Pour ces dix ans, le World Forum a réussi son pari d’être présent à Lille mais aussi à Paris et dans d’autres métropoles françaises. Une première pour cet événement de l’économie responsable. Et Philippe Vasseur, son fondateur, annonce que le World Forum va s’inviter dans le débat électoral.
Le concept du World Forum for a Responsable Economy a été créé en 2007 par Philippe Vasseur. «Nous militons pour une économie responsable, qui assure des performances en respectant davantage l’homme et l’environnement. Faire du profit, c’est bien, mais il faut réfléchir comment l’utiliser et le répartir. Nous allons chercher des bonnes pratiques pour montrer comment des entreprise responsables peuvent se développer. C’est un lieu d’échange et de présentation de bonnes pratiques.»
Du 10 au 14 octobre derniers, étaient attendus 5 000 participants : le monde universitaire, associatif, de l’entreprise, des collectivités. Les intervenants sont venus du monde entier : Olli Kangas de Finlande qui teste le revenu universel de base (voir encadré) ; Erica Huang de Chine, fondatrice de Farm to Neighbors, le premier marché de produits biologiques locaux à Pékin ;- Chris Kwekowe du Nigeria, cofondateur de Slatecube, facilitateur de l’emploi des jeunes en Afrique… Parmi les Français, sont intervenus Jean Duforest, cofondateur de ÏDKIDS, Bruno Lechevin, président de l’ADEME , Jean-Bernard Lévy, PDG d’EDF, ou encore François Villeroy de Galhau, gouverneur de la Banque de France sur l’intégration de critères RSE dans la cotation des entreprises.
Agiter les consciences. La thématique proposée était «L’entreprise, pour quoi faire ?». Les débats étaient variés : le revenu universel est-il une solution pour relancer l’emploi ? que penser de l’uberisation du travail, de l’arrivée de l’intelligence artificielle ou de l’entreprise collaborative ? «On va vers une nouvelle organisation de la société, il faut agiter les consciences», insiste Philippe Vasseur. Le World Forum, c’est aussi une grande boîte à outils pour toutes les structures qui souhaitent se lancer ou renforcer leur démarche RSE : comment s’orienter vers des achats responsables, vers davantage de bonheur au travail, comment organiser le télétravail…
Stratégie régionale de l’énergie. Durant ces trois jours, ce fut l’occasion de faire un point également sur REV3, la troisième révolution industrielle, lors d’une conférence de presse autour de Philippe Vasseur et Xavier Bertrand, président de la Région Hauts-de-France. On se souvient qu’elle avait été lancée lors du World forum 2013. Ont été annoncées la parution d’un ouvrage, La Vie Rev3 des Hauts-de-France, qui recense les différentes initiatives de la troisième révolution industrielle, la création d’une école de métiers dédiés à REV3 d’ici cinq ans et l’internationalisation de la démarche. Xavier Bertrand en a profité pour évoquer sa stratégie régionale de l’énergie, avec le soutien au nucléaire : «La centrale nucléaire de Gravelines ne sera finalement pas démantelée. Au contraire, 4 milliards y seront investis. J’espère que les entrepreneurs de la région en profiteront. À terme, la région sera candidate pour accueillir un EPR nouvelle génération.» Contre la poursuite du développement de l’éolien, Xavier Bertrand soutient davantage d’autres alternatives vertes : la biomasse, l’hydrogène, les panneaux solaires, l’hydrolien ou la méthanisation.
Un événement multisite. Durant le World Forum, des visites d’entreprises étaient proposées : Clayrton’s à Roubaix (lire article page 8), qui produit et distribue des emballages floraux, ou Durisotti à Sallaumines, constructeur carrossier. Des ateliers étaient organisés le temps du midi chez des restaurateurs comme Clément Marrot, le Flore ou l’Ecume des Mers à Lille. L’organisation était aussi dupliquée à Strasbourg, La Rochelle et Grenoble. «Nous prenons une dimension nouvelle, nous avons été sollicité par d’autres villes, cela montre l’intérêt du World Forum au niveau national. Et Paris a accueilli la plénière de clôture», précise Philippe Vasseur
Interpellation électorale. Depuis dix ans, le World Forum n’oublie pas non plus d’évaluer l’impact de l’événement sur le monde économique. Tous les deux ans, une enquête est réalisée par la CCI de Région pour le World Forum auprès d’entreprises sur leur perception de la RSE. Résultat : des progrès réguliers sont notés. De plus en plus d’entreprises intègrent la RSE dans leur fonctionnement. Même si beaucoup d’entre elles ne mesurent pas forcément la RSE, elles en font souvent, sans en avoir conscience.
Post World Forum, Philippe Vasseur annonce qu’il va interpeller les candidats à l’élection présidentielle. Pour leur dire quoi ? «Nous allons leur demander ce qu’ils vont faire pour rendre l’économie plus responsable, en matière de fiscalité, de formation, de recrutement de personnes avec handicap, pour inciter les entreprises à intégrer le cercle vertueux de l’économie responsable. Il faut récompenser ceux qui font des efforts. Chaque candidat doit prendre position dans ce domaine.» En attendant, on peut retrouver les 1 000 bonnes pratiques présentées par le World Forum for a Responsible Economy sur le site www.bipiz.org
Olli Kangas teste le revenu universel de base en Finlande.
Le revenu universel de base, une bonne idée pour relancer l’emploi ?
Le Conseil national du numérique l’a recommandé parmi ses 20 propositions pour relancer l’emploi en janvier 2016. À l’heure du débat électoral français, certains candidats en ont fait une des mesures de leur programme. Des économistes nordistes travaillent sur ce sujet. C’est pourquoi Olli Kangas, directeur du département recherche de Kela en Finlande, institution gouvernementale de l’assurance sociale, était invité au World Forum pour en parler. Il va tester le revenu universel de base dans son pays : «Nous allons essayer de tester le concept du revenu universel de base sur un groupe de 2 000 personnes au chômage, début 2017. Chacun touchera 560 euros net. L’objectif est de voir si cela permet de les inciter à revenir plus rapidement sur le marché du travail. Le concept du revenu universel de base est un montant alloué garanti, sans condition de ressources. L’objectif est de donner plus de confiance pour entreprendre. Dans le système actuel, tout nouvel entrepreneur perd ses allocations sociales, ce qui peut freiner. Ce concept est en cours de test aux Pays-Bas, en Californie, au Canada et dans certains pays africains.»