Rentrée du tribunal de commerce d’Arras

Un bilan 2021 contrasté

L’audience solennelle du tribunal de commerce d’Arras s’est tenue sans public le 14 janvier dernier, sous la présidence de Jean-Luc Carbonnier accompagné de Dominique Goyez, vice-président et président de chambre, Maxime Sailly, président de chambre, et en présence de Flavie Briche, vice-procureure de la République d’Arras.

De gauche à droite : Flavie Briche, vice-procureure de la République d'Arras, Dominique Goyer, vice-président du tribunal de commerce d'Arras, Jean-Luc Carbonnier, président, Maxime Sailly, président de chambre, et Jean-Marc Parmentier, greffier.
De gauche à droite : Flavie Briche, vice-procureure de la République d'Arras, Dominique Goyer, vice-président du tribunal de commerce d'Arras, Jean-Luc Carbonnier, président, Maxime Sailly, président de chambre, et Jean-Marc Parmentier, greffier.

Après l’intervention rituelle de la procureure, Jean-Luc Carbonnier a fait le point sur une année écoulée bien particulière et présenté les activités du tribunal et de ses 28 juges.

Les grandes tendances 2021

Pour le président du tribunal de commerce, «2021 a connu un épisode de forte baisse du nombre de procédures collective : 482 en 2019, 348 en 2020 et 269 en 2021, soit -23% par rapport à 2020 et -44% par rapport à 2019». Il est à noter que le tribunal gère en temps normal 600 procédures collectives en moyenne par l’an. Question du président : «Faut-il s’attendre au pire pour 2022, voire 2023 ?» Les ordonnances de référés passent de 58 à 79, soit +36%, à savoir qu’en 2019 elles étaient 97. Les jugements au fond ont suivi la même tendance : de 234 à 320, soit +36% pour 372 jugements en 2019. Les injonctions de payer s’élèvent à 914 pour 866 en 2020, soit +6%, 1 277 en 2019. Cette baisse s’explique principalement par la Covid avec les périodes de confinement.

Au niveau du registre du commerce, les formalités sont en hausse. «Une bonne nouvelle : la création d'entreprises en 2021 est en forte augmentation, passant de 4 490 à 5 634, soit +25%. Idem pour le dépôt des comptes annuels, qui passe de 8 654 à 11 842, soit +36% contre 13% de baisse l’an passé.» Des reports pour le dépôt des comptes ont été accordés pendant Ia période Covid par la loi d’urgence en 2020. Le nombre d'inscription de privilèges et nantissements est en forte augmentation - 16% -, principalement avec les inscriptions de crédits-bails et contrats de location de matériel.

Des outils de prévention

En 2021, les dirigeants d'entreprises en difficulté ont été reçus, ceux qui en faisaient la demande lors des audiences du président, comme ceux qui, sur la base des données du greffe, présentaient des signes extérieurs de difficultés. «Le constat est que le chef d’entreprise estime qu’il peut s’en sortir seul, et nous avons malheureusement des liquidations judiciaires sèches qui détruisent des emplois et des vies.» Les solutions amiables donnent pourtant de bons résultats. «Des solutions confidentielles existent pour les aider, bien avant ces extrémités. Il faut inciter les entrepreneurs en difficulté à venir rencontrer notre cellule de prévention. Il vaut mieux une bonne négociation et répartir les dettes plutôt que le débiteur, atteint de tétanisation au seul énoncé du tribunal de commerce, attende du ciel que l’affaire s’arrange toute seule.»

Une charte a été signée en mars avec l’Ordre des experts-comptables des Hauts-de-France et la Compagnie régionale des commissaires aux comptes des Hauts-de-France, qui permet de faire connaître plus largement le rôle du tribunal en matière de prévention et faire en sorte que les entreprises le sollicitent plus massivement et surtout plus en amont.
Par ailleurs, sous l’impulsion de quelques juges, Hélène Morel et Thierry Gluszak, et d’anciens juges, Sandrine Delory et Xavier Taillez, l’association Apesa 62 Arras est née en décembre. Entre autres objectifs, le réseau Apesa a pour but l’accompagnement et la prise en charge des chefs d’entreprise en détresse psychologique.

Un fonctionnement du tribunal quasi normal

Le président rappelle que le tribunal a été l’un des premiers à tenir des audiences en présentiel, en respectant les gestes barrières, la gestion des flux et la sécurité. Cette nouvelle organisation, toujours maintenue d’ailleurs, nécessite la présence de deux greffiers à l'audience et l’implication totale des juges et des auxiliaires de justice, «une belle performance».

Jean-Luc Parmentier a remercié chaleureusement le greffier, Jean-Marc Parmentier, et son équipe, «pour leur collaboration efficace de tous les instants. Soulignons que la qualité du greffe est partie intégrante - et je dirais prépondérante - de la bonne marche d'un tribunal de commerce. Sa collaboration est acquise en permanence et c’est un point primordial de notre tribunal.»

Parmi tous les remerciements, nous avons noté particulièrement ceux adressés à Jean-Marc Devise, président de la CCI, «qui, malgré ses propres difficultés budgétaires, prête ses locaux afin d'organiser des séances ouvertes à tous les juges de la 8e région Hauts-de-France», et au ministère public, «avec lequel nous entretenons des rapports constructifs en matière de procédures collectives».

L'année 2021 a connu un renouvellement significatif des juges dans la continuité : 7 juges parmi les 28 que compte le tribunal, se sont représentés et un juge s’est présenté pour la première fois à l’élection consulaire. Le président a d'ailleurs rendu un hommage appuyé aux juges pour leur bénévolat. «Grâce à eux, nous pouvons continuer à aider les entreprises en difficulté et ce n'est jamais très simple. Il nous faut sans cesse trouver de nouveaux juges pour assurer la justice consulaire dans trois arrondissements du ressort du tribunal. Rappelons que l'éloignement et le bénévolat constituant sans doute des limites difficiles à franchir par les ressortissants de certaines zones économiques, il nous faudra sans doute resensibiliser ces ressortissants en allant à nouveau y porter la parole de la justice consulaire.»

Pour conclure, le président a insisté sur l’intérêt de la justice commerciale, «qui est avant tout de traiter rapidement les contentieux, et d'aider de façon efficace et rapide les entreprises en difficulté grâce aux connaissances et à l'expérience accumulée des juges consulaires».

Christophe Pawletta a été installé lors de cette audience solennelle.

Quelques chiffres pour 2021

Procédures collectives

- Jugements d’ouverture : 269 (348 en 2020)

dont redressements judiciaires : 65 (94)

dont liquidations judicaires immédiates : 204 (247)

- Jugements de clôture : 679 (589)

- Jugements de sanction : 28 (19)

- Plans de redressement : 30 (34)

. Judiciaire et juridiction du président

Ordonnances de référé : 79 (58)

Jugements de fond : 320 (234)

Injonctions à payer : 914 (866)

. Registre du commerce et des sociétés

Immatriculations : 5 634 (4 490)

Dépôts comptes annuels : 11 842 (8 654)