À Roye, la ministre de l’Agriculture fait la promotion de l’agroécologie

À l’occasion du lancement d’un budget de 90 millions d’euros, destiné à accompagner les acteurs engagés dans la réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires, Annie Genevard, ministre de l’Agriculture a visité la sucrerie de Roye.

François Verhaeghe a fait visiter le site de Roye à Annie Genevard et Bruno Bonnell. © Aletheia Press / DLP
François Verhaeghe a fait visiter le site de Roye à Annie Genevard et Bruno Bonnell. © Aletheia Press / DLP

Ce jeudi 10 avril, la sucrerie Saint-Louis de Roye a reçu une visite d’importance. Annie Genevard, ministre de l’Agriculture, et Bruno Bonnell, secrétaire général pour l’Investissement, chargé de France 2030, étaient sur place pour lancer l’Appel à manifestation d’intérêt (Ami), destiné à réduire l’utilisation des produits phytosanitaires. Doté de 90 millions d’euros, ce dispositif - nommé Praam pour «prise de risque amont-aval et massification de pratiques visant à réduire l’usage des produits phytopharmaceutiques» - doit concrètement à aider les agriculteurs à produire autrement tout en restant compétitifs.

«Je pense que la ferme du futur saura à la fois ne pas oublier l’agronomie, c’est-à-dire la science agricole traditionnelle, tout en utilisant les technologies les plus innovantes», souligne Annie Genevard. De son côté, Bruno Bonnell insiste sur la nécessité pour les acteurs du secteur à engager des partenariats. «Ce que nous cherchons avec le Praam, c’est aussi l’association d’une chaîne de valeur complète, qui sécurisera la prise de risque», pointe-t-il.

Encourager les changements de pratiques

Au sein de l’usine Saint Louis Sucre de Roye, cette alliance entre compétitivité et durabilité est une réalité depuis dix ans. «Lorsqu’un planteur sème dix hectares de betteraves, sur cinq d’entre eux, il poursuit son itinéraire technique conventionnel. Sur les cinq autres, il met en place une approche innovante. Nous comparons les deux, et si le rendement issu des pratiques innovantes est inférieur, Saint Louis Sucre compense les pertes de revenus», explique Thomas Nuytten, directeur betteravier chez Saint Louis Sucre.

Une méthode qui a permis de rassembler 300 planteurs volontaires en 2025. Le Praam, auquel la sucrerie de Roye souhaite candidater, pourrait accompagner financièrement les phases de transition, mais aussi permettre d’expérimenter des pratiques et des outils. «La technologie va rendre l’agriculture plus compétitive, mais aujourd’hui, les agriculteurs n’ont pas la capacité d’investir dans ces matériels», souligne Thomas Nuytten.

Agroécologie et rentabilité

Si Benoît Guilbert, planteur pour Saint Louis Sucre, a changé ses pratiques, il se questionne sur la reconnaissance économique de ce choix. «Je pense être un bon exemple de transition réussie sur une exploitation. J’ai repris la ferme de mes parents, qui fonctionnait de manière plutôt classique et j’ai fait évoluer ma façon de faire», dit-il. Aujourd’hui, il parvient à produire des betteraves de qualité avec un rendement conforme aux attentes de la sucrerie de Roye, tout en réduisant l’usage de produits phytosanitaires et en limitant le travail du sol.

«A un moment donné, il faut quand même parler rentabilité. Moi, je suis prêt à aller encore plus loin, mais est-ce que mes produits vont prendre de la valeur parce que je les produis différemment ?», demande-t-il aux dirigeants présents. Annie Genevard réagit : «Le sucre est un actif stratégique. Pas seulement pour les acteurs de la transformation ou le sucre de bouche, mais aussi pour de nombreuses filières industrielles». La ministre se veut donc rassurante : «Cette culture est l’un des fleurons de notre agriculture. Cette déclinaison du plan France 2030 constitue une vraie réponse à ces enjeux».

La sucrerie de Roye

Créée en 1831, Saint-Louis Sucre est actuellement le troisième producteur de sucre en France et le premier exportateur mondial de sucre en morceaux. Une activité menée notamment depuis Roye, où l’outil industriel a été considérablement modernisé il y a une quinzaine d’années. «Un site de production comme celui-ci mobilise près de 15 000 planteurs et engendre une rotation de 500 camions pendant la période de campagne. Sur celle-ci, elle fonctionne 7 jours sur 7, 24 heures sur 24», détaille François Verhaeghe, président de Saint-Louis Sucre. Il souligne par ailleurs l’importance d’une grande fluidité entre le territoire agricole et la transformation. 

Très automatisée, l’unité de Roye, qui compte 15 lignes de production et 210 salariés, produit en moyenne 275 000 tonnes de sucre par an. «La production est destinée à la grande distribution, à la restauration hors domicile, aux industries agroalimentaires et à l’export», précise-t-il. Depuis 2018, le site est alimenté au gaz. «C’est un exercice d’investissement permanent pour réduire les coûts et contribuer à la décarbonation», souligne François Verhaeghe. Saint-Louis Sucre ambitionne de réduire ses émissions de dioxyde de carbone de 50 % d’ici 2030, avec pour objectif d’atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050.