Un an de Covid : quel avenir pour les discothèques ?
Les gérants de discothèque ne voient plus le bout du tunnel. Voilà un an que leurs établissements sont fermés en raison du protocole sanitaire contre la Covid-19. Le monde de la nuit s'est rassemblé en début de semaine pour témoigner de sa détresse.
Lundi dernier, le monde de la nuit s'est réuni à la CCI Grand Lille pour fêter un triste anniversaire : celui d'une année complète de fermeture administrative des discothèques.
«Nous avons été les premiers à
fermer, nous seront sûrement les derniers à rouvrir», déclare
Gérard De Poorter, président de l'Union des métiers et industries
de l'hôtellerie (UMIH) Hauts-de-France et Lille Métropole.
Quand les boîtes de nuit
rouvriront-elles ? Sous quelles conditions ? La clientèle
sera-t-elle au rendez-vous ? Ces questions ne quittent pas
l'esprit des patrons, mais elles restent sans réponses. Alors que le
Gouvernement se penche actuellement sur les mesures qui pourraient
être mises en place dans l'optique de rouvrir les restaurants, les
bars de nuit, eux, sont laissés pour compte. Si bien que 20% des
gérants de discothèque ont déjà mis la clé sous la porte
l'année dernière.
«Les restaurateurs ont eu une bouffée d'oxygène lorsqu'ils ont pu rouvrir cet été. Ce n'est pas notre cas», rappelle Péo Watson, figure de la nuit lilloise et représentant de la branche discothèque à l'UMIH Lille Métropole.
Chiffre d'affaires inexistant
Restent les différentes aides de l'Etat pour soutenir la filière. Elles sont toutefois jugées insuffisantes. «Les fonds de solidarité ont le mérite d'exister, mais il y a des trous dans la raquette. Cela avait très bien fonctionné sur la période de juin, juillet et août, où nous recevions 15 000 euros par mois», continue Péo Watson.
Puis la situation a empiré. Le monde
de la nuit dénonce un «micmac comptable», des indemnités
«aléatoires» sur le trimestre septembre-octobre-novembre.
Aujourd'hui, l'indemnité due aux gérants équivaut à 20% de leur
chiffre d'affaires. Une alternative qui ne satisfait pas l'UMIH, qui
réclame un passage à 30%.
«Ces sommes ne suffisent pas à
payer nos frais fixes, encore moins à se constituer un salaire. Nos
employés ont droit au chômage partiel mais pas les patrons. De
plus, l'Etat nous
rembourse avec plusieurs mois de retard... déplore encore Péo
Watson. Il y a bien le PGE, mais nous ne sommes pas tous éligibles. Son remboursement est décalé à 2022, mais le
soulagement est de courte durée car nous le rembourserons sur
quatre ans au lieu de six… Nous espérons être rouverts d'ici là pour gagner de quoi assumer
les frais.»
«Nous sommes encore sous perfusion, mais la charge supplémentaire à nos frais fixes sera conséquente», résume-t-il.
L'inactivité engendre également des dégâts matériels : «Nos machines prennent l'humidité, certains de nos confrères prévoient déjà jusqu'à 20 000 euros de réparations», fait remarquer Franck Dusquesne, gérant de plusieurs clubs et lui aussi représentant de la branche discothèque à l'UMIH Lille Métropole. «Les assurances sont les grandes absentes de cette pandémie malgré nos mensualités», regrette-t-il.
Attentive à cette problématique, l'UMIH est
actuellement en discussion avec trois assureurs pour créer une offre
propre aux CHRD.
Un refus de reprendre dès demain
Trous dans la trésorerie, démission
de personnels, dysfonctionnement du matériel… Une chose est sûre,
les professionnels de la nuit ne sont pas prêts à une réouverture
impromptue : «Même si on nous autorise à rouvrir demain,
nous voulons avoir le choix de rester fermés en restant indemnisés
tant que les protocoles sanitaires ne sont pas entièrement levés.
Nos discothèques sont des lieux de contact social et physique, c'est
incompatible avec le port de masque et l'interdiction des pistes de
danse», exprime Franck Dusquesne. «Ce serait comme rouvrir
les restaurants mais ne pas servir à manger», complète-t-on
dans l'assistance.
Des attentes précises
A l'issue de cet état des lieux
dramatique, l'UMIH a établi une liste de réclamations adressée à
l'Etat. Parmi celles-ci :
- l'indemnisation des fonds de commerce pour donner le choix aux gérants de se reconvertir,
- la rétroactivité pour les trois mois de fermeture administrative non indemnisés en mars, avril et mai,
- une indemnisation des salaires pour les patrons toujours sans ressources, le fonds de solidarité n’étant déjà pas suffisant pour couvrir les frais fixes de l’entreprise,
- une prise en charge à 100% des congés payés des employés (actuellement, seuls 10 jours sont pris en charge à 70% par l’Etat),
- une modification des délais d'indemnisation,
- un étalement du remboursement du PGE sur 10 à 15 ans,
- l'exonération de certaines taxes
pour provisionner le remboursement du PGE, voire passer le PGE
dans les charges fixes.
L'appel à l'aide sera-t-il entendu ?