Entreprise à impact

Stirrup : lutter contre le sans-abrisme, mais de manière rentable

Delphine Barthe est une entrepreneuse dynamique à la tête de Stirrup. Cette start-up incubée à Lille, favorise la «location gratuite» des logements vacants, à des associations de lutte contre le sans-abrisme… Une entreprise à impact qui fait du business.

Delphine Barthe, dirigeante de la start-up Stirrup. © DR
Delphine Barthe, dirigeante de la start-up Stirrup. © DR

«La plus grande gloire n'est pas de ne jamais tomber, mais de se relever à chaque chute. » L'adage du, célèbre philosophe chinois Confucius sied comme un gant a Delphine Barthe. La gérante de Stirrup, une start-up qui transforme les logements vacants en «tremplins» pour des personnes dans le besoin, semble avoir déjà vécu plusieurs vies.

Mue par l'envie d'entreprendre, cette jeune femme dynamique entame sa carrière en 2016, en lançant sa première start-up nommée Smart Alert. «J’avais pour idée de lancer la commercialisation d’un bracelet connecté qui permettrait de prévenir les secours en cas de chute, se rappelle-t-elle. J’avais les financements pour sortir le premier prototype, j’avais une promesse de test de marché avec un grand groupe, mais les chercheurs voulaient réaliser une chaussette et non un bracelet. Ce n’était pas la commande, je me suis épuisée et j’ai décidé de stopper le projet.»

Un prêt de logement contractualisé

Hors de question pourtant pour cette femme dynamique de rester les bras croisés. «Après quoi, j’ai décidé de faire un peu de bénévolat». Et c’est lors de cette phase solidaire, que l’entrepreneuse va voir se dessiner les contours d’une seconde start-up. «Lors de mes maraudes, j’ai rencontré une famille de réfugiés avec laquelle j’ai sympathisé. Ces personnes, qui avaient une meilleure situation que moi dans leur pays, étaient à présent contraintes de dormir sous une tente, dans le froid. Je me suis dit qu’il fallait que je trouve une solution, se remémore Delphine Barthe. Mes parents avaient un logement vacant, ils m'ont proposé de leur prêter, mais ils voulaient qu’un contrat soit établi afin qu’ils récupèrent leur bien dans un état impeccable.» De là, est née Stirrup.

Sur les réseaux sociaux, Stirrup communique sur ses réussite, comme ici, la remise de clés de 3 maisons prêtées par l’alliance de Quartus, Maisons et Cités & CDC Habitat sur la Ville de Lambersart à l’association “Ukraine en Nord”, pour loger une quinzaine de personnes. © Stirrup

Aujourd’hui, Stirrup, incubée à Euratechnologies, compte 5 salariés qui mettent en relation les propriétaires de logements vacants avec les associations d’insertion au travers d'une plateforme. «Nous sommes une sorte de AirBnB du logement solidaire» sourit Delphine Barthe. Les logements sont prêtés pour une durée minimum de 6 mois et les loyers sont offerts aux associations d’insertion. «Aujourdhui, de nombreux promoteurs immobiliers sécurisent leurs logements vacants avec du gardiennage ou de la télésurveillance afin d’éviter les squattes et ça leur coûte beaucoup dargent. Chez Stirrup, nous leur proposons de mettre à disposition leurs logements vides à des personnes dans le besoin et d’offrir le loyer aux associations. C’est solidaire et moins coûteux» précise l’entrepreneuse. Considéré comme un don, le loyer offert est défiscalisé à hauteur de 60 %, et l'image de marque du promoteur est améliorée.

Considérée comme «entreprise à impact», Stirrup facture des frais de service récurrents et mensuels aux propriétaires de logements vacants, allant de 75 à 250 euros par mois. « Nous ne sommes pas une association. Nous sommes bien une entreprise qui fait du business. C’est important pour nous d’afficher ce côté business pour être pris au sérieux. Nous luttons contre le sans-abrisme, mais de manière rentable» ajoute l’entrepreneuse. Delphine Barthe espère ainsi que son entreprise sera rentable d’ici deux ans.

Industrialiser la cible

Depuis la création en 2017, l’équipe de Stirrup a déjà mis à l’abri une centaine de personnes. Mais l’objectif affiché est d’aider plus de 3 000 personnes en trois ans. «Nous allons clore une première levée de fonds de 800 000 euros environ. Cet argent va nous permettre de valider notre marché et d’industrialiser notre cible», précise la dirigeante. L’entreprise va également nationaliser sa plateforme. «Prochainement, nous allons donc lancer une campagne publicitaire au niveau national. Nous saisirons toutes les opportunités de logements vacants peu importe la ville où ils se trouvent», poursuit l’entrepreneuse.

En parallèle Delphine Barthe attend une évolution réglementaire. «Ce que nous souhaitons proposer, c’est que la mobilisation des logements vacants, même de manière flottante, participe à l'effort de nombre de logements sociaux réglementé». Sur tous les fronts, Delphine Barthe tente toujours d’avoir un coup d’avance : «Je place mes pions pour avoir le réseau et les fonds suffisants quand nous devrons scaler».