Agressions sexuelles: six mois avec sursis requis contre Franck Lavier, acquitté d'Outreau

Six mois avec sursis ont été requis vendredi contre Franck Lavier, acquitté d'Outreau, pour des agressions sexuelles contre sa fille, alors qu'elle était mineure, en dépit des  rétractations de cette...

Franck Lavier à Rennes, le 1er juin 2015 © DAMIEN MEYER
Franck Lavier à Rennes, le 1er juin 2015 © DAMIEN MEYER

Six mois avec sursis ont été requis vendredi contre Franck Lavier, acquitté d'Outreau, pour des agressions sexuelles contre sa fille, alors qu'elle était mineure, en dépit des  rétractations de cette dernière sur l'essentiel de ses accusations.

Le procureur de Boulogne-sur-Mer, Patrick Leleu, considère que Franck Lavier est coupable d'"agression sexuelle par ascendant" pour des attouchements sur les seins de sa fille, alors adolescente, ce que lui considérait comme un "jeu" sans gravité.

Il s'agit du seul fait retenu par l'accusation, la fille de Franck Lavier étant revenue à l'audience sur l'ensemble des autres accusations formulées depuis sept ans contre son père.

"Il vient vous dire ce n’est pas sexuel, moi je vous dis c’est sexuel et c’est une transgression". "Il impose un attouchement sexuel auquel la victime ne consent pas", considère le procureur.

A l'audience devant le tribunal correctionnel de Boulogne-sur-Mer (Pas-de-Calais), la jeune femme, une mère de quatre enfants aujourd'hui âgée de 24 ans, avait considéré qu'il s'agissait d'"un jeu, en passant, +pouet pouet+", mais qui la mettait mal à l'aise.

Franck Lavier précise que ces gestes n'étaient pas "quotidiens, pas 10.000 fois par jour". "C'est comme si on s'embrassait sur les joues ?", lui suggère son avocate. "C'est pareil", dit-il.

Terrible enfance

"Je n'ai rien à me reprocher", avait lancé en début d'audience cet homme de 45 ans, avant le coup de théâtre à la mi-journée des rétractations de sa fille. 

"Il ne s'est rien passé de ce que j'ai dit à ma déposition", a-t-elle fini par avouer après trois heures d'audition où elle a alterné entre hésitations, sanglots et trous de mémoire.

- "Il n'est jamais venu dans votre chambre le soir ?", lui demande le président.

- "Non", répond-elle.

- "Il ne vous a jamais léché le sexe ?"

- "Non."

- "Il ne vous a jamais mis un doigt dans votre sexe ?"

- "Non."

Elle affirme avoir menti pendant tant d'années par crainte "des conséquences pour fausses déclarations".

L'affaire remonte à 2016 quand, âgée de 16 ans, elle confie à la CPE de son lycée un courrier dans lequel elle évoque "un truc grave". La justice est saisie. Puis l'adolescente assure en audition avoir été victime d'attouchements depuis début 2015. Le parquet ordonne son placement provisoire. Franck Lavier est placé sous contrôle judiciaire.

Si elle a écrit ce premier courrier, intitulé "Terrible enfance", c'est parce qu'elle se sentait "mal dans (sa) peau", dit-elle.

Famille cassée

Elle raconte une vie "compliquée", marquée par son placement à même pas deux ans, quand ses parents sont injustement emportés par l'affaire Outreau. Elle ne les retrouvera qu'à l'âge de six ans. Le harcèlement à l'école, ensuite: "On m'appelait l'Affaire Outreau."

"Elle cherchait par tous les moyens à fuir cette famille" où "elle n'a jamais trouvé sa place", analyse l'avocate de Franck Lavier, Me Fabienne Roy-Nansion.

Elle et son petit frère ont d'ailleurs subi la maltraitance de leurs parents, tous deux condamnés en 2012 à dix et huit mois de prison avec sursis pour violences habituelles.

Franck et Sandrine Lavier, divorcés mais qui vivent ensemble, font partie des accusés d'Outreau. Lui a été condamné en 2004 à six ans de prison pour le viol de sa belle-fille par la cour d'assises du Pas-de-Calais, puis acquitté l'année suivante par la cour d'appel de Paris. Il a passé en tout 36 mois de prison.

L'affaire de viols d'enfants d'Outreau, qui avait entraîné de longues incarcérations pour des innocents, a abouti à un fiasco judiciaire. Après deux procès aux assises en 2004 et 2005, 13 des 17 accusés ont été acquittés.

L'affaire "a marqué de manière indélébile" la vie de Franck Lavier, a convenu le procureur Patrick Leleu. "Dans cette famille tout le monde est cassé".

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