2012, quelles perspectivespour les TPE ?

L’Union régionale des organismes de gestion agréés organise, le jeudi 5 avril à Lens, une conférence donnée par Elie Cohen sur la crise économique et les TPE. Entretien avec Yves Granier, directeur du CGA des Hauts de France, sur cette initiative et l’actualité des Centres de gestion.

Yves Granier, directeur du Centre de gestion agréé des Hauts de France.
Yves Granier, directeur du Centre de gestion agréé des Hauts de France.

 

Yves Granier, directeur du Centre de gestion agréé des Hauts de France.

Yves Granier, directeur du Centre de gestion agréé des Hauts de France.

La Gazette. L’actualité immédiate pour les Centres de gestion agréés de la région, c’est la conférence que donnera Elie Cohen le jeudi 5 avril à Lens. Pourquoi cette initiative ?
Yves Granier. Cette conférence est la quatrième du genre organisée pour les commerçants, artisans, professionnels libéraux et prestataires de service. Si les trois premières ont été le fait du Centre de gestion agréé des Hauts de France, celle-ci est la première pour la toute nouvelle Union régionale des organismes de gestion agréés. Toutes s’inscrivent dans un même fil conducteur, l’économie des TPE et la crise. La première conférence remonte à 2009 et a réuni 170 personnes intéressées par l’explication donnée par un professeur de l’Edhec sur la crise, alors essentiellement bancaire, à partir de l’analyse d’un bilan de banque. Dans la foulée, l’intervenant 2010 a été l’économiste Michel Godet, titulaire de la chaire de prospective stratégique au Conservatoire national des arts et métiers et membre du Conseil d’analyse économique, sur le thème “La crise porteuse d’avenir”, suivi en 2011 par Marc Touati, économiste, journaliste, directeur général de Global Equities et auteur en 2009 du livre Krach, boom… et demain, sur le thème “Perspectives économiques et financières 2011-2012 : après la crise, la reprise ?”.
Ce parcours, de la crise bancaire à la crise de la dette d’Etat, a rencontré l’adhésion. La crise est toujours un sujet d’actualité. Pour répondre à la question “Où en est-on maintenant ?”, le choix s’est porté cette année sur Elie Cohen, membre du Conseil d’analyse économique, directeur de recherche au CNRS et docteur en science politique. Le thème retenu “Les TPE et la crise économique en 2012” lui permettra non seulement de faire un retour sur la crise mondiale et les changements qu’elle a provoqués, notamment dans leur dimension européenne, mais aussi de faire part de son analyse sur le modèle France, les mesures à envisager, l’intérêt d’une relance, les recommandations à suivre et, au-delà, leur impact sur l’économie des entreprises, au premier rang desquelles les PME et TPE. Nous attendons quelque 250 à 300 personnes à Lens pour cette conférence 2012. Elles devraient trouver des éléments de réponse à leurs questionnements actuels.

Justement, quelles sont les perspectives pour les petites entreprises ?
Nous ne disposons pas encore du bilan 2011 car les données du quatrième trimestre 2011 sont encore en cours de traitement. L’Observatoire de la petite entreprise, émanation de la Fédération des centres de gestion agréés, en partenariat avec Banque populaire, faisait état d’une rechute pour le troisième trimestre avec une baisse à -1,4% du chiffre d’affaires sur un an. On peut espérer un meilleur sort pour le quatrième trimestre et même un rebond avec l’espoir que les chiffres de l’Insee se retrouvent au niveau des TPE.
Dans l’artisanat du bâtiment, les carnets de commandes se sont allégés et les perspectives demeurent incertaines, du fait notamment des avantages fiscaux revus à la baisse sur les économies d’énergie, les prêts à taux zéro. La tendance n’était guère meilleure dans l’équipement de la personne qui affichait le plus fort taux de recul d’activité au troisième trimestre 2011 à -9,1%. Un phénomène qui prend de l’ampleur est le retour en centre-ville du com-merce alimentaire de proximité, même si, le plus souvent, ce sont des enseignes qui prennent la place des indépendants.
Dans cette conjoncture difficile, nous nous efforçons d’expliquer à nos adhérents, commerçants, artisans, professionnels libéraux et prestataires de service, qu’il n’y a pas que les charges sociales. La qualité, les services comptent aussi pour aider à l’activité. La compétitivité, ce n’est pas que les prix. La conférence d’Elie Cohen est là pour leur apporter un plus.

