«On n’est pas là pour être gentil, monsieur Humbert !»
Je travaille pour ce client depuis plusieurs mois, et c’est de cette façon que se termine mon entretien avec le nouveau DRH. Il a en effet souhaité en savoir plus sur la mission que m’avait confiée son prédécesseur. En sortant, j’ai l’intuition, qui fut vite confirmée, que cette mission sera ma dernière chez ce client.
Tout cela pour nous amener sur le terrain du 3ème niveau de la pyramide qui, dans le programme de (re)motivation de votre équipe, est celui qui va (chrono) logiquement vous occuper, maintenant que les soucis de rémunération globale sont derrière vous (voir précédents articles). Dans le profil SACRE, il s’agit du «A» de «Appartenance». C’est le niveau des besoins sociaux. Il englobe un spectre de notions très large qui va de la simple politesse à la fierté d’appartenir à l’équipe en passant par la bonne ambiance, la convivialité et la solidarité entre les membres de l’équipe.
Tout commence par un «Bonjour !»
«Le patron ? On le voit jamais dans l’atelier ! Et quand on le voit, c’est qu’y a un truc qui va pas». Caricatural me direz-vous ? Très bien ! Levez le doigt tous ceux qui mettraient leur tête à couper que leurs collaborateurs ne parlent jamais d’eux en ces termes ! Le fameux tour d’atelier (ou des bureaux) matinal vous parait peutêtre désuet voire inutile. Alors qu’en fait, c’est souvent le seul moment où vous et vos collaborateurs êtes (encore) disponibles et pas (encore) trop stressés. Bref, le meilleur moment pour savoir si le petit dernier de Ginette a enfin eu son permis de conduire, si Marcel est content de sa pêche du week- end ou si Raymond a pu obtenir une bourse d’étude pour sa fille. Et si vous n’êtes pas dans votre entreprise tous les matins, raison de plus pour en faire le tour quand vous y êtes. D’ailleurs, en vous écrivant cela, me revient en mémoire le fameux test des 3 passoires de Socrate. Un disciple vient un jour trouver Socrate pour lui dire : «Maître, savez-vous ce que je viens d’apprendre sur un de vos amis ?» Socrate lui répond : «un instant. Avant que tu ne parles, je voudrais te faire passer le test des 3 passoires». Le disciple s’interroge : «le test des 3 passoires ?» Socrate : «mais oui. Avant de raconter quelque chose sur un tiers, il est bon de filtrer ce que l’on aimerait dire. C’est ce que j’appelle le test des 3 passoires. La 1ère est celle de la vérité. As-tu vérifié si ce que tu veux me dire est vrai ?» Le disciple : «non Maître. J’en ai juste entendu parler par mon voisin». Socrate : «très bien. Tu ne sais donc pas si c’est la vérité. Essayons de filtrer autrement en utilisant la 2ème passoire. Celle de la bienveillance. Ce que tu veux m’apprendre sur mon ami, est-ce bienveillant ?» Le disciple : «ah non alors, bien au contraire !» Socrate : «donc, tu veux me raconter de mauvaises choses sur lui sans être certain qu’elles soient vraies. Mais tu peux peut-être encore passer le test car il reste encore une passoire : celle de l’utilité. Est-il utile que tu m’apprennes ce que mon ami aurait fait ?» Le disciple : «non en fait. Pas vraiment… » Socrate conclut : «alors si ce que tu as à me raconter n’est ni vrai, ni utile, ni bienveillant, à quoi bon me le dire ?» Voilà donc résumé ce que nous appelons entre nous le concept de l’UVB.
Etre gentil ne veut pas dire être faible !
Donc si vous associez plus ou moins consciemment «être gentil» à «être faible», alors pensez plutôt en termes de « bienveillance ». Car on peut être bienveillant et ferme à la fois. D’expérience, c’est souvent cette association qui permet d’emporter le plus facilement et le plus rapidement l’adhésion d’une équipe. En clair, c’est vous qui allez donner le «la» de l’ambiance dans votre équipe en montrant l’exemple. C’est-à-dire … en étant exemplaire : empathie, respect, disponibilité et humour sont donc à l’ordre du jour. Mais attention ! La frontière entre humour sain et «chambrage», voire ironie, est ténue. Donc pour éviter les malentendus ou les blagues qui tombent à plat, je vous suggère la seule forme d’humour garantie sans risque : l’autodérision. Et bien sûr, vous avez le droit de promouvoir ou de laisser s’instaurer le tutoiement, les pots de fin de semaine ou d’anniversaire (avec modération et dans le cadre de votre règlement intérieur), les croissants le vendredi matin, les repas de service, etc … Bref, tout ce qui peut permettre d’améliorer la convivialité et donc l’ambiance. Gardez juste à l’esprit que ces moments ne peuvent être rendus obligatoires ou systématiques. Cela pourrait créer un malaise auprès des personnes dont le « A » du profil SACRE est mineur. De même si vos intentions sont d’utiliser ces moments pour soutirer des informations ou pour vous faire bien voir. Cela pourrait alors créer une défiance dont vous auriez ensuite le plus grand mal à vous défaire. La prochaine fois, je vous donnerai le secret pour transformer un simple manager en un leader charismatique. Si, si, c’est possible. D’ici là, prenez soin de vous … et de votre équipe.