine se déterminer et se relancer professionnellement.

Quelques chiffres

- 6 millions d’euros de chiffre d’affaires

- 340 salariés, dont 75% en situation de handicap

- 80 clients, dont les collectivités et la SNCF