Cette conférence est aussi la première de la toute nouvelle Union régionale…
De fait, les quatre Centres de gestion agréés de la région – Hauts de France à Tourcoing, Côte d’Opale à Boulognesur- Mer (Cegeco), Douaisis à Douai (CGAD) et Calais – Saint-Omer – ont créé à la mi-2011 l’Union régionale des organismes de gestion agréés Nord de France. L’idée originelle était de les fédérer pour présenter une offre commune de formations et d’informations dans une dimension régionale.
L’Union régionale représente quelque 9 000 adhérents sur les 25 000 entreprises individuelles que compte la région et est présidée par Jean- Pierre Fusil, armurier installé jusque l’an dernier à Calais et aujourd’hui acteur du e-commerce.
Par ailleurs, à l’initiative des Centres de Tourcoing et de Douai et avec le concours d’experts-comptables, a été créée l’Association de gestion agréée région Nord, avec l’idée d’augmenter l’offre de services à la clientèle des professions libérales. Cette association compte aujourd’hui quelque 200 adhérents, une taille minime certes par rapport aux structures existantes, mais que nous souhaitons voir se développer.

Quels sont les effets de la crise sur votre activité ?
La conjoncture étant ce qu’elle est – des dépôts de bilan en augmentation, des activités de plus en plus tendues –, les Centres de gestion agréés font le constat d’une baisse de leurs effectifs. Mais à ces raisons conjoncturelles, il faut en ajouter d’autres plus structurelles. La première est la fermeture en grand nombre de commerces traditionnels. Celles des boucheries-charcuteries et des cafés sont deux exemples d’activités en difficulté du fait des évolutions sociétales. La deuxième tient au développement du régime de l’auto-entrepreneur : 55 554 demandes sur les deux premiers mois de 2012, quelque 680 000 créations depuis son lancement au 1er janvier 2009, avec un effet retard au passage en régime réel qui porte sur trois ans. Une troisième explication est la mise en société du statut des entreprises. Beaucoup d’entrepreneurs qui étaient au régime fiscal des bénéfices industriels et commerciaux (BIC) choisissent de passer à l’impôt sur les sociétés pour notamment des raisons d’optimisation de la rémunération du dirigeant. Bon an, mal an, les effectifs des Centres de gestion agréés sont grignotés de quelques points sans que ce soit une spécificité régionale. Le Centre de gestion agréé des Hauts de France a ainsi compté jusqu’à 7 000 adhérents. Ils sont aujourd’hui 4 000.

Comment vivez-vous les récents statuts de l’autoentrepreneur et de l’EIRL ?
Le statut de l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée permet de protéger le patrimoine de l’entrepreneur en amplifiant son insaisissabilité par le biais du patrimoine d’affectation. Le statut de l’indépendant avec responsabilité limitée s’avère simple à la création et intéressant tant que les engagements bancaires, synonymes d’engagements personnels, ne sont pas élevés. Pour une entreprise classique, il permet un raisonnement d’entreprise en société. Si son régime fiscal normal est celui des BIC, le dirigeant peut opter pour l’IS.
Le statut de l’auto-entrepreneur permet de tester une idée, une activité, de prendre une seconde activité. C’est un bel outil, facile, simple et attirant par son absence de contraintes juridiques majeures. Il est une première approche avant un engagement plus poussé. Nous avons fait une offre d’adhésion pour les auto-entrepreneurs qui ont pour objectif de se développer pour les faire bénéficier de nos offres en termes de formation, de suivi de chiffre d’affaires, etc., avec une cotisation limitée à 120 € au lieu de 235 €. Seuls quelques dizaines d’auto-entrepreneurs y ont souscrit, tant le coût de la cotisation, non déductible pour eux, peut encore apparaître élevé. Le projet de permettre leur adhésion à partir de trois ans d’exercice, retiré de la dernière loi de finances, reste néanmoins d’actualité. On ne peut aussi que regretter les abus que génère la multiplication des statuts. A multiplier les statuts et les options, le législateur multiplie les risques de dérive.

Quel intérêt ont les chefs d’entreprise à adhérer à un Centre de gestion agréé ?
Adhérer à un Centre de gestion agréé apporte à ceux, commerçants, artisans, industriels, prestataires de service, exerçant une activité relevant de la catégorie des BIC, entre autres avantages, la non-application d’une majoration de 25% du bénéfice imposable, une réduction d’impôt pour frais d’adhésion et de comptabilité et, depuis 2010, une réduction du délai de reprise qui est la période sur laquelle l’administration peut effectuer un redressement fiscal, ramené de trois à deux ans et donc sur les vérifications fiscales effectuées en 2012 qui porteront sur 2010 et 2011. Cette réduction est la contrepartie de la mission de prévention fiscale des déclarations de TVA qui est ajoutée en 2010 à celle de prévention fiscale des BIC.
Au-delà, les entrepreneurs trouveront intérêt à l’assistance et à la surveillance collective à la gestion apportées par les Centres au moyen d’outils collectifs d’aide à la décision, du dossier de gestion personnalisé annuel avec commentaire mettant en évidence points forts et points faibles, ainsi qu’aux statistiques professionnelles, aux séances d’information et de formation, sur tout sujet, conçues spécialement pour les chefs d’entreprise et adaptées à leurs besoins…