Procès RN: quelles conséquences pour Marine Le Pen?
Menacée de cinq ans d'inéligibilité au procès des assistants parlementaires du RN, Marine Le Pen pourrait voir son éventuelle candidature à la présidentielle entravée, à moins que des recours et décisions de justice ne lui...
Menacée de cinq ans d'inéligibilité au procès des assistants parlementaires du RN, Marine Le Pen pourrait voir son éventuelle candidature à la présidentielle entravée, à moins que des recours et décisions de justice ne lui permettent in fine de se présenter.
. Quelle est la prochaine étape judiciaire ?
Mercredi ont eu lieu les réquisitions du parquet, c'est-à-dire le point de vue de l'accusation.
À partir de lundi seront prononcées les plaidoiries des avocats de la défense de Marine Le Pen et des 24 autres prévenus. La fin du procès est prévue le 27 novembre: le tribunal annoncera la date de sa décision et il entrera alors en délibéré.
Le jugement n'est pas attendu avant plusieurs mois, début 2025.
. Que se passe-t-il si Marine Le Pen est condamnée ?
Si Marine Le Pen est reconnue coupable, elle peut se voir infliger différentes peines:
- Une peine de prison, avec ou sans sursis, pouvant théoriquement aller jusqu'à dix ans.
Le parquet a requis cinq ans de prison, dont trois ans avec sursis. La partie ferme de la peine, deux ans, qui est réclamée, est aménageable, ce qui veut dire que la cheffe du parti d'extrême droite n'irait pas en prison mais elle pourrait être placée sous bracelet électronique.
- Une amende
L'accusation a réclamé une amende de 300.000 euros (l'amende maximale s'élevant à 1 million). Contre le RN jugé comme personne morale, elle a demandé 4,3 millions d'euros dont 2,3 millions avec sursis, soit 2 millions à verser immédiatement et 2,3 millions qui restent comme une épée de Damoclès, si le parti est à nouveau condamné.
- Une peine complémentaire d'inéligibilité
En vertu de la loi Sapin 2 de décembre 2016, une peine de 5 ans d'inéligibilité est forcément infligée si Marine Le Pen est reconnue coupable.
"La peine complémentaire d'inéligibilité est obligatoire, selon le code pénal, à l'encontre de toute personne coupable de certains délits", explique à l'AFP Benjamin Morel, maître de conférences en droit public à l'université Paris-I. Parmi les délits concernés figure le détournement de fonds publics pour lequel Marine Le Pen est jugée.
Si le tribunal ne veut pas la prononcer, il doit le justifier expressément dans son jugement.
Le parquet a requis cette peine d'inéligibilité de 5 ans et il a aussi demandé de l'assortir d'une exécution provisoire, soit une application immédiate, même en cas d'appel.
. Marine Le Pen pourra-t-elle se présenter à l'élection présidentielle de 2027 ?
Si le tribunal prononce une inéligibilité simple et que Marine Le Pen décide de faire appel, la peine sera suspendue jusqu'au deuxième procès.
En comparant avec les délais actuels des procédures à la cour d'appel de Paris puis à la Cour de cassation, il est tout à fait envisageable qu'il n'y ait pas de décision définitive avant la présidentielle de 2027.
En revanche, si le tribunal prononce une inéligibilité avec exécution provisoire, elle s'appliquera sans délai.
"Ca veut dire que l'appel qui sera formé ne va pas paralyser l'inéligibilité qui va être effective", confirme auprès de l'AFP Jean-Marie Brigant, maître de conférences en droit privé à l'université du Mans.
Si les juges suivent les réquisitions, Marine Le Pen ne pourra pas se présenter à la prochaine présidentielle, "ni à aucun autre mandat électoral", précise la constitutionnaliste Anne-Charlène Bezzina, maître de conférence à Sciences Po Paris et à l'université de Rouen.
C'est le Conseil constitutionnel qui établit la liste des candidats à la présidentielle après avoir effectué divers contrôles, notamment sur la situation pénale des prétendants. S'il y avait une peine d'inéligibilité assortie d'une exécution provisoire, Mme Le Pen ne pourrait donc pas se présenter.
. Et son mandat actuel de députée ?
Ce mandat ne serait pas remis en question. C'est seulement "en cas de dissolution et d'élections législatives anticipées" qu'elle "ne pourra pas se présenter", rappelle à l'AFP Anne-Charlène Bezzina.
En effet, le Conseil constitutionnel, de manière constante, refuse de déchoir de leur mandat les parlementaires condamnés à une peine d'inéligibilité, tant que la décision n'est pas définitive. Les élus locaux, quant à eux, perdent leurs mandats immédiatement.
"On a un principe de séparation des pouvoirs qui fait qu'un mandat de parlementaire ne peut pas être interrompu par une décision de justice", selon Benjamin Morel.
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