Un site d’excellence entrepreneurial dédié aux produits frais
À l’image d’Euratechnologies et d’Eurasanté, Euralimentaire se veut être la référence en matière d’innovation entrepreneuriale dans le monde de l’alimentation et de la nutrition. Ce mois-ci, l’incubateur a ouvert ses portes en plein cœur du MIN de Lomme (Marché d’Intérêt National). Et déjà, les porteurs de projet se bousculent.
Le 24 mars dernier, le comité d’engagement d’Euralimentaire a sélectionné les six projets qui investiront ce lieu de 1 000 m2. Espaces de coworking, bureaux privatifs, cellules de préparation, stockage et logistique : l’incubateur sera un bon tremplin pour cette première promotion d’incubés qui a déjà commencé ses activités mais qui pourra désormais bénéficier d’un accompagnement et d’un appui logistique. Lancé en 2016 par la Métropole européenne de Lille et le MIN de Lomme, ce site d’excellence veut «booster la création d’entreprises et d’emplois dans le champ des produits frais sur le territoire métropolitain». À horizon 2018, Euralimentaire s’est fixé l’objectif de faire émerger 20 start-up et de créer une centaine d’emplois. Le deuxième plus grand marché de gros français (fruits, légumes, fleurs) après Rungis devrait donc bientôt faire parler de lui !
Six projets incubés. Porté par Elodie Van-Hoorebeke, Les Jus d’Elo prévoit la conception, la fabrication, la production et la commercialisation de jus de légumes et de fruits bio, pressés à froid, de «délices déshydratés», de smoothies et élixirs, de laits végétaux et autres cures détox. Actuellement en couveuse d’entreprises à Arras, Elodie Van-Hoorebeke avoue être arrivée «par hasard» dans le projet : «Je voulais tester les qualités nutritives de mes jus et je me suis rapprochée d’Eurasanté qui m’a parlé de l’incubateur.» D’une envie d’alimentation plus saine est né un projet entrepreneurial, «d’abord pour moi, puis pour mes amis et maintenant pour mes clients». Après une formation en hygiénisme, elle investit dans des machines semi-industrielles pour imaginer ses produits. Son arrivée à Euralimentaire lui permettra d’être au plus proche des grossistes et d’envisager des points de revente. Sa carte change tous les deux mois, avec des jus à la fois bons et beaux. Légèrement broyés, puis pressés dans une sorte d’étamine, les fruits sont débarrassés de leurs fibres pour une meilleure digestion. Elle se fournit déjà auprès de producteurs arrageois mais espère bien élargir sa palette d’ingrédients en intégrant Euralimentaire. «Je pourrais aussi bénéficier des chambres froides et de l’appui d’Euralimentaire pour créer mon site Internet.» Depuis la création des Jus d’Elo il y a quatre mois, le chiffre d’affaires évolue positivement.
Toujours dans l’idée d’une alimentation saine mais un poil plus saugrenue, Nutri’Earth élève et transforme des insectes comestibles pour en faire de la poudre à destination de l’alimentation humaine. «Ces insectes (tenus secrets pour l’instant, ndlr) concentrent des nutriments, des protéines et des vitamines et n’ont aucune mauvaise graisse. Leur élevage est écologique puisqu’ils produisent peu de gaz à effet de serre», explique Thomas Dormigny, l’un des trois cofondateurs. Et, cerise sur le gâteau, ces petites bêtes sont made in Hauts-de-France ! Réduits en farine et en poudre, à usage professionnel ou particulier, ils pourront être intégrés à tous types de repas. Au-delà d’un simple phénomène de mode, ce type d’alimentation commence à séduire de plus en plus d’adeptes. Si en Europe le sujet reste encore sensible, on sait qu’un tiers de la population mondiale se nourrit d’insectes. «Il y aura bientôt une impasse nutritionnelle, avec un déséquilibre entre l’offre et la demande, et donc une flambée des prix. Les nutritionnistes s’accordent à dire qu’il faut trouver d’autres alternatives. Notre projet repose sur un concept simple : ‘produire plus sain avec moins’.»Actuellement en phase de lancement et de recherche et développement, Nutri’Earth compte passer la vitesse supérieure grâce à Euralimentaire, pour rapidement générer de l’emploi et accroître les capacités de production.
Sur le même créneau mais sous une forme différente, Minus Farm élève des ténébrions – ou vers de farine –, grillons et criquets, et propose des apéros-dégustations ou des animations-débats. Virginie Mixe a embarqué toute sa famille dans cette aventure. «Nous élevons les insectes dans notre sous-sol. Nos enfants s’y intéressent aussi, c’est un projet de famille», explique-t-elle, accompagnée de ses recettes comme les «pastas épinards ténébrions», les «amuse-bouche concombres ténébrions» ou encore «la soupe de fanes de radis saupoudrée de ténébrions». Au-delà de l’aspect visuel auquel, certes, il faut passer outre, les insectes, une fois cuisinés, s’apparent plutôt à de la cacahuète pour les ténébrions ou à la crevette grise pour les grillons. Surtout, ils ont des propriétés nutritionnelles supérieures à celles du bœuf. «L’alimentation par les insectes n’est pas encore acceptée alors que ces mêmes insectes nourrissent les animaux et les poissons qui nourrissent eux-mêmes les hommes. Il faut des pionniers qui prennent des risques et nous en faisons partie», explique cette convaincue. Car des risques, Virginie Mixe est contrainte d’en prendre avec son activité, puisque la commercialisation d’insectes est pour l’instant interdite par la Commission européenne. Le règlement précise en effet que ces petits bêtes appartiennent à la catégorie des «Novel Food», ou nouveaux ingrédients alimentaires, et que leur mise sur le marché nécessite une autorisation préalable (la Belgique les a déjà tolérés, ndlr). La mise sur le marché de dix espèces est provisoirement tolérée tant que les prescriptions relatives à la sécurité alimentaire sont respectées, ce qui laisse à Virginie Mixe une marge de manœuvre : «Je veux être prête quand ce sera légal.» Elle a d’ailleurs imaginé un projet de ferme urbaine à Roubaix, avec 250 m2 d’élevage d’insectes à horizon 2019.
Facilitateurs du quotidien. Open Cooking et MEALIZY ont, quant à eux, pensé au casse-tête de nombreuses familles devant l’organisation quotidienne des repas. Le premier projet, porté par Adrien et Julien Rousseaux, propose une application pour gérer les aspects pratiques de l’alimentation, de l’élaboration des recettes en passant par les courses. «L’utilisateur peut choisir parmi 400 recettes, réalisables en moins de 30 minutes. Savoir ce que l’on va cuisiner est une question qui prend du temps. Nous espérons réduire par cinq le temps des courses (actuellement, un Français passe 2 heure 30 par semaine à faire des courses, nldr), tout en réinstaurant le plaisir de cuisiner», explique Adrien Rousseaux. En intégrant Euralimentaire, les deux associés espèrent construire des partenariats avec des industriels de l’agroalimentaire. Céline Grasset propose, avec MEALIZY, des box repas hebdomadaires prêtes à cuisiner en 30 minutes, sous forme d’abonnements, à partir de 5,6 € par personne. «Les clients choisissent leurs recettes ainsi que le nombre de convives et les ingrédients sont livrés dans une box réfrigérée, prédosés. Moi-même confrontée à un besoin de renouveler mes recettes, je voulais simplifier la cuisine du quotidien en apportant variété, goût et produits de qualité», explique cette ancienne salariée de la distribution spécialisée. A terme Céline Grasset aimerait embaucher un créateur culinaire pour élaborer des recettes. «Avec Euralimentaire, je vais pouvoir disposer d’un espace de préparation de commandes et être plus proche des fournisseurs», poursuit-elle.
L’alimentation différemment. Contrainte de bouleverser ses habitudes alimentaires pour des raisons de santé, Caroline Valent a imaginé une application – disponible le 15 mai –, MyFavoreat, qui facilite le quotidien des consommateurs soucieux de leur alimentation, que ce soit par obligation médicale, par conviction ou par éthique personnelle. Recettes, restaurants, magasins géolocalisés, articles… l’application recense des centaines d’adresses à la manière d’un GPS. Les prémices de MyFavoreat ont commencé sur FaceBook avec 2 500 adeptes. «20 millions de patients sont touchés par une pathologie digestive en France, 3% de la population est végétarienne. C’est un marché de niche, mais malheureusement en croissance», poursuit Caroline Valent, qui n’en est pas à sa première création d’entreprise. «J’aimerais embaucher trois personnes d’ici six mois», espère la porteuse de projet.
Six entreprises, six personnalités différentes mais une volonté commune : proposer une alimentation plus saine, ce à quoi aspirent de plus en plus de consommateurs. Espérons que le succès d’Euralimentaire suive la trace de ses confrères EuraTechnologies et Eurasanté, pour faire des Hauts-de-France un site d’excellence en produits frais.
ENCADRE
Le Marché de gros de Lille, une référence
• 2e Marché d’intérêt national en fruits, légumes et fleurs après Rungis
• 185 000 tonnes de marchandises commercialisées en provenance de la région, de France et du monde entier (chiffres 2015)
• 35% des légumes commercialisés
• Chiffre d’affaires : 194 M€
• 3 000 acheteurs (commerçants de proximité, restaurateurs, marchands de plein air, fleuristes, traiteurs, décorateurs…)
• 500 salariés