Alambic Bourguignon, la belle endormie de Mathieu Sabbagh
Après une vingtaine d’années à occuper des postes à responsabilités, Mathieu Sabbagh, amoureux des spiritueux anciens, a repris une distillerie à Beaune. Récit d’un parcours atypique.
« Je cherchais une belle endormie ». La reprise, en 2018, de la distillerie beaunoise Pigneret - rebaptisée Alambic Bourguignon - par Mathieu Sabbagh a des allures de contes de fée. Mais l’aventure cache aussi une détermination et un investissement sans faille.
Deux vies professionnelles pour un même homme
Mathieu Sabbagh est aujourd’hui distillateur et bouilleur ambulant. Une fois passés dans ses alambics, les marcs et les lies de vin distillés se transforment en eaux de vie de Bourgogne, richesses du terroir. Mais avant de mener une vie d’artisan, l’homme a passé une vingtaine d’années à des postes à responsabilité dans des multinationales. A l’époque, il voyage, s’expatrie même, sur plusieurs continents. Directeur international de Pernod, il œuvre à développer les spiritueux français oubliés comme l’absinthe. « J’ai toujours été passionné par les spiritueux. Déjà, lorsque j’ai été barman à Londres, pendant mes études ! » se souvient-il.
Un jour l’envie de mettre à profit son expérience pour son propre compte se fait sentir. « Je voulais utiliser mon savoir -faire pour rénover une vieille marque, même si c’est plus facile de créer. » Il se met à la recherche d’une distillerie au riche passé dont il pourra préserver l’histoire. « Au début du XXe siècle, il y en avait plus de 2000. Aujourd’hui on en compte entre 100 et 200… » fait remarquer le distillateur. Les surprises ne sont pas rares : « J’ai découvert que certains se disent distillateurs sans posséder d’alambic ! »
Sans successeur
Et puis c’est la découverte « de la belle endormie » tant attendue, la distillerie Pigneret, créée en 1941. « Éric et Joseph Pigneret, la troisième génération, n’avaient pas de successeur » explique Mathieu Sabbagh qui perçoit rapidement le potentiel de l’entreprise. Pendant une année, Paul de Vaucorbeil, son associé, et lui travaillent aux côtés des cédants sans rien changer, pour apprendre le métier.
C’est au cours de la seconde année, que l’entrepreneur met « sa patte ». S’il travaille pour des viticulteurs, il produit et met aussi en bouteille sous sa propre marque : « Sab’s ». Rien n’est laissé au hasard, du nom au contenant, aux allures de flacons anciens de pharmacie, « un clin d’oeil à l’époque où certains spiritueux étaient perçus comme ayant un côté médicinal ».
Malgré le mouvement des gilets jaunes et la crise sanitaire qui sont venus troubler fortement les plans prévisionnels, les résultats sont prometteurs. Des apprentis devraient rejoindre l’équipe actuelle qui compte deux salariés et des investissements sont programmés. La distillerie semble définitivement tirée de son sommeil…
Pour Aletheia Press, Laetitia Brémont