Etude de la Banque de France
Start-up : l'écosystème a résisté en 2023
Selon une récente étude de la Banque de France, les start-up ont réussi à préserver leur situation financière l’an dernier, malgré la contraction des levées de fonds.
En termes de financement, 2023 a été une année de rupture pour les start-up, après près de dix ans de croissance continue. Selon une récente étude de la Banque de France sur leur situation financière en 2023, les levées de fonds se sont effondrées de 38% en valeur l’an passé. Mais les start-up de l’échantillon (lire l’encadré) ont bien résisté : leur chiffre d’affaires a progressé de 18,6%, en moyenne (24,6 milliards d’euros), et leurs effectifs ont augmenté de 8%. « Dans ce contexte, l’analyse de 2 295 bilans de start-up montre que la trésorerie est préservée, les pertes se stabilisent, les fonds propres résistent et la dette bancaire ou obligataire reste un levier de financement additionnel », résume l’étude.
Une croissance très supérieure à celle des TPE et PME
En 2020, les start-up proposant des solutions numériques ont vu leur activité progresser du fait de la crise sanitaire. En 2021, elles ont accéléré leur croissance (+30%, en moyenne), bénéficiant de la reprise, au même titre que l’ensemble de l’économie. En 2022, cette dynamique s’est maintenue (+25%) dans un contexte de forte inflation et de hausse des taux. En 2023, leur activité a progressé de 18,6%, en moyenne. Même si l’inflation contribue en partie à ce taux de croissance, les jeunes pousses « conservent un rythme de croissance à deux chiffres, certes en retrait par rapport aux deux années précédentes, mais plus de trois fois supérieur à celui des TPE et PME », relève la Banque de France.
Ce taux de croissance moyen cache néanmoins de fortes disparités entre les 2 295 start-up de l’étude. Ainsi, un quart d’entre elles réalisent moins de 1,5 million d’euros de chiffre d’affaires et 25 % ont un chiffre d’affaires supérieur à 8,5 millions d’euros. Seule la moitié d’entre elles en réalisent une part à l’export et, là encore, on peut observer de fortes disparités entre les montants.
Des évolutions variables selon les secteurs
Les 2 295 start-up analysées employaient 101 500 personnes fin 2022 et 109 600 personnes fin 2023, soit une hausse de 8% de l’ensemble des effectifs, en l’espace d’un an. Ce sont les start-up de l’énergie et de l’environnement (greentech) qui ont connu la plus forte progression en termes de chiffre d’affaires en 2023 et d’effectifs, et le plus de levées de fonds, en nombre comme en montants levés. Viennent ensuite celles du e-commerce et les marketplace qui ont amorcé un retour à la normale en 2023, après plusieurs années de croissance exceptionnelle du fait de la pandémie ; le secteur software et data, porté par les solutions de gestion des données, de cybersécurité, d’IA prédictive et d’IA générative ; le marketing digital et des nouveaux médias ; le secteur de l’éducation et des ressources humaines ; les start-up de la santé, du tourisme et des loisirs, de la mobilité…
Une gestion adaptée à la contraction des levées de fonds
Après une décennie de croissance ininterrompue, les levées de fonds ont enregistré un net retrait l’an passé pour l’ensemble de l’écosystème, avec une baisse 38% du montant par rapport à 2022, qui avait été une année record avec des tickets supérieurs à 100 millions d’euros. Avec 715 opérations, les levées de fonds n’ont en revanche enregistré qu’un très faible retrait, en nombre, en 2023. « Dans ce contexte, les entrepreneurs semblent avoir adapté leur gestion puisque les capitaux propres de notre échantillon se renforcent de 9% » et « la part relative des capitaux propres rapportés au total du bilan ne s’érode que légèrement », note la Banque de France, en précisant que « 20% des start-up de l’échantillon conservent des fonds propres négatifs ».
Leur dette bancaire a progressé de 5 % en moyenne, en 2023. « 83% des start-up utilisent cette source de financement additionnelle, qui représente 32% des fonds propres. » Le financement obligataire est plus modeste en montant et en nombre de start-up concernées « mais progresse de 37%, principalement avec la mise en place de bridges (ponts de financements) » destinés à les soutenir « entre deux tours de table pour combler un manque de trésorerie ».
Une hausse des défaillances perceptible
En cumul, la trésorerie de l’ensemble des jeunes pousses étudiées s’est établi à un montant similaire à celui relevé fin 2022. « Dans un contexte de baisse des financements, les start-up ont préservé leur trésorerie active sans sacrifier la croissance de l’activité et des emplois, mais en se rapprochant de leur seuil de rentabilité. En effet, les pertes de l’exercice représentent 16,5% du CA en 2023, contre 21,3% en 2022 », explique l’étude. Toutes les start-up ne sont pas en perte : 36% affichent un résultat d’exploitation positif. « Au rythme de consommation de trésorerie observé en 2023, les start-up en perte [ndlr : 64%] auraient moins d’un an de réserve devant elles, hors nouvelle levée de fonds. »
Les premières difficultés de financement ont été observées au deuxième trimestre 2023, avec une pointe en fin d’année. « Une défaillance sur cinq concerne une start-up du secteur de la santé. Viennent ensuite ceux de l’énergie et de l’environnement, de l’alimentation et du e-commerce. »
Méthodologie
Pour la Banque de France, les start-up se distinguent des autres entreprises par leur fort potentiel de croissance, l’usage ou la création d’une technologie nouvelle et un besoin de financement souvent assuré par des levées de fonds. Pour réaliser cette étude, l’institution bancaire a donc collecté les bilans d’entreprises présentant ces trois caractéristiques et retenu celles qui répondaient à au moins un des deux critères suivants : un chiffre d’affaires supérieur à 750 000 euros en 2022 ou en 2023 et/ou des levées de fonds supérieures à 3 millions d’euros. Ont été exclues les entreprises introduites en bourse et dont le modèle de financement par le marché ne répond pas au cadre de l’étude. Au final, 2 295 start-up ont ainsi été sélectionnées dans l’ensemble des régions françaises. Ces dernières ont en moyenne 11 ans d’ancienneté.