Sharejob démocratise le prêt de main-d'oeuvre

Après le manque de matériel sportif via Shareathlon, Clément Hostache s'empare de la problématique du manque de main-d’œuvre avec la plateforme Sharejob. Ce portail propose aux entreprises en sureffectif de prêter leurs salariés aux employeurs sur-sollicités.

Clément Hostache, fondateur de Shareathlon et Shareajob.
Clément Hostache, fondateur de Shareathlon et Shareajob.

Les tensions en termes d'emploi étaient déjà nombreuses. La crise de la Covid-19 n'a fait que les renforcer. Aujourd'hui plus que jamais, on observe un déséquilibre : à cause d'une baisse d'activité, certaines entreprises se trouvent en sureffectif et se voient obligées de mettre leurs salariés en chômage partiel, tandis que d'autres métiers, très sollicités, peinent à recruter de la main-d’œuvre temporaire. Clément Hostache, accompagné de deux collaborateurs, a décidé de «faire le vase communicant».

Ensemble, ils ont lancé l'été dernier Sharejob, une plateforme de prêt de main-d'oeuvre. «Le but est de détacher temporairement des salariés d'entreprises en sureffectif, pour apporter leurs compétences dans une autre structure qui a besoin de renfort. Juridiquement, c'est possible depuis des années mais peu le savent. C'est ce qu'on appelle de la mise à disposition temporaire de main-d'oeuvre à but non lucratif», explique le fondateur.

L'idée de démocratiser cette option lui a été inspirée en faisant le lien entre deux activités qui ont marqué son parcours professionnel. Auparavant chef de projets chez Btwin, il a créé, il y a quatre ans, Shareathlon, un portail de prêt de matériel sportif.

Au sein du groupe Decathlon, il avait également endossé le rôle de consultant interne en animant des ateliers sur l'intelligence collective.

«A l'émergence de la crise de la Covid, alors que le prêt de matériel sportif était un peu à l'arrêt, j'ai constaté un regain des actions de solidarité. La notion de rebond était aussi beaucoup utilisée pour remettre sur pied des entreprises à l’arrêt. Et tel MacGyver, j'ai bricolé une nouvelle idée en m'inspirant de ce que je savais déjà faire : conseiller des structures pour les aider à identifier leurs besoins et à y répondre, à travers un portail de partage», raconte Clément Hostache.

Une pratique légale mais peu connue

Concrètement, ce partage de compétences ne présente pas de difficulté particulière : l'entreprise qui prête son salarié pour un temps prédéfini se fait rembourser les heures de travail prêtées, en temps plein ou en mi-temps, par l'employeur emprunteur.

«Je trouve ça super parce que ça solidarise un tissu économique qui n'a pas l'habitude de travailler ensemble. C'est un avantage pour l'employeur prêteur qui a un salaire en moins à payer sans mettre son salarié au chômage partiel ; c'est un avantage pour l'emprunteur qui n'a pas de surcoût à payer contrairement à ce qu'implique l'intérim ; et c'est un avantage pour le salarié volontaire qui peut acquérir une nouvelle culture d'entreprise, en se sentant utile, valorisé, plutôt que de rester en inactivité», vante Clément Hostache.

Les requêtes des différentes entreprises sont publiées sur le portail avec une description bien précise de leurs besoins. «La technologie seule ne suffit pas pour que le principe séduise. Nous cherchons à humaniser la démarche», indique le fondateur. Rien d'étonnant pour cette entreprise de l'ESS, qui rend d'ailleurs l'accès à la plateforme totalement gratuit.

Mais pour convaincre les dirigeants d'avoir recours à cet échange de main-d’œuvre, les postes d'annonces ne suffisent pas toujours. Clément Hostache s'est aperçu qu'il fallait éduquer les entreprises à cette pratique. Il a donc créé son propre module de formation (3 heures de vidéo et de la documentation annexe), pour présenter l'initiative aux clients dubitatifs.

En ce moment, Clément Hostache observe une tension sur les métiers d'animateurs auprès de jeunes en difficulté (le GAP a par exemple recours à la plateforme) ou encore sur les métiers d'assistant administratif dans les mouvements sportifs. «Une annonce qui fonctionne a une réponse en moins d'une semaine», indique-t-il.