Entrepreneuriat : vers un décrochage d’intérêt chez les jeunes générations ?
L’esprit d’entreprise est-il toujours là chez les jeunes générations ? Dans le contexte actuel où plusieurs incertitudes et craintes apparaissent, certaines enquêtes récentes mettent en avant que les millenials (18-34 ans) seraient beaucoup moins enclins à se lancer dans l’aventure entrepreneuriale. Situation à l’instant T ou véritable tendance à long terme et notamment dans la région ?
44 % des millenials (18-34 ans), presque un jeune sur deux, refuserait aujourd’hui d’être indépendant en étant leur propre patron ! Constat établi par une récente enquête de la plateforme de recherche d’emploi Monster et de l’Institut YouGov. Le contexte économique actuel, avec notamment l’annonce quasi certaine pour la fin de l’année d’une récession, ou encore les difficultés sociales qui s’annoncent semblent faire pencher la balance vers une recherche de sécurité et non plus d’une soif d’indépendance que l’aventure entrepreneuriale peut offrir. «En période de crise, les avantages sociaux (droit au chômage, retraite) ont toute leur importance aux yeux des travailleurs et le salariat reste une sécurité. L’inflation, la guerre en Ukraine sont des événements qui rendent le contexte économique déstabilisant, notamment pour les jeunes», analyse Marie Lindenmeyer, responsable éditoriale pour Monster France. À en croire cette enquête, l’indépendance ne ferait plus rêver la génération Y. 18 % des millenials interrogés assurent ne pas se sentir capables d’être leur propre patron et, dans la même proportion, ils préfèrent demeurer salariés. «Chez les jeunes, les femmes sont encore moins nombreuses à se voir en tant que dirigeante d’entreprise. 50 % ne l’imaginent pas contre 33 % des hommes.» Une prise de température à l’instant T (l’enquête date de fin septembre) qui interroge sur l’approche des jeunes par rapport à la création d’entreprise.
Équation plus que subtile
Cette donne soulève surtout la différence entre le désir d’entreprendre et le fait de franchir le cap de la création pure et dure d’une entreprise. Deux notions bien distinctes et notamment constatées en Lorraine. Le Peel (Pôle entrepreneuriat étudiant de Lorraine) a bien compris cette distinction qui aujourd’hui possède toute son importance. «Quand on parle d’entrepreneuriat, on pense toujours directement à la création d’entreprise. L’entreprise ne doit être que la conséquence d’un parcours et non pas une fin en soi. Donner l’esprit d’entreprendre ne se traduit pas forcément par une création d’entreprise. Nos étudiants qui s’engagent dans ce processus, sous le statut d’étudiant-entrepreneur, se confrontent surtout à la notion d’entrepreneuriat», assure Christophe Schmitt, titulaire de la Chaire Entreprendre à l’Université de Lorraine et responsable du Peel. Avoir l’esprit d’entreprendre ne se résume donc pas à la création d’entreprise. L’équation est donc beaucoup plus subtile, ce qui pourrait expliquer en partie le fait qu’aujourd’hui dans un climat conjoncturel tendu, une catégorie de jeunes issus de la génération Y préfèrent abattre la carte de la sécurité et non plus l’adrénaline et le risque de l’aventure entrepreneuriale. Reste que, toujours selon l’enquête de septembre de Monster et de l’Institut YouGov, 33 % des millenials entendent devenir indépendants et franchir le pas de la création d’entreprise. «Ils sont notamment motivés par la flexibilité et surtout de ne plus avoir à subir les décisions des autres.» En février dernier, le réseau France Active s’interrogeait également sur la perception de l’entrepreneuriat par les jeunes générations. D’après cette enquête, 47 % des jeunes de 18 à 30 ans souhaitaient créer leur entreprise. «La pandémie a eu un effet paradoxal sur la motivation à créer sa propre entreprise. D’un côté, elle a véritablement boosté l’envie d’entreprendre des jeunes mais elle a aussi renforcé les craintes et la conscience du risque que cela représente», assurait en février France Active. Si l’on compare les deux enquêtes de France Active en février dernier et celle de Monster et YouGov de septembre, on voit bien qu’un changement de donne apparaît s’opérer. Entreprendre, oui mais surtout d’une façon différente et surtout pour un but qui a du sens. La notion d’entreprises engagées fait résonnance chez les jeunes générations de potentiels entrepreneurs. 65 % d’entre eux entendent tout simplement faire bouger le monde notamment sous les aspects sociaux et environnementaux. Changer le monde, sans doute, mais s’en prendre trop de risques...
Les quinquas moins enclins également ?
Devenir son propre patron ! L’idée reçue est que cette notion est souvent présente chez les plus de 50 ans. D’après l’enquête de septembre dernier de la plateforme de recherche d’emploi Monster et de l’Institut YouGov, les choses pourraient changer. 37 % d’entre eux assurent ne pas vouloir devenir indépendants, et ce, pour les mêmes raisons que les millenials. Une tendance intergénérationnelle ?