Entreprises
U2P : holà sur l'augmentation du coût du travail
«Mesure inapplicable et irréaliste», «alourdissement du coût du travail» : l’Union des Entreprises de Proximité (U2P) - qui fait entrer dans son champ quelque 3 000 entreprises en Moselle - fait savoir son opposition quant à la proposition sénatoriale visant à faire travailler les salariés sept heures de plus par an sans rémunération pour financer les déficits des comptes publics. Explications.
La mesure revient sur la table. Dans le cadre du projet de loi de Financement de la Sécurité sociale pour 2025 et de la recherche par le gouvernement de recettes supplémentaires pour faire face aux déficits des comptes publics, le Sénat a introduit un article prévoyant de doubler la contribution de solidarité pour l’autonomie de 0,3 % à 0,6 % sur la masse salariale. Cette hausse serait instaurée en échange d’une possibilité de faire travailler les salariés sept heures de plus par an sans rémunération. Cette proposition avait été votée par le Sénat en novembre dernier dans le projet de loi de Financement de la Sécurité sociale, mais elle n’avait pas passé l’épreuve du vote à l’Assemblée nationale, les députés ayant voté la censure. Dixit les partisans de cette proposition : «Cette mesure peut, en 2025, générer deux milliards d’euros de recette fléchées vers les dépenses sociales, l'autonomie particulièrement.»
Plusieurs options
Aujourd’hui, la proposition est remise à l'ordre du jour par le nouveau gouvernement. Concrètement, l'idée pourrait prendre différentes formes. La première possibilité est de supprimer un jour férié, mais la mesure est impopulaire et d'autres pistes sont évoquées. Ainsi ces sept heures pourraient être fractionnées, ce qui reviendrait, pour les salariés, à travailler dix minutes de plus par semaine ou deux minutes supplémentaires par jour. La logique est la même que lors de l'instauration du lundi de Pentecôte comme journée de solidarité. Les entreprises sont libres de décider si elles optent pour la suppression d'un jour de congé ou de RTT (réduction du temps de travail) ou si elles étalent ces heures sur l'année. Le texte adopté par les sénateurs proposait un dispositif «souple» qui laisse la main aux partenaires sociaux pour décliner les modalités de mise en place. En définitive, ce serait aux parlementaires de décider s’ils veulent aller plus loin sur le sujet.
Le poids des charges
Du côté de l’Union des Entreprises de Proximité (U2P), cette proposition est «un non-sens». L’organisation patronale, qui fédère quelque 3,5 millions d’entreprises dans les secteurs du bâtiment (CAPEB), de l’alimentation et l’hôtellerie restauration (CGAD), la fabrication et les services (CNAMS), les professions libérales (UNAPL), les travaux publics et paysage (CNATP), soit 96 métiers, et fait entrer 3 000 entreprises dans son champ d’intervention en Moselle, argumente : «Cette mesure pouvant se traduire par un rallongement de dix minutes de la semaine de travail, non seulement est inapplicable en l’état dans les entreprises de proximité, mais surtout conduirait à alourdir purement et simplement le coût du travail, au moment même où l’U2P dénonce le poids des charges qui pèsent sur le travail - la contribution de solidarité pour l’autonomie est acquittée par tous les employeurs -. L’U2P propose donc un amendement de suppression des dispositions de l’article 7 bis B.»
«Croire qu’un chef d’entreprise va être derrière le dos de ses salariés pour vérifier qu’ils travaillent 10 minutes de plus par semaine et par extension sept heures de plus dans l’année, est irréaliste. En revanche, l’augmentation de la contribution de solidarité pour l’autonomie, elle n’aura rien de fictif», note Michel Picon, président de l'U2P.