Un phénomène qui prend de l’ampleur
Le 8ème baromètre Ifop pour le Défenseur des droits et l’Organisation internationale du travail de perception des discriminations dans l’emploi permet de mettre en exergue l’acuité et l’importance de cette problématique au sein de la société française. Difficiles à mesurer, il est toutefois une lapalissade aujourd’hui que d’affirmer l’origine comme facteur aggravant de discriminations à l’embauche.
Selon le 8ème Baromètre DDD/ OIT de perception des discriminations dans l’emploi, publié le 13 février dernier, plus de quatre demandeurs d’emploi sur cinq estiment fréquentes les discriminations à l’embauche, voire très fréquentes pour un tiers d’entre eux. Les facteurs perçus comme les plus discriminants sont le fait d’avoir plus de 55 ans (88 %), d’être enceinte (85 %), le style (vêtement, coiffure… 81 %) ou l’obésité (75 %). Sont aussi cités comme un frein pour l’accès à l’emploi, le handicap visible (77 %) ou invisible (68 %) et, pour environ six personnes sur dix, le fait d’avoir un nom à consonance étrangère, une autre nationalité, ou un accent étranger. De surcroît, l’incidence de la crise sur le risque de discrimination à l’embauche fait consensus auprès des demandeurs d’emploi. Plus de huit sur dix jugent que ce risque est accru par le contexte de crise économique et de chômage. L’intérêt du Baromètre porte également sur le focus réalisé sur les demandeurs d’emploi d’origine étrangère qui permet de mettre en perspective leurs expériences vécues en matière de discriminations à la lumière de celles de l’échantillon global.
L’origine, un facteur déterminant
Face à l’embauche, un tiers des demandeurs d’emploi ont déjà été victimes de discriminations. Ainsi, ceux d’origine étrangère se disent autant discriminés que l’échantillon global (soit 32 %, contre 34 %). Cependant, ceux qui n’ont pas été victimes sont deux fois plus nombreux (14 % contre 7 %) à être certains qu’ils le seront un jour. Globalement, cette crainte est partagée par deux tiers des demandeurs d’emploi et la quasi-totalité de ceux qui en ont déjà été victimes. Concernant les situations de discrimination dans l’accès à l’emploi, l’entretien d’embauche occupe le devant de la scène. À noter, que les chômeurs d’origine étrangère sont confrontés aux discriminations tout au long de leur recherche d’emploi. Ces derniers sont plus enclins à signaler avoir subi une inégalité de traitement, lors d’un entretien d’embauche (74 %, soit +10 points par rapport à l’échantillon global), après réception ou examen de leur CV (54 %, +26 pts), ou encore pour accéder à une formation (42 %, + 21 points). De plus, l’âge et l’apparence physique sont les motifs de discrimination les plus cités, sauf pour les personnes d’origine étrangère qui évoquent majoritairement leur origine et convictions religieuses. En effet, pour près des deux tiers des victimes d’origine étrangère la discrimination était fondée sur leur origine, soit trois fois plus qu’au sein de l’échantillon global (20 %), où l’âge est le premier critère avancé. Ces dernières mentionnent également plus souvent les convictions religieuses (32 % contre 6 %) et le lieu de résidence, zone urbaine sensible, notamment, (21 % contre 16 %). Suite à la discrimination, le premier réflexe pour les personnes d’origine étrangère est de faire appel à leur réseau personnel pour trouver un emploi, soit 64 % contre 46 % pour l’échantillon global. Ou encore à un professionnel du recrutement (52 % contre 29 %). Face à la prégnance de ce fléau, les demandeurs d’emploi sont quasi unanimes (93 %) à dire qu’il est important de lutter contre ces discriminations. Et il existe aussi un réel consensus sur les actions qui amélioreraient la situation : notamment, le renforcement des sanctions à l’encontre des auteurs de discriminations dans les recrutements ; l’instauration de procédures de recrutement fondées sur des critères objectifs, comme les mises en situation, les CV anonymes ; la réalisation de tests de discrimination en conditions réelles auprès des recruteurs, et la publication des résultats (testing), ou encore la valorisation des professionnels du recrutement engagés dans la lutte contre les discriminations.