Présidence LR: Retailleau, le "semeur" qui veut récolter les fruits de Beauvau
Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau, qui se présentait comme "un semeur de graines d'autorité", sans pour autant aspirer à en récolter les fruits, s’est jeté mercredi dans la bataille pour prendre la tête des Républicains (LR)...
![Bruno Retailleau au siège du parti Les Républicains à Paris, le 4 décembre 2022, après les résultats du premier tour de l'élection à la présidence du parti © Alain JOCARD](/thumbs/1368×1026/articles/2025/02/36XP2GB.jpg)
Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau, qui se présentait comme "un semeur de graines d'autorité", sans pour autant aspirer à en récolter les fruits, s’est jeté mercredi dans la bataille pour prendre la tête des Républicains (LR), misant sur sa popularité gagnée à Beauvau.
En quatre mois à peine, le Vendéen, âgé de 64 ans, a su se rendre irremplaçable, s'appuyant sur une promesse faite lors de son arrivée place Beauvau: "Rétablir l'ordre, rétablir l'ordre, rétablir l'ordre".
Résultat, le quasi-anonyme président des sénateurs LR est désormais vu par les Français comme le leader de la droite, selon un sondage OpinionWay (24%), devant Xavier Bertrand (21%), Valérie Pécresse (15%) ou Laurent Wauquiez (13%).
"Il est devenu le symbole de quelque chose", confie un membre du gouvernement à l'AFP. "Il a cette habilité de travail patient. Il a une identité politique, qu'on aime ou pas", abonde une autre.
Président des sénateurs LR de 2014 à 2024, autrefois proche de Philippe de Villiers, le Vendéen à la frêle silhouette était connu du milieu politique pour son habileté et son aisance oratoire, lui qui parle sans note à la tribune. Mais son arrivée à Beauvau dans le gouvernement de Michel Barnier lui a fait gagner en notoriété: "Son passage au ministère de l'Intérieur a changé profondément la donne", explique le directeur de l'Ifop Frédéric Dabi à l'AFP.
"Il a une capacité à séduire les sympathisants du bloc central et du RN", ajoute-t-il, notant qu'il récolte 58% de bonnes opinions dans l'électorat de Marine Le Pen et 77% dans celui d’Éric Zemmour. "Il y a une vraie séduction d'une partie majoritaire des sympathisants RN, parce qu'il parle la même langue qu'eux, si je puis dire. Ils ont l'impression qu'il veut agir très fortement sur les questions d'insécurité".
La même langue" que le RN
Les médias d'extrême droite, justement, en ont fait leur chouchou, de Valeurs Actuelles, qui titre "Et si c'était lui ?" un portrait dithyrambique de cinq pages, au Journal du Dimanche, qui vante sa "force de conviction" et assure que le ministre de l'Intérieur "ne contourne jamais l'obstacle, il l'affronte".
Et tant pis pour les polémiques, notamment celle où l'ancien président des Pays de Loire estime que l'état de droit n'est ni "intangible" ni "sacré", celle où il assure que l'immigration "n'est pas une chance". Ou encore son recadrage, rarissime, par le parquet de Paris, pour une communication ministérielle jugée "prématurée" après l'interpellation en France d'un influenceur algérien.
Fidèle à sa ligne très droitière, récoltant les fruits de ses mesures annoncées pour lutter contre la délinquance, le narcotrafic et l'immigration, Bruno Retailleau a visiblement convaincu les policiers, à commencer par le syndicat Alliance Police Nationale aux côtés de qui il était devant l'Assemblée nationale, début février pour réclamer une hausse du budget ... défendu par son gouvernement.
Après avoir également retourné une partie des macronistes, qui lui étaient hostiles initialement, il devra maintenant persuader les adhérents LR - il avait échoué en 2022 face à Eric Ciotti - pour sortir vainqueur d'une guerre des chefs "dévastatrice" avec le patron des députés LR Laurent Wauquiez, qui ne s'est pas encore déclaré.
Les deux hommes, potentiels rivaux pour prendre la tête du parti, se sont rencontrés mardi soir lors d'un dîner en tête à tête à Beauvau, où Wauquiez a demandé au ministre le respect d'un "accord" passé entre eux sur la distribution de leurs rôles au sein des Républicains, selon des propos transmis à l'AFP par l'entourage de l'élu de Haute-Loire.
"A toi d'incarner la droite au gouvernement, à moi de reconstruire notre famille politique", a insisté Laurent Wauquiez, avant de lui lancer un avertissement sans ambigüité: "Si tu romps cet accord, tu porteras la responsabilité d'allumer une guerre des chefs qui sera dévastatrice".
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