Territoires

Violences contre les élus locaux : des dispositions plus protectrices

Menaces, injures, harcèlement, agressions... De nouvelles mesures sont récemment entrées en vigueur pour mieux protéger les élus locaux contre ces violences et mieux les accompagner quand ils en sont victimes. Tour d’horizon.

(© Adobe Stock)
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C’est un constat très préoccupant que dresse l’édition 2023 de l’enquête du Centre de recherches politiques de Sciences Po (CEVIPOF), réalisée pour l’Association des maires de France. 69% des maires interrogés dans le cadre de cette étude ont en effet déclaré avoir déjà été victimes d’incivilités (+16 points, par rapport à 2020), 39% ont dit avoir subi des injures et des insultes (+10 points), 41% avoir fait l’objet de menaces verbales ou écrites (+13 points) et 7% avoir subi des violences physiques (+2 points). Si cette hausse des violences concerne tous les élus locaux, ce sont les maires qui sont, de loin, les plus souvent visés, même si les autres conseillers municipaux en sont également victimes. Une situation qui se traduit clairement dans les données du ministère de l’Intérieur : un peu plus de 2 250 plaintes ou signalements pour des faits de violence verbale ou physique à l’encontre d’élus ont été enregistrés en 2022, ce qui représente une augmentation de 32% par rapport à l’année précédente. Une tendance à la hausse qui s’est confirmée en 2023.

Sanctions renforcées et nouvelles circonstance aggravantes

Pour mieux protéger les élus contre ces violences et mieux les accompagner quand ils en sont victimes, la loi du 21 mars 2024 renforçant la sécurité et la protection des maires et des élus locaux prévoit une série de mesures qui viennent concrétiser une partie des objectifs du Plan national de prévention et de lutte contre les violences aux élus, présenté par le gouvernement en juillet 2023. Le texte vient tout d’abord aggraver les sanctions en cas d’agressions contre des élus locaux ou nationaux, contre leurs proches, ou d’anciens élus (jusqu’à six ans après le mandat), en alignant les peines encourues sur celles prévues pour les violences à l’encontre des agents des forces de sécurité. Il prévoit aussi une peine de travail d’intérêt général (TIG) pour compléter les sanctions applicables en cas d’injures, d’outrages ou de diffamation publique, ainsi qu’une nouvelle circonstance aggravante en cas de harcèlement moral, notamment en ligne, et un renforcement de la sanction prévue en cas d’atteintes dangereuses aux biens commises au préjudice de tous les élus (à l’encontre des permanences parlementaires, par exemple).

Une meilleure prise en charge des victimes

Pour améliorer la prise en charge des maires ou des adjoints, des anciens maires ou anciens adjoints, des présidents et vice-présidents des conseils régionaux et départementaux victimes de violences, de menaces ou d’outrages en lien avec leurs fonctions, la loi rend désormais automatique l’octroi de mesures de protection et d’assistance, dès que ces derniers en font la demande, sans nécessiter de décision préalable du conseil municipal, départemental ou régional. L’octroi de cette protection fonctionnelle est élargi aux candidats aux élections et peut prévoir, sous certaines conditions, le remboursement par l'État des frais de sécurité engagés par les candidats, pendant la campagne électorale. Et si au moins deux compagnies refusent d’assurer les locaux de leurs permanences électorales, les candidats ou élus nationaux ou locaux pourront saisir le Bureau central de la tarification (autorité administrative chargée de garantir l’obligation d’assurance).

Une protection qui devrait être étendue à tous les élus locaux

Un autre texte en cours de discussion au Parlement devrait venir élargir le champ d’application de cette protection très prochainement. En effet, la proposition de loi portant création d’un statut de l’élu local (Cf encadré), adoptée par le Sénat le 7 mars dernier, prévoit d’étendre l’octroi automatique de la protection fonctionnelle à tous les élus locaux victimes de violences, d’outrages ou de menaces, et non pas seulement aux seuls exécutifs locaux. Elle entend également aligner le régime de responsabilité des communes, en cas d'accident des conseillers municipaux sur celui des maires et de leurs adjoints.

Renforcer l’information des maires par les procureurs

Enfin, pour améliorer l’information des maires sur le traitement judiciaire des infractions commises à l’encontre des élus, la loi du 21 mars 2024 renforçant la sécurité et la protection des maires et des élus locaux prévoit de généraliser la signature de conventions entre associations d’élus locaux, préfets et procureurs – des conventions de ce type existent déjà dans certains départements.

Miren LARTIGUE

Créer un véritable « statut » de l'élu local

En cours d’examen devant le Parlement, la proposition de loi portant création d'un statut de l'élu local prévoit toute une série de mesures visant à favoriser l’engagement local, améliorer les indemnités et les conditions d’exercice des mandats et faciliter la reconversion des élus.

Le texte propose de porter à 20 jours (contre 10) la durée du congé électif pour les salariés candidats à une élection locale ou au Parlement européen, de rehausser le plafond et de modifier le mode de calcul des indemnités de fonction des maires, de leurs adjointset des conseillers municipaux, et de faciliter la prise en charge de certains frais de transports ou de représentation. Il est également proposé de porter le congé de formation des élus locaux de 18 à 24 jours et de créer un statut de l’élu étudiant.

Pour favoriser une meilleure conciliation entre l’exercice d’un mandat et la poursuite d’une activité professionnelle, la proposition de loi prévoit, notamment, de faciliter le recours aux autorisations d’absence, de rehausser le plafond de remboursement des pertes de revenus subies du fait de ces absences, de mieux prendre en charge les frais de garde d’enfant et d’assistance aux personnes âgées ou handicapées engagés, de faciliter le cumul des indemnités journalières et de fonction en cas d’arrêt de travail, de permettre le cumul de ces indemnités en cas de congé maternité, paternité ou adoption. Ou encore, d’offrir la possibilité pour les élus salariés d’obtenir la suspension temporaire de leur contrat de travail pour exercer l'intérim du maire ou du président du conseil départemental ou régional.

Enfin, plusieurs dispositions visent à mieux valoriser les compétences et les connaissances acquises par les élus locaux au cours de leur mandat et mieux accompagner la sortie de mandat.