Thalassa : les pêcheurs sur le même bateau que les scientifiques

Pour la première fois depuis 1976, l’annuelle campagne International Bottom Trawl Survey (IBTS) d’évaluation des ressources halieutiques en Manche orientale et en mer du Nord s’est déroulée en présence du président du Comité régional des pêches maritimes Nord - Pas-de-Calais - Picardie.

Le navire océanographique Thalassa a travaillé en Manche Est avant de rejoindre la partie sud de la mer du Nord et de terminer sa campagne à Boulogne.
Le navire océanographique Thalassa a travaillé en Manche Est avant de rejoindre la partie sud de la mer du Nord et de terminer sa campagne à Boulogne.
D.R.

Le navire océanographique Thalassa a travaillé en Manche Est avant de rejoindre la partie sud de la mer du Nord et terminer sa campagne à Boulogne.

 

Olivier Leprêtre a participé activement à la première semaine en Manche, du 19 au 26 janvier, à bord du navire océanographique Thalassa qui a ensuite mis le cap sur la partie sud de la mer du Nord. “J’ai beaucoup appris au contact des scientifiques, reconnaît-il, et je vais raconter aux pêcheurs ce que j’ai vu, en mettant au point des protocoles sur les bateaux de pêche pour renforcer cette science participative.”

Dès son retour au port de Boulogne le 20 février, la mission animée par l’ingénieur Yves Vérin, responsable du laboratoire Ressources halieutiques du centre Ifremer Manche-mer du Nord, a présenté les résultats préliminaires – et encore bien partiels − de la campagne 2016. En 30 jours de mer, les 24 scientifiques, qui accompagnaient les 26 membres de l’équipage commandé par l’ancien artisan pêcheur Loïc Provost, ont réalisé 75 traits de chalut le jour (de 30 minutes), 118 échantillonnages de nuit au filet à larves et mesuré 9 800 poissons. Après échanges avec les navires scientifiques des six autres pays participant à l’IBTS, il apparaît que les indices de recrutement des principales espèces observées ne sont pas bons. “La nouvelle classe d’âge qui assurera le renouvellement est faible et en-dessous de la moyenne pour le hareng, le cabillaud et l’églefin, même si, pour cette dernière espèce, nos observations à bord de la Thalassa sont meilleures“, résume Yves Vérin avec précaution. A contrario, le recrutement du merlan est en progression. Et, ajoute Youen Vermard, la diversité reste très forte en Manche Est, comme semble le confirmer la concentration de navires de pêches sur cette zone.

Le rouget-barbet bientôt sous quota ? Sa collègue d’Ifremer Morgane Travers-Trolet profite de l’escale pour revenir sur la campagne Channel GroundFish Survey qui s’est déroulée en octobre. Après le désarmement du Gwen-Drez, il a fallu intercalibrer les échantillonnages avec ceux de la Thalassa, avant de récolter les informations sur les stocks d’espèces commerciales en Manche : des données précieuses en ce qui concerne le rouget-barbet avant sa mise sous quota probable en 2018. Dès l’an prochain, CGFS sera étendu à l’ouest, jusqu’à Brest.

Utilisateur lui aussi des données collectées à bord de la Thalassa, Arnaud Auber cherche à expliquer, par le climat et par la pêche en Manche orientale, le changement d’état des communautés de poissons. Ce projet ECLIPSE − financé de 2014 à 2017 par Ifremer, EDF et la Région, et mené en partenariat avec le Parc naturel marin et le CRPMEM − a pour but “d’anticiper les changements futurs et d’atteindre ainsi l’objectif commun d’exploitation durable des écosystèmes“. Concrètement, les résultats apporteront des données pour l’élaboration de plans de gestion et de politiques de conservation à l’échelle locale, régionale, voire à l’échelle de toute la façade maritime. Ce ne sont plus les seuls stocks halieutiques que l’on évalue, mais, désormais, avec les pêcheurs eux-mêmes, l’état de toute la biodiversité.