Priscillia Rossi de Leihia : "Les entreprises doivent croire en la valeur humaine"

Elle est venue s'installer dans les Hauts-de-France sans jamais avoir mis les pieds à Lille. Priscillia Rossi, fondatrice et présidente de Leihia, a fait le choix délibéré de s'éloigner de son réseau parisien pour créer en région une plateforme digitale qui combine IA et humain, pour un recrutement loin des sentiers battus.

Priscillia Rossi de Leihia : "Les entreprises doivent croire en la valeur humaine"

Le plein emploi pour tous. Un doux rêve dans cette période si sombre, mais Priscillia Rossi y croit. 

«J'ai créé mon entreprise à la veille du discours d'Emmanuel Macron annonçant le confinement. J'avais fait un constat sans appel : au plus je grimpais dans l'entreprise, au plus le système vivant était complexe et en souffrance : ce n'est pas le collaborateur qui part en burn out mais bien le monde qui va mal. Souvent, on fait ce que l'on attend de nous, et c'est pour cela que l'on constate de plus en plus de reconversions», explique-t-elle. 

Cette fière représentante du «Woman in tech» veut permettre à tout individu en quête de sens de trouver sa place dans la sphère professionnelle, s'appuyant sur plusieurs années de recherche en intelligence humaine, soutenue par le philosophe Michel Serres et le mathématicien et sociologue Michel Authier.


Une installation dans les Hauts-de-France en quelques semaines


«Plus de 70% des emplois sont des emplois cachés, pour lesquels on ne trouve pas d'offres. Les entreprises doivent changer leurs usages sur les politiques de recrutement», analyse la fondatrice. D'abord créée en région parisienne, Leihia a rapidement trouvé sa raison d'être dans les Hauts-de-France : une évidence pour Priscillia Rossi. «La région a connu trois crises sans précédent et elle regorge d'un bassin d'emplois et de compétences. Nous nous sommes d'abord installé au Village by CA Nord de France avec une dizaine de salariés, pour arriver ensuite à Lille Europe, et nous travaillons sur une implantation à EuraTechnologies.»


"Les entreprises doivent changer leurs usages sur les politiques de recrutement"

La tech au service de l'humain


Du premier stage en passant par le CDD, le CDI, l'emploi des cadres ou des seniors, Leihia fonctionne avant tout sur l'humain en proposant gratuitement aux candidats un bilan «de talents et de compétences», pour trouver les entreprises avec lesquelles ils sont adéquation. «Du côté des entreprises, nous leur offrons un organigramme, la possibilité de créer un référentiel et des profils de poste, basés sur les compétences et la singularité du métier. En quelques clics, l'entreprise crée sa fiche de poste et voit les candidats qui correspondent.» Il faut donc aller au-delà du diplôme, des années d'expérience ou du profil idéal pour s'intéresser davantage à l'individu et à ses valeurs. «Nous allons faire matcher la nature profonde d'un individu avec la nature de l'entreprise», ajoute-t-elle.

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Une force de frappe nationale


Priscillia Rossi veut s'appuyer sur un réseau de 500 "Leihiens", des consultants qualifiés et certifiés (professionnels du recrutement, des ressources humaines, de la formation...), pour rencontrer les candidats et approfondir leur bilan de compétences. Pour passer à la vitesse supérieure, Leihia vient de clôturer une levée de fonds d'1,65 M€. Près de 20 000 candidats ont déjà créé leur profil sur la plateforme. Reste à trouver les entreprises en face pour faire matcher les profils. S'adressant à tout type de chercheur d'emploi, Leihia mise aussi sur des partenariats avec des associations pour les secteurs en tension, à l'image des services à la personne. «Les entreprises de toutes tailles peuvent faire appel à Leihia. Nos prix oscillent entre 4 et 22 € par collaborateur et par mois. Après des crises, on a toujours observé des périodes de plein emploi, l'emploi va repartir.»

Actuellement, une quinzaine de salariés travaillent sur le projet à Lille, mais Priscillia Rossi voit grand : elle espère recruter 150 collaborateurs à cinq ans (notamment dans un service client interne, installé en zone franche), pour un chiffre d'affaires de 3,8 M€ en 2021 et une ouverture à l'international d'ici cinq à sept ans. «Les entreprises doivent croire en la valeur humaine. Je veux travailler sur des projets locaux et je compte bien rencontrer le DRH de Bridgestone pour que Leihia fasse partie du plan de revitalisation.» Sans conteste, l'année 2021 sera celle de tous les projets pour Leihia.