Audience solennelle de rentrée du tribunal de commerce de Douai-Cambrai
Ouvertures de procédures collectives : la hausse n’est pas finie
À l’occasion de l’audience solennelle de rentrée du tribunal de commerce de Douai-Cambrai, le 11 janvier, son président Jean-François Krummenacker s’est réjoui de la hausse continue du nombre d’immatriculations actives au registre du commerce et des sociétés en 2022. Mais il a aussi pointé, dans le même temps, la situation financière dégradée d’un nombre croissant d’entreprises.
Pour sa troisième audience solennelle de rentrée du tribunal de commerce de Douai-Cambrai en tant que président, Jean-François Krummenacker a pu profiter de l’accalmie relative sur le front sanitaire pour, enfin, s’exprimer devant un comité élargi. Revenant le 11 janvier dernier sur l’actualité de l’institution en 2022, le juge a commencé par se réjouir de la diminution du délai moyen entre l’introduction d’une instance et sa plaidoirie (de 7 mois à 5,9 mois) d’une part, et celui du délibéré (de 2,8 à 2,2 mois) d’autre part. Autre motif de satisfaction, le nombre d’immatriculations actives au registre du commerce et des sociétés a sensiblement progressé, pour s’établir à 28 014 au 31 décembre (+5% sur un an).
Un grand nombre d’entreprises «zombies»
La suite de son exposé a cependant été sensiblement moins enthousiasmante, comme en témoigne le net rebond des ouvertures de procédures collectives : 227 redressements et liquidations judiciaires ont ainsi été prononcés, contre 129 en 2021. Certes, cette tendance relève moins d’une évolution inattendue que d’une normalisation de la situation, après que les aides publiques et les reports de cotisations sociales mis en œuvre au début de la pandémie ont fait chuter les défaillances à des niveaux anormalement bas.
Pour autant, «que voyons-nous lors de ces audiences d’ouverture ? Des liquidations judiciaires, des liquidations judiciaires et encore des liquidations judiciaires. Des chefs d’entreprises qui n’ont plus de clients, dont le coût des achats et des flux ont explosé, et qui n’arrivent pas à recruter ou à remplacer les salariés», a poursuivi Jean-François Krummenacker. Or les perspectives ne s’annoncent guère porteuses à court terme. «Même sans être devin, je peux vous annoncer que la noria des liquidations judiciaires va continuer car nous voyons bien, dans les dossiers que nous traitons actuellement, que la dette sociale constitue le plus gros des créances et ne peut être envisagée d’être remboursée dans les délais habituels tant elle est conséquente.»
Quelques minutes auparavant, le procureur de la République de Douai, Frédéric Fourtoy, avait indiqué que la France comptait 10 à 15% d’entreprises dites «zombies». Ce terme désigne les sociétés dont les revenus sont insuffisants pour rembourser leur dette existante et qui, de ce fait, parviennent à se maintenir en vie grâce aux aides publiques.
Mettre l’accent sur la prévention
Soucieux d’éviter un raz-de-marée de défauts, Jean-François Krummenacker a réitéré son appel aux dirigeants dont l’entreprise rencontre des difficultés croissantes à se rapprocher sans tarder du tribunal de commerce. Pour cela, de nombreux dispositifs existent, qu’il s’agisse de la prévention ou des procédures amiables. Parce que les mesures nécessaires ont été mises en œuvre à temps, «l’action du tribunal de commerce de Douai-Cambrai a contribué à sauver 124 emplois l’an dernier», a insisté Frédéric Fourtoy.
À l’intention des entrepreneurs en état de détresse psychologique, Jean-François Krummenacker a enfin rappelé que l’association Apesa du Douaisis et du Cambresis leur fournissait un service d’assistance gratuit et confidentiel, assuré par un psychologue local.
Un nouveau juge installé… et un nouvel appel à candidatures
Après avoir évolué tout au long de 2022 avec un siège de juge vacant, le tribunal de commerce de Douai-Cambrai vient d’installer dans cette fonction, pour un mandat de deux ans, Jimmy Bils. Ce dernier préside le groupe familial Bils-Deroo, qui est spécialisé dans la logistique et le transport (plus de 1700 collaborateurs, 172 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2021). Ce retour à l’équilibre, avec une formation composée de 19 juges, n’aura toutefois été qu’éphémère. «Une démission d’un juge au plus mauvais moment, à savoir juste après les élections, nous fait repartir en sous-effectif», a ainsi déploré Jean-François Krummenacker. Alors que plusieurs juges arrivent en fin de mandat et ne solliciteront pas sa reconduction, le président a donc lancé, comme il l’avait déjà fait un an plus tôt, un appel à candidatures auprès des chefs d’entreprise. Quatre postes seront ainsi prochainement à pourvoir.