Taxe, projet et réserves...

Après l'audit sur le transport dans le territoire et les remous qu'occasionne l'augmentation faramineuse de la taxe dite du "versement transport" (+60%), suite de l'enquête sur le transport dans le Calaisis avec, cette semaine, l'étude de faisabilité du projet de "transport en commun en site propre" (TCSP) dont nous nous sommes procuré une copie. Nombreuses sont les réactions que ce projet suscite.

Le quai de la gendarmerie voit passer la couteuse navette fluviale et pourrait acceuillir un bout de la nouvelle voie dite en Site Propre ».
Le quai de la gendarmerie voit passer la couteuse navette fluviale et pourrait acceuillir un bout de la nouvelle voie dite en Site Propre ».
CAPresse 2015

Le quai de la Gendarmerie voit passer la coûteuse navette fluviale et pourrait accueillir un bout de la nouvelle voie dite "en site propre".

Fabienne Galabert et Axel Lecomte ont rendu leur synthèse quant à l’étude de faisabilité du projet de transport en commun en site propre. L’étude de faisabilité a commencé à l’automne 2014 : elle concerne le déplacement du pôle d’échange du Théâtre vers la gare de Calais. Réalisés par le cabinet Transamo et l’Atelier JAM, les 38 pages recèlent un multitude d’informations.

 «Le réseau actuel comporte une dizaine de lignes et accueille environ 14 000 voyageurs par jour (en jours ouvrables de base, enquête OD 2014). Il assure une partie importante des déplacements domicile-travail et domicile-études, surtout dans la ville de Calais. Le réseau pâtit d’un manque de lisibilité : itinéraires dissociés, intervalles irréguliers qui ne favorisent pas son attractivité, notamment vis-à-vis des occasionnels. En outre, la facilité de circulation et de stationnement n’incite pas à la fréquentation des transports collectifs.» Pour que la pertinence de l’impôt − essentiellement acquitté par les entreprises − se tienne et que des économies d’échelle soient réalisables, il faut que la fréquentation augmente : c’est une problématique que connaissent de nombreuses agglomérations. Si l’étude est un diagnostic avec des pistes débroussaillées, on y perçoit cependant une certaine ligne directrice qui devra être discutée avec les usagers avant la définition du projet. L’importance de l’axe est-ouest en termes socio-économiques est ainsi flagrante ; les besoins pointés se situent dans les liens entre quartiers populaires, pôle universitaire et centre-ville. Le TCSP constitue également une opportunité pour «accompagner les quartiers en cours de développement (écoquartier, Coubertin) et les projets à venir», ainsi que pour mieux desservir des équipements structurants récents comme l’hôpital. Sans oublier les projets difficilement poussés par l’équipe municipale de Calais (pôle transport de la Turquerie, parc d’attractions qui peine à trouver des investisseurs). Un projet de transport est de fait nécessaire pour booster les projets d’équipements et de développement urbain.

«Justifier la nécessité d’une augmentation du versement transport»..Pourtant, la synthèse introduit un élément clé : «justifier la nécessité d’une augmentation du versement transport au 1er juillet 2015» lit-on page 4… Une suggestion en forme de préalable qui fait hurler les entreprises, principales contributrices au fonctionnement du budget du syndicat mixte des transports collectifs du Calaisis (voir nos précédentes éditions). Le projet de TCSP pointe l’axe principal des déplacements est-ouest de l’agglomération et pourrait s’appuyer sur la ligne 4 actuelle «dont le potentiel est le plus intéressant à développer». Mais certains écueils se dressent : «la desserte du centre-ville, le tissu urbain contraignent les itinéraires du TCSP ; le tracé pour traverser le quartier du fort Nieulay. L’accès à l’hôpital est un sujet en soi : pour une desserte optimale, il faut pouvoir entrer dans l’enceinte de l’hôpital et organiser des cheminements sécurisés et accessibles (PMR). Les autres secteurs sont moins problématiques, les emprises des avenues Blériot et Coubertin permettent d’envisager une requalification paysagère d’axes majeurs de la ville de Calais». Et ces difficultés engendrent des coûts qu’il n’est pas, à cette heure, possible d’estimer. Mais le document avance d’autres chiffres qui semblent hors de portée des collectivités adhérentes au SITAC : 30 à 34 millions d’euros pour moins de 9 km de tracé. Dans l’enveloppe, 3 millions d’euros seraient affectés à l’achat de matériels roulants, une dizaine de millions aux aléas, et 16% du total seraient dédiés à l’assistance à maîtrise d’oeuvre et d’ouvrage. Les acquisitions foncières ne sont pas chiffrées. Côté fonctionnement, la douloureuse n’est pas négligeable. En effet, dans un scénario où l’offre repose sur 10 minutes d’attente en heure de pointe et 15 minutes en heure creuse, dans une amplitude de 6h à 22h, «la production kilométrique commerciale du TCSP s’établit à 350 000 km par an (en comparaison, la ligne 1 effectue 550 000 km annuels). Sur la base du coût d’exploitation de la ligne 1 (4,3 euros/km) actualisée en 2020 à 4,85 euros/km, les coûts de fonctionnement du TCSP sont estimés à 1,7 million d’euros/an». A elle seule, la taxe versement transport en rapportera plus de trois fois plus…

Solitude calaisienne. Initialement favorable à l’augmentation de la taxe dite du versement transport, Pierre-Henri Dumont, maire de Marck-en-Calaisis et vice-président de l’Agglomération (mais pas au bureau du SITAC), a reconsidéré sa position : «Nous l’avons votée un peu rapidement. C’est inopportun. J’ai demandé à annuler cette hausse qui ne vise qu’à couvrir le déficit du SITAC.» Sur le projet de bus en site propre, l’édile émet aussi de sérieuses réserves : «Ça peut-être un beau projet, mais dans cette période de crise à l’Agglomération et dans les entreprises… Le site propre ne bénéficie qu’à Calais.» Un avis que partagent les élus de la commune de Guînes, adhérente au SITAC et qui a voté en mars dernier contre une modification statutaire du syndicat mixte qui entraîne une hausse de sa contribution. Les Guînois objectent que la nouvelle clé de répartition conduit la part guînoise à participer au financement de la navette fluviale (qui ne couvre qu’une partie du périmètre calaisien), en partie responsable du déficit du SITAC : «Il apparaît plus logique (…) de créer un service budgétaire permettant d’individualiser à l’intérieur du budget général du SITAC toutes les dépenses afférentes à la navette fluviale, d’indiquer dans les statuts que toutes les dépenses inscrites au sein du service ‘navette fluviale’ seront couvertes par la seule contribution de la communauté d’agglomération du Calaisis.» Pour intégrer le projet du SITAC dans son périmètre futur (l’agglomération calaisienne doit fusionner au 1er janvier 2016 avec la communauté de communes du sud-ouest du Calaisis) et attirer les autres communes rurales avoisinantes qui n’entreront pas dans la nouvelle agglomération, la ville-centre va devoir impliquer ses consœurs en partageant la gouvernance et offrir des services ailleurs qu’à Calais. Nous n’avons pas réussi à joindre Philippe Mignonnet, président du SITAC et adjoint au maire de Calais.

 Schéma p 10

Quelques tracés possibles pour le TCSP.

Schéma p 4

Le pôle Gare : un projet et une reconquête urbaine.