Royaume-Uni: les conservateurs distillent des baisses d'impôts en vue des élections

Le ministre des Finances britannique Jeremy Hunt a annoncé mercredi une baisse de cotisations sociales et la prolongation d'une baisse de taxes sur l'essence lors de sa présentation budgétaire de printemps, espérant doper la popularité des Conservateurs en...

Le ministre des Finances britannique Jeremy Hunt pose avec la boîte rouge contenant le budget, à Londres le 6 mars 2024. © JUSTIN TALLIS
Le ministre des Finances britannique Jeremy Hunt pose avec la boîte rouge contenant le budget, à Londres le 6 mars 2024. © JUSTIN TALLIS

Le ministre des Finances britannique Jeremy Hunt a annoncé mercredi une baisse de cotisations sociales et la prolongation d'une baisse de taxes sur l'essence lors de sa présentation budgétaire de printemps, espérant doper la popularité des Conservateurs en retard dans les sondages en vue des législatives.

"Grâce aux progrès réalisés (...) nous pouvons à présent aider les familles non seulement avec des aides au coût de la vie temporaires, mais avec des baisses permanentes d'impôts", a fait valoir le Chancelier de l'Echiquier, titre officiel de M. Hunt.

Le taux de cotisations salariales va passer de 10 à 8%, après une baisse équivalente annoncée cet automne. M. Hunt a assuré que les Conservateurs vont "continuer à diminuer" ces prélèvements "pour que le travail paie vraiment", a-t-il souligné.

L'inflation, à 4% sur un an en janvier, a certes reculé depuis son pic de 11% fin 2022, mais elle reste au double de l'objectif de la Banque d'Angleterre (BoE), et le Royaume-Uni est entré en récession fin 2023.

M. Hunt appuie toutefois son budget sur des prévisions en hausse de l'organisme public de prévisions, l'OBR, qui table désormais sur une croissance britannique de 0,8% cette année, contre 0,7% lors de l'estimation de novembre, et de 1,9% l'an prochain (1,4% auparavant).

Budget très politique

Autres cadeaux fiscaux avant les élections, dont la date n'est pas encore connue mais qui devraient se tenir cette année: une prolongation d'un an d'une baisse de 5 points de pourcentage de la taxe sur le carburant et de six mois pour un gel des taxes sur l'alcool.

Le gouvernement évalue le coût des mesures annoncées mercredi à 13,9 milliards de livres.

"C'est un budget très politique" estime Karl Pike, professeur à l'université Queen Mary de Londres, interrogé par l'AFP.

Si ces baisses seront bienvenues pour "les gens qui ont un emploi" ce budget "soulève de grosses questions sur la meilleure manière de relancer l'économie du Royaume-Uni, confrontée à une décennie perdue en termes de niveau de vie", ajoute-t-il.

Il s'interroge sur l'opportunité de baisser les impôts "au regard de l'état des services publics" avec des durées d'attente interminables pour les rendez-vous médicaux ou des "collectivités locales qui font faillite", entre autres.

Pour Paul Dales, de Capital Economics, le paquet de mesures annoncées mercredi "pourrait à la marge aider à sortir l'économie de la légère récession" où elle est entrée en fin d'année avant les législatives, mais "un gros resserrement fiscal sera au menu après".

Tout aussi circonspect, Christopher Breen, du centre de réflexion économique CEBR, estime que malgré les allègements annoncés, "le fardeau fiscal reste au plus haut depuis plusieurs décennies".

Pour financer ses mesures, M. Hunt a par ailleurs indiqué mercredi prolonger d'un an, jusqu'en 2029, une taxe exceptionnelle de 35% sur les bénéfices des producteurs de pétrole et de gaz.

Elle avait été introduite en 2022 en pleine flambée des prix de l'énergie dans la foulée de l'invasion russe de l'Ukraine.

Une décision critiquée par l'organisme représentant le secteur des hydrocarbures, l'OEUK, qui décrie "des risques pour les emplois, l'investissement et la croissance".

Tentative désespérée

Le Chancelier a aussi annoncé mercredi la refonte d'un statut fiscal avantageux pour les résidents étrangers (dont a longtemps bénéficié la femme du Premier ministre Rishi Sunak), et dont la durée sera désormais limitée aux quatre premières années dans le pays.

Le gouvernement dit aussi tabler sur une augmentation de la productivité des services publics, avec des investissements de 4,2 milliards de livres au total d'ici 2029 pour moderniser le système de santé public (NHS), réduire les tâches administratives de la police ou lutter contre la fraude grâce à l'intelligence artificielle.

Répondant à la présentation de M. Hunt, le chef de l'opposition travailliste Keir Starmer a décrit "la dernière tentative désespérée de retrouver le contrôle de l'économie par un parti qui a échoué". Il appelle le Premier ministre à organiser des élections le 2 mai.

Mais M. Pike interprète les annonces de M. Hunt comme celles d'un "gouvernement qui veut gagner du temps avant de pouvoir dire que l'économie est repartie" et mise sur des législatives à l'automne.

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