Transport à voile : TOWT tient le bon cap

La réussite de la première traversée de son cargo Anémos, baptisée le 28 octobre au Havre, donne le cap à l’entreprise TOWT, qui devrait disposer d’une flotte de huit navires similaires d’ici 2027.

Les mâts de 70 m accueillent les plus grandes voiles du monde, d’une superficie de plus de 700 m². Lors de sa traversée transatlantique, l’Anémos a assuré une moyenne de 10 nœuds, avec une pointe à 16,2 nœuds. (© TWOT)
Les mâts de 70 m accueillent les plus grandes voiles du monde, d’une superficie de plus de 700 m². Lors de sa traversée transatlantique, l’Anémos a assuré une moyenne de 10 nœuds, avec une pointe à 16,2 nœuds. (© TWOT)

A bon port… Le cargo à voiles Anémos (capacité 1 100 tonnes), affrété par le jeune armateur havrais TOWT, vient d’achever sans encombre son premier aller-retour transatlantique. Parti du Havre début août les cales pleines, il a rejoint New-York, puis Santa Marta (Colombie) et Québec (Canada) avant un retour, toujours à plein, au Havre le 24 octobre. Une réussite qui lui a valu d’être baptisé en grande pompe le 28 octobre, dans le bassin de l’Eure, aux pieds de l’Ecole nationale supérieure maritime.

Mais surtout, cette traversée réussie lance TOWT sur la voie du succès. « Nous sommes encore en rodage, tempère Guillaume Le Grand, cofondateur de TOWT, en marge du baptême d’Anémos. Mais nous sommes en train de créer un standard du transport cargo à la voile. » Un deuxième navire – nommé Artémis - est déjà sorti des chantiers Piriou au Vietnam. « Il est en route, et vient de franchir le cap de Bonne Espérance », sourit Guillaume Le Grand. Et six autres bateaux sont déjà commandés (et financés), et devraient être entièrement livrés mi-2027. Le numéro 3, dont la cérémonie de pose de la quille a eu lieu le 7 octobre, s’appellera Atlantis.

Champagne, cognac, café… des clients prestigieux

Avec cette flotte de huit navires (qui pourraient sillonner d’autres océans que l’Atlantique), TOWT estime qu’elle aura atteint une taille critique lui permettant d’entrée dans une phase pleinement opérationnelle et offrir une alternative au super-porte-conteneurs. Cela représenterait environ 200 000 t de marchandise par an (et une économie de 40 000 t de carbone selon l’armateur). « Notre business plan est basé sur une exploitation raisonnable de nos navires, détaille encore le président de TOWT. Nous sommes un profil risqué, c’est vrai. Mais les banquiers nous suivent. »

Ils ne sont pas les seuls. Pour preuve, les plannings d’Anémos et d’Artémis sont déjà bien remplis jusqu’en 2027. Et déjà TOWT peut compter sur quelques clients de poids. « Nous assurons un service qui convient aux produits qui ont intérêt à se différencier et à valoriser par l’origine, détaille encore Guillaume Le Grand. Et nous assumons d’entrer par le cerise… » Comprenez des produits de luxe. Ainsi Martell Mumm Perrier-Jouët, la filiale prestige de Pernod-Ricard, compte sur les cargos-voiles pour transporter son champagne Mumm ou son cognac Perrier-Jouët. « C’est le rôle des grandes entreprises que de soutenir les acteurs novateurs, insiste Albane de Boisgrollier, chez MMPJ. Et l’objectif c’est que cela devienne le principal mode de transport maritime pour nous. »

Un transport différent et compétitif

C’est le cas aussi de l’entreprise Belco, importateur de cafés de spécialité. « J’ai mis deux ans à me convaincre que c’était une bonne idée », sourit Alexandre Bellangé, fondateur de Belco. Mais aujourd’hui, devenu actionnaire de TOWT, il n’y voit que du positif : un meilleur environnement de stockage (sous la ligne de flottaison et non en plein soleil), et un temps de transport réduit. Car si la traversée est un peu plus longue, le temps de chargement et de déchargement est beaucoup plus faible. « Pour une traversée, je suis passé de 45-50 jours à 25 jours, se félicite le sourceur de café. Et c’est un transport robuste : le vent a un prix qui est stable… » Bien qu’un peu plus cher pour le moment… « 25 à 30 centimes sur un paquet de 250 g », calcule Alexandre Bellangé. Avant de préciser : « avec ce bateau, il faut bien avoir conscience qu’on a divisé par dix le coût du transport à la voile en moins de 13 ans ». D’une capacité de 830 palettes, l’Anémos a notamment transporté 400 000 flacons de champagne Mumm et de cognac Perrier-Jouët à l’aller. Et 1000 tonnes de café pour Belco au retour.

Pour Aletheia Press, Benoit Delabre

Un emménagement quai Jean Reinhart ?

Pour l’instant ancré quai Dresseur, TOWT devra rapidement voir plus grand pour accueillir sa future flotte de 8 navires et ses 116 marins au Havre. Aussi, l’armateur a-t-il répondu à un appel à projets de Haropa Ports, concernant les entrepôts 44, 45 et 46 du quai Jean Reinhart, non loin de la célèbre cloche des dockers. « Nous envisageons d’y installer notre siège, mais aussi une pépinière d’entreprise, et un magasin », liste Guillaume Le Grand. Réponse dans quelques semaines…