Entretien avec Antoine Bonduelle, de l’ONG Réseau Action climat

«Nous n’avons plus besoin de pédagogie, il faut de l’action»

La COP27 s'ouvre le lundi 7 novembre à Sharm El-Sheikh en Egypte. 40 000 personnes de 196 pays sont attendues pendant 15 jours de débats pour trouver des solutions au réchauffement climatique. Quels sont les principaux enjeux cette année de ces rencontres ? Et comment ces échanges nous concernent-ils en région ? Rencontre avec le nordiste Antoine Bonduelle, de l’ONG Réseau Action climat et un des relecteurs du rapport du Giec (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat), qui a participé à de nombreuses COP.

"L’Accord de Paris est comme un «Climatothon», où chacun s’engage à honorer, voir à renforcer, ses engagements" souligne Antoine Bonduelle.
"L’Accord de Paris est comme un «Climatothon», où chacun s’engage à honorer, voir à renforcer, ses engagements" souligne Antoine Bonduelle.

L’ambassadeur d’Egypte en France, Alaa Youssef, parle de cette COP comme le «Sommet de la mise en oeuvre». Sur quoi les négociations devraient-elles se concentrer cette année ?

Il y a trois sujets que l’on va suivre en particulier, déjà engagés l’année dernière à Glasgow à la COP26 : celle d’abord du financement des pertes et dommages des pays qui ont des impacts climatiques inévitables quelque soit les mesures prises. Comme par exemple ceux qui voient leur île disparaître. Egalement, nous serons attentifs à la révision annuelle des promesses des pays pour l’atténuation du réchauffement climatique à 1,5 degré selon l’Accord de Paris. Cet Accord, c’est comme un «Climatothon», où chacun s’engage à honorer, voir à renforcer, ses engagements. Enfin, on va suivre les coalitions de pays qui se sont créées l’année dernière lors de la COP26, sur des enjeux ciblés comme aider l’Afrique du Sud à sortir du charbon. Ces coalitions sont timides mais peuvent être efficaces.


Le financement reste le nerf de la guerre ?

Oui, bien sur. Les négociations vont aussi se poursuivre pour financer l’adaptation des pays les plus vulnérables, avec un objectif d’une enveloppe de 100 milliards de dollars par an, et aussi aider la transition énergétique dans les pays émergents. On sent d’ailleurs une bagarre entre ces deux buts à atteindre qui sont pourtant nécessaires. Mais on voit bien que c’est dans les pays émergents que se passent les choses les plus importantes : c’est là qu’il y a les plus gros potentiels et aussi les risques majeurs de dégradation de l’atmosphère.


Comment agir auprès de ces derniers ?

Une coopération décentralisée avec les pays émergents peut être très efficace et ca peut être le rôle de nos collectivités de nouer des contacts avec les grandes villes de ces pays pour les accompagner.


Quelle est l’impact de la guerre en Ukraine et sa crise énergique sur les ambitions des pays dans la lutte contre le réchauffement climatique ?

Cette crise débloque une situation dans laquelle le gaz avait réussi à garder une situation privilégiée dans les hydrocarbures. On voit bien aujourd’hui que le gaz est un problème et qu’il faut en sortir. Cela devrait inciter les collectivités et le monde industriel à développer par exemple les réseaux de chaleur. Par ailleurs, sur la question du charbon, aucun pays européen sauf la France pour deux ans, n’a retardé sa sortie du charbon. C’est un bon signe. Et les pays dans le reste du monde qui seraient tentés d’y revenir auront du mal à trouver des financements. Rappelons que l’Accord de Paris a permis un recul inédit sur la question du charbon : il y avait 1500 gigawatts de projets d’usines de charbon en 2015, soit un doublement de centrales, depuis les trois-quarts ont été abandonnés.


Comment les intérêts de nos territoires sont-ils défendus sur place ?

Des régions, des maires, des experts y viennent régulièrement, avec un rôle d’aiguillon pour l’Etat. On se souvient même que certaines années des régions américaines faisaient sécession par rapport à l’Etat pour appliquer le protocole de Kyoto (accord international visant à la réduction des émissions de gaz à effet de serre). Mais il y en a aussi qui viennent faire du greenwashing. Or, le prétexte de conscientisation ne suffit plus. Les concitoyens savent que le problème du climat est sérieux : nous n’avons plus besoin de pédagogie, il faut de l’action.

Les Hauts-de-France à la COP27

La COP, la Conférences des parties, réunit annuellement 196 pays +l’UE sur les questions climatiques, pour tenter de limiter le réchauffement à 1,5 degré et aider ceux qui en souffrent. Cette année, pour la 27ème édition, elle a lieu à Sharm El-Sheikh, sous présidence égyptienne. Les Hauts-de-France seront représentés sur place à travers différentes institutions comme le Comité Européen des Régions qui regroupe des élus comme Jean-Noël Verfaillie maire de Marly, près de Valenciennes, ou encore le groupe européen des Cent villes neutres pour le climat dont fait partie la Communauté urbaine de Dunkerque. Egalement, on y trouvera l’équipe du bateau-laboratoire Plastic Odyssey, qui a passé plusieurs mois en 2021 à Dunkerque pour devenir un bateau show-room des solutions de recyclage du plastique, avant de faire le tour du monde.

Séance plénière lors de la COP26.