Le chiffre de la semaine
+ 7,14 %
C'est l’augmentation du nombre de créations de micro-entreprises en Moselle de 2021 à 2022, selon les statistiques de l’Insee. Moins forte que les années précédentes, leur poussée traduit toutefois une mutation en profondeur du mode d'entreprendre. Elle dépasse le cercle de la seule création et interroge sur les profonds bouleversements sociétaux actuels, et, en corollaire, celle de la place du travail dans nos quotidiens.
7 146 micro-entreprises ont été créées en 2022 en Moselle, soit 207 de plus qu'en 2021. Si la micro-entreprise demeure la forme de création la plus utilisée dans le département (plus de 6 sur 10), le cru d’évolution 2022 de + 7,14 % est le plus bas observé depuis cinq ans. Depuis 2018, les données étaient chaque année sur une hausse conséquente : + 13,9 %, + 36 % + 26 %, + 30,8 %. Les premiers mois 2023 nous indiqueront si cette relative déclinaison est passagère ou s’inscrira dans le temps. Une chose est certaine : le salariat restera sans coup férir le modèle de travail dominant. Toutefois, et il faut prendre cette élément en compte, la jeune génération aspire tout particulièrement à être dans un rapport de prestation autre que ce salariat basé sur un contrat de travail qu’elle juge rigide par rapport à ses aspirations. De même, les jeunes diplômés fuient de plus en plus les contrats de travail qui impliquent une subordination : un phénomène structurel qui devrait se développer. Ils sont finalement assez en cohérence avec leur mode de fonctionnement général, entre consommation et hédoniste et le pousse dans les murs de l'entreprise. C'est un sacré changement de paradigme pour les dirigeants qui doivent décoder des comportements, des pratiques que n'avaient pas les générations de travailleurs antérieures.
Décomplexifier la création et la rendre durable
L’avènement de la micro-entreprise correspond sans doute à des règles du monde du travail du XXe siècle qui sont amenées à évoluer et à trouver leur place dans la loi, dans le Code du travail. C’est l’un des grands enjeux de l’actuelle réforme des retraites : un tiers seulement des seniors entre 60 et 64 ans est en activité en France, contre la moitié dans l’Union européenne. Les entreprises ont encore tendance à se séparer d’eux, les jugeant trop chers et moins performants. Cette situation concerne à partir de 47 ans et jusqu’à 65 ans. Avec l’allongement du temps de travail lié à la réforme des retraites, quelle place pour ces seniors pourtant très expérimentés ? Lesquels désirent être actifs, disposer de plus de temps libre, travailler avec plus de souplesse. Assurément, la micro-entreprise s’inscrit dans les défis technologique et numérique, également dans la transition écologique et énergétique. Quand on sait que 80 % des métiers de 2030 n’existent pas encore, elle peut répondre à ces mutations en profondeur de notre corpus sociétal et du monde du travail. N’est-elle pas un lien possible entre générations ? Quand le taux d’emploi des seniors (entre 55 et 64 ans) s’affiche à 56 % et celui des jeunes de 34 %, le régime de la micro-entreprise ne peut-il pas appareiller les deux bouts de la chaîne du travail, les seniors apportant leur expérience aux juniors. La loi interdit au micro-entrepreneur de retourner dans l’entreprise dans laquelle il travaillait. Instaurée autrefois pour éviter les abus, cette limitation semble bien obsolète. Pourquoi les indépendants ne pourraient-ils pas faire bénéficier de leur expérience à leur entreprise d’origine ? En tous les cas, du bon sens, de l’adaptabilité et de la flexibilité sont plus que jamais nécessaire pour optimiser aux maximum les potentialités de la micro-entreprise, comme pierre angulaire de notre process économique. Elle séduit des femmes et des hommes portés par un élan d’entreprendre. Il serait dommage de les brider par un excès et une lourdeur de règlements et administrative. Ce n'est pas là un mince enjeu